La peine de mort en Iran inquiète l’ONU
« Nous sommes profondément préoccupés par le pic signalé d’exécutions en Iran depuis le début de cette année », a déclaré la porte-parole du Haut-Commissariat de l’Organisation des Nations Unies aux droits de l’Homme, Ravina Shamdasani. L’ONU s’alarme du nombre d’exécutions en Iran portées au nombre de 80 depuis le début de l’année 2014, selon les chiffres publiés par l’ONU la semaine dernière. « Certaines sources fiables indiquent que le chiffre réel pourrait être de 95 », insistela porte-parole.
Il est nécessaire de comprendre que la peine de mort en Iran est un principe ancré depuis bien longtemps. La naissance de la République islamique d’Iran en 1979 a été suivie par une vague d’exécutions importante. Dix ans plus tard entre 1988 et 1989, le massacre des prisons est venu renforcer cette institution. Une descente qui s’est concrétisée par la mise à mort de prisonniers politiques par les autorités iraniennes. Les chiffres ne sont pas infaillibles puisqu’ils oscillent entre 5000 (selon Amnesty International) et 30 000 (selon de nombreux médias). En effet, puisque les exécutions ont été menées dans le plus grand secret, il est difficile de connaître le nombre exact de victimes. Cet acte barbare a fait suite à la fin de la guerre entre l’Iran et l’Irak et au refus de ces hommes incarcérés de soutenir l’Ayatollah Khomeiny. Ce dernier a même été jusqu’à émettre une fatwa à l’encontre de ces milliers d’opposants.
L’année dernière, le 25è anniversaire de ce massacre a mis en lumière les nombreuses failles qui persistent depuis cet évènement. Amnesty International a, à cette occasion, réitéré sa demande au gouvernement iranien d’éclaircir et de reconnaître la situation. « Un quart de siècle après ce massacre, les autorités iraniennes refusent d’évoquer ce qui s’est passé. Elles cherchent à effacer toute trace du « massacre des prisons ». Ces événements n’ont jamais fait l’objet d’une enquête et aucune des personnes responsables pendant cette période n’a été jugée – certains hauts fonctionnaires de l’époque occupent même encore des postes importants aujourd’hui. »
Données incertaines
Aujourd’hui encore, il est difficile de connaitre le nombre exact d’exécutions en Iran car le gouvernement en pratique certaines en secret. C’est ce que dénonce Iran Human Rights qui porte à 624 le nombre de morts par condamnations en 2013 alors que le gouvernement n’en dénombre que 334. L’ONG dévoile même un tableau des exécutions avec les noms, les types, les raisons et les lieux (http://www.iranhrdc.org/english/publications/1000000225-ihrdc-chart-of-executions-by-the-islamic-republic-of-iran-2013.html#.UxBWofl_s6s).
Plusieurs raisons entraînent une condamnation à mort en Iran même si les principales restent les meurtres et le trafic de drogue. Clairement régi par la Charia, le droit pénal iranien prévoit différents délits pour la peine de mort : crimes violents (vol à mains armée, meurtre, violence aggravée), les actes non-violents (trafic de drogues, adultère, pratique d’actes homosexuels, piraterie informatique…) et parfois dans des cas d’inculpation politique ou religieuse (complot contre le gouvernement, blasphème, apostasie, menace à la sécurité nationale…).
Et l’arrivée au pouvoir du président modéré Hassan Rohani n’a rien changé contrairement à ce qui était espéré. L’homme politique avait fait la promesse « d’apporter une dose de modération à un pays connu pour ses lois rigoureuses ». Le nombre d’exécutions n’a pourtant pas cessé d’augmenter depuis sa prise de pouvoir et notamment les pendaisons en public. Selon l’ONU, 57 ont été exécutés en public en 2013. Un moyen de montrer l’exemple et d’instaurer un système de terreur.
Exécutions secrètes
Deuxième pays derrière la Chine en terme de nombre d’exécutions, l’Iran applique aujourd’hui la peine de mort de manière un peu floue. C’est notamment ce qui inquiète l’ONU. « Nous sommes particulièrement préoccupés par l’exécution [...] en secret de deux membres de la communauté arabe d’Ahwaz […] Les deux hommes auraient été condamnés à mort pour apostat, corruption sur terre et pour avoir agi contre la sécurité nationale », s’inquiète Ravina Shamdasani la porte-parole du Haut-Commissariat de l’Organisation des Nations Unies aux droits de l’Homme. Ces deux hommes, M. Hadi Rashedi et M. Hachem Sha’bani Amouri, auraient été privé d’avocat et de leur famille durant les neufs premiers mois de leur détention mais surtout ils auraient été contraints d’avouer sous la torture. Une pratique apparemment répandue.
Un moyen un peu insolite semble permettre d’échapper à la peine de mort. Dévoilée par le site vocativ.com il y a quelques semaines, l’information peut laisser perplexe. Quinze prisonniers iraniens condamnés à mort ont été épargnés parce qu’ils ont appris le Coran par cœur. Le site écrit : « cinq femmes et onze ont été pardonnés après avoir mémorisé le Coran avec succès. Quinze ont été entièrement relaxés et un prisonnier a vu sa peine de mort réduite à 15 ans de prisons. » Aussi insolite soit-elle, l’anecdote ne laisse pas beaucoup d’espoir à une réduction concrète et rapide du nombre d’exécutés en Iran.
March 1, 2014 by Mélina LHERMITE
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