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lundi 18 mars 2013

Iran : Le rapporteur spécial de l’ONU Ahmed Shaheed attaqué par le régime

                                 

Le Temps : Par Luis Lema - Le rapporteur spécial de l’ONU Ahmed Shaheed est-il à la solde des Etats-Unis? C’est l’accusation lancée il y a quelques jours par le chef du Haut Conseil des droits de l’homme iranien, Javad Larijani, qui anticipait de cette manière le rapport sur son pays présenté lundi à Genève devant le Conseil des droits de l’homme. Le rapporteur aurait reçu «des pots-de-vin» de la part du département d’Etat américain, affirmait le responsable iranien. Il y a peu, Téhéran avait déjà qualifié tout de go -Ahmed Shaheed d’agent de la CIA.
 L’intéressé ne s’en émeut guère: «Les autorités iraniennes cherchent ainsi à faire diversion, explique-t-il au Temps. Mais elles n’ont réussi qu’à attirer encore davantage l’attention sur ce qui se passe ici.»
Le rapport d’Ahmed Shaheed est particulièrement accablant. Bien que ses enquêteurs n’aient pas pu se rendre en Iran, ils ont mené des centaines d’interviews au téléphone, grâce notamment à l’appui d’organisations locales et internationales. «Cette méthode a ses limites, reconnaît Ahmed Shaheed, qui fut notamment le chef de la diplomatie des Maldives. Mais elle permet aussi davantage de liberté en ne mettant pas en péril les personnes interrogées.»
Violations «systématiques» des droits de l’homme; membres des minorités pourchassés; pratique de la torture – y compris des viols et des abus sexuels – largement répandue dans les centres de détention… Pour la seule année 2012, l’Iran aurait en outre procédé à près de 500 exécutions, assurent les enquêteurs de l’ONU, qui se disent «alarmés» par la progression du nombre de cas. La peine de mort sanctionne des crimes qui, d’ordinaire, ne sont pas considérés comme les plus graves, tels la consommation d’alcool ou l’adultère, ou encore le trafic de drogue.
Ahmed Shaheed aborde aussi la question du régime des sanctions auquel sont soumises les autorités de Téhéran du fait de la poursuite du programme nucléaire iranien. «A notre connaissance, aucun Iranien n’est mort directement à cause de ces actions économiques. Si les Iraniens ont d’autres informations, ils doivent nous les communiquer», expliquait-il quelques heures avant la présentation de son rapport, en faisant référence à des affirmations iraniennes selon lesquelles «1% des morts dans le pays» seraient dues à l’embargo international. Dans son rapport, le responsable rappelle que même l’imposition de sanctions ne libère pas un Etat de l’obligation de faire bénéficier de ses droits chaque individu, sans discrimination et en cherchant particulièrement à protéger les groupes «les plus vulnérables».
Autrement dit, l’Iran ne peut tirer prétexte de ce régime de sanctions pour laisser se dégrader les conditions de vie de sa population. Dans ce contexte, «nous recommandons avant tout à Téhéran davantage de transparence pour nous permettre de juger de l’impact exact des sanctions», résumait le rapporteur.
Mieux cibler les sanctions
Cependant, Ahmed Shaheed enjoint aussi à la communauté internationale de mieux cerner les effets de ses propres mesures de rétorsion. «La plupart des banques et des instituts financiers se détournent actuellement de ce pays, note-t-il. Or, il faut s’assurer que la nourriture de base, la fourniture médicale et les autres biens humanitaires continuent d’échapper à ces sanctions.» De même, la hausse de l’inflation dans le pays et les baisses de subventions pourraient signifier un accès plus limité des Iraniens aux biens de première nécessité.

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