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samedi 2 septembre 2017

La rapporteuse spéciale des droits humains en Iran de l’ONU fait état du massacre de 1988 dans les prisons

 Dans son rapport sur la situation des droits humains en Iran daté du 14 aout et qui couvre un large éventail de violations des droits – des exécutions jusqu’aux droits des femmes en passant par ceux des minorités – Asma Jahangir, rapporteuse spéciale de l’ONU pour l’Iran accorde une large place au massacre des prisonniers politiques en Iran durant l’été 1988 et de ses incidences sur les familles des victimes.
Au paragraphe 11, parlant de l’élection présidentielle et d’un candidat, elle note que « l’un d’eux était M. Ebrahim Raisi, qui, selon certaines informations, aurait siégé dans un comité qui avait ordonné l’exécution extrajudiciaire de milliers de prisonniers politiques en 1988. »

Abordant le vif du sujet, « 70. Au cours de la période considérée, la Rapporteuse spéciale a continué de recevoir des informations sur le harcèlement, l’intimidation et les poursuites dont font l’objet les défenseurs des droits de l’homme qui réclament la vérité et la justice au nom de personnes qui auraient été exécutées sommairement ou feraient partie des cas de disparitions forcées dans les années 1980.
71. En mars, des familles venues se recueillir devant un emplacement d’inhumation collective dans la ville de Machhad, dans la province de KhorassanRazavi, où seraient enterrés jusqu’à 170 prisonniers politiques, auraient découvert que le site, auparavant plane, avait été recouvert de terre formant un monticule audessus du charnier. À la mi-mai, des bulldozers auraient été aperçus, en pleine action, sur un chantier de construction jouxtant la fosse commune d’Ahvaz, située sur une parcelle de terre stérile à trois kilomètres à l’est du cimetière de Behecht Abad, où se trouveraient les restes d’au moins 44 personnes tuées à l’été 1988. Il serait prévu de détruire le bloc de béton indiquant la présence du charnier et de construire un « espace vert » ou une zone commerciale à cet endroit.
72. Dans son premier rapport adressé au Conseil des droits de l’homme, la Rapporteuse spéciale a évoqué le cas de Mme Maryam Akbari Monfared qui avait été privée de soins médicaux et menacée de perdre son droit de visite pour avoir rendue publique une lettre demandant l’ouverture d’une enquête sur les exécutions de 1988. En mai, le mari de Mme Monfared a été convoqué par le Ministère du renseignement et de la sécurité pour un interrogatoire, au cours duquel il lui a été signifié que son épouse risquait d’être condamnée à trois ans de prison supplémentaires et à l’exil dans un établissement carcéral de la lointaine province du Sistan va Baloutchistan si elle continuait d’écrire des lettres ouvertes sur les événements de 1988.
73. Au cours des mois de juillet et août 1988, des milliers de prisonniers politiques, d’hommes, de femmes et d’adolescents auraient été exécutés à la suite d’une fatwa émise par le Guide suprême, l’Ayatollah Khomeini. Une commission composée de trois hommes aurait été créée pour dresser la liste des personnes à exécuter. Les corps des victimes auraient été enterrés dans des tombes anonymes et leurs familles n’ont jamais été informées de ce qu’il leur était arrivé. Ces événements, connus sous le nom de « massacres de 1988 », n’ont jamais été officiellement reconnus. En janvier 1989, le Représentant spécial de la Commission des droits de l’homme chargé d’examiner la situation des droits de l’homme en République islamique d’Iran, Reynaldo Galindo Pohl, s’était dit préoccupé par le « déni global » de ces exécutions et avait appelé les autorités iraniennes à mener une enquête. Cette enquête n’a toujours pas démarré.
74. En août 2016, un enregistrement audio d’une réunion entre de hauts fonctionnaires de l’État et des dignitaires religieux en 1988 a été rendu public. Il révèle les noms des responsables qui ont ordonné les exécutions et les ont justifiées; en font notamment partie l’actuel Ministre de la Justice, un juge de la Haute Cour de Justice toujours en fonction et le directeur de l’une des principales institutions religieuses du pays, qui était également candidat aux élections présidentielles tenues au mois de mai. Après la diffusion publique de l’enregistrement audio, certains dignitaires religieux et le chef de la magistrature ont admis que des exécutions avaient eu lieu et en ont parfois défendu le bien-fondé. »
Elle conclut en disant au paragraphe 109 : « 109. De multiples rapports ont été publiés au fil des ans sur les massacres de 1998. Si le nombre de personnes qui ont disparu et ont été exécutées peut être contesté, il est amplement démontré que des milliers de personnes ont été sommairement tuées. Dernièrement, certaines personnes évoluant dans les plus hautes sphères de l’État ont reconnu l’existence de ces assassinats. Les familles des victimes ont le droit de connaître la vérité au sujet de ces événements et du sort de leurs proches sans craindre de représailles. Elles ont le droit d’intenter une action en justice, ce qui englobe notamment le droit à des investigations efficaces pour établir les faits et à la divulgation de la vérité, et le droit à réparation. Aussi la Rapporteuse spéciale demande-t-elle au Gouvernement de veiller à ce qu’une enquête approfondie et indépendante soit menée sur ces événements. »

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