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jeudi 29 mai 2014

Iran : lettre ouverte de 46 prisonniers politiques

                  
Dans une lettre ouverte depuis la prison Rajaï-Chahr de Karaj (près de Téhéran), 46 prisonniers politiques et d'opinion ont remis en cause les fondements légaux de leur détention et ont appelé à un jugement conforme à l'équité et à la justice.
La lettre de 5000 mots, adressé " au peuple d'Iran", développe un argumentaire juridique fouillé pour dénoncer les motifs de détention, qu'ils jugent illégaux. L'agence de presse dissidente Kordpa qui l'a publié, précise que la lettre a été approuvée par deux juristes internationaux, Abdolfatah Soltani et Mohamad Siqzadeh. En voici un résumé:

Chers compatriotes,
Le pouvoir iranien a toujours prétendu que nous (la République islamique) n'avons pas de prisonniers politiques, mais ce sont plutôt des individus ayant commis des délits sécuritaires, des apostats, des terroristes, des monaféghine (Moudjahidine), des séditieux etc…

Premièrement, en vertu des articles 156,168 et 172 de la constitution, les délits sont définis comme étant soit des délits de droit commun, soit des délits politiques, de presse ou militaires. Par conséquent un délit avec l'épithète sécuritaire n'a pas de fondement juridique selon la constitution et une telle inculpation s'avère illégale.

Deuxièmement, en vertu des articles 186, 498,4 199,5 100,508 et 610 du code pénal de la République islamique, l'ensemble des prisonniers politiques et d'opinion ont été jugés et condamnés par des instances illégales et selon une procédure inique. Par conséquent il importe de relever les points suivants:

-  (…) En vertu de l'article 26 de la Constitution et l'article 20 de la Déclaration universelle des droits de l'homme , ainsi que l'article 22 de la Convention internationale des droits civils et politiques, le droit d'association est un droit indélébile de la population et ne nécessite pas une demande d'autorisation d'aucune autorité.

-  En vertu de l'article 27 de la Constitution et l'article 20 de la Déclaration universelle des droits de l'homme et l'article 21 de la Convention internationale des droits civils et politiques, le droit au rassemblement constitue un droit inaltérable de la personne, du groupe et du peuple et ne nécessite pas une demande d'autorisation d'aucune autorité. Nous savons cependant que de tout temps et partout en Iran, le pouvoir de la République islamique a répondu aux droits de rassemblement et de grève par la répression, la prison et la tuerie de milliers de personnes. Par exemple ils ont qualifié les rassemblements et les manifestations de 2009 comme de la sédition pour justifier la répression.

- Concernant les prisonniers d'opinion: si les prisonniers d'opinion sont également des prisonniers politiques, il faut cependant relever que ces derniers ont été emprisonnés seulement pour avoir exprimé leur opinion, ce qui n'est pas un délit selon la loi. Parmi cette catégorie de prisonniers, il faut citer les compatriotes de confession Bahaï, les nouveaux chrétiens, les soufis, les derviches (…) qui ont été poursuivis, emprisonnés, torturés et exécutés sous le chef  de sédition en vertu de l'article 220 du code pénal islamique qui se réfère au Fegh'h (charia). Alors que l'article 36 de la Constitution précise que les questions pénales ne peuvent pas se référer au Feq'h et ne peuvent émaner que d'instances juridiques. Cette dérogation dangereuse doit être corriger.

- L'instruction et la procédure pénale: les accusés sont poursuivis, condamnés et châtiés par des instances illégales, au cours de procédures iniques et en l'absence totale du droit légitime à la défense. Les accusés politiques et d'opinion ont été complètement privés de leurs droits à une procédure équitable, même ceux qui devraient leur être reconnus dans le cadre des propres lois de la République islamique. Les prisonniers politiques et d'opinion ont été privés de leurs droits de choisir leur avocat et de bénéficier du droit légitime à la défense et à un procès équitable et impartial, ainsi qu'au droit au pourvoi d'appel.

- Les procès sont généralement organisés à Téhéran, dans la 3ème chambre du Tribunal de la révolution, dont les juges sont à 100 % subordonnés au pouvoir et n'ont jamais été impartiaux. Ce que l'on nomme un tribunal dans la république islamique est en réalité la forme aboutie de despotisme. Dans ces prétendus tribunaux, l'accusé se trouve solitaire et isolé, sans aucune défense ni de soutient, encerclée d'ennemis jurés, tous des affidés du pouvoir. Le prisonnier se voit ainsi assailli par: le président du tribunal, généralement inféodé au ministère des renseignements, le représentant du procureur, les interrogateurs du ministère des Renseignements ou des Pasdaran, le greffier du tribunal, parfois un avocat imposé etc.

- Alors que le prisonnier est soumis à une pression énorme pour lui arracher des aveux avec une rapidité déconcertante, celui-ci et son avocat n'ont même pas le droit d'accéder au dossier pour se préparer au procès. Le prisonnier doit se présenter devant le tribunal sans être renseigné du contenu de son dossier fabriqué, et s'il a la chance de pouvoir se défendre, il n'aura que deux à cinq minutes pour sa plaidoirie. Par ailleurs, nous savons que les jugements sont déterminés d'avance et avant même d'avoir entendu la plaidoirie du prisonnier (…) Le dossier est ensuite envoyé à la chambre 36 ou 54 de la cour d'appel, où les jugements sont généralement confirmés tels quels. La plupart du temps ils ne sont même pas communiqués au prisonnier (…)

Nous les prisonniers politiques et d'opinion déclarons avec certitude:

Nous n'avons commis aucune faute ou délit. Si le pouvoir de la République islamique prétend avoir respecté les normes juridiques et légales dans les procédures nous concernant, pour le prouver, nous lui demandons de diffuser sur sa chaîne de télévision ne serait-ce qu'un exemple des procès auxquels nous avons été soumis, pour que l'opinion publique nationale et internationale puisse porter son propre jugement et identifier le vrai coupable. Pour que les responsables de toutes ces violations de droits et de justice puissent être poursuivis et condamnés, et que puissent être réhabilités les prisonniers politiques et d'opinion.

Une partie des signatures de 46 prisonniers politiques  de la prison Rajaï-Chahr:
Hassan Ashtiani - Jamaleddin Khanjani - Mohammad Amirkhizi - Foad Khanjani - Davood Izadi - Keyvan Rahimian - Rasoul Badaghi - Saed Rezai - Hamid reza Borhani - Shahrokh Zamani- Aref Pishevarz - Koroush Ziari - Vahid Tizfahm -  Ramin Zibaii - Farahmand Snaii -Riyazollah Sahabi - Iraj Hatami - Mohammad Seyfzadeh - Mashallah Hayeri - Syamak Sadri - Khaled Hardani- Farhad Sedghi- Afshin Heyratian - Shahroukh Taef  - Heshmatollah Tabarzadi - Saed Abedini - Mohammad Mehdi Abyat  - Naseh Yousefi  - Shahin Neghari - Afif Naimi - Adel Naimi  - Shamim Naimi - Riyaollah Sobhani  - Behroz Azizi Tavakoli - Farhad Farahmand - Foad Fahdezh - Kamal Kashani  - Saleh K. - Mohammad ali Mansouri - Mohmmad Nazari  - Shahram Chinian

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