Avec une capacité de détention de 15 000 personnes, la prison d’Evine en Iran a acquis une réputation de répression politique endémique en Iran.
Située au pied des montagnes Alborz, dans le nord-ouest de Téhéran, elle a accueilli des centaines de militants pacifiques, de journalistes, d’intellectuels et de défenseurs des droits humains tout au long de sa scandaleuse histoire.
La structure des quartiers de prison
La prison d'Evine est un vaste complexe constitué de plusieurs bâtiments, généralement d'une hauteur maximale de trois étages et comportant deux quartiers par étage.
Les quartiers 209, 240 et 241, dotés de cellules isolées appelées « suites », sont contrôlés par le ministère du renseignement (MOIS).
Le quartier 209, ou section 209, est le plus redoutable de la prison d’Evine. Les prisonniers sont détenus sous la torture. Le quartier est composé de 10 rangées contenant chacune huit cellules d’isolement. En raison de la surpopulation, jusqu'à 10 personnes sont entassées dans chaque cellule. Chaque cellule possède son propre lavabo.
La chambre de torture est située dans le sous-sol du quartier où se trouvent toutes sortes d'équipements médiévaux pour la torture, y compris Apolo (un lit spécial pour donner des décharges électriques au prisonnier alors que sa tête est recouverte d'un casque de fer dans lequel ses cris résonnent dans ses propres oreilles), des lits câblés pour la flagellation avec des câbles, cintres sur lesquels les prisonniers sont pendus au plafond, par le pied ou des mains, attachées derrière le dos.
Personne, à l'exception du personnel et des condamnés, n'est autorisé à pénétrer dans le quartier 209 du ministère du renseignement, même les plus hauts responsables.
Le quartier 240 (dont certaines parties sont sous le contrôle des unités de la sécurité et du renseignement), possède plusieurs étages et chaque étage a un long couloir contenant plusieurs cellules des deux côtés. Chaque cellule mesure environ 8 mètres carrés et les toilettes et la douche sont séparés par un rideau de la cellule. Ces cellules sont conçues pour une seule personne, mais elles contiennent en réalité 6 à 7 prisonniers.
Le quartier 2A est sous le contrôle du service du renseignement des pasdarans.
Les prisonniers politiques ont les yeux bandés lorsqu'ils se trouvent en dehors de leur cellule dans cette section.
Le centre de détention 66 ou la section 325 de l'IRGC est sous le contrôle des pasdarans. Cette section a été utilisée pour interroger les personnes arrêtées lors des troubles de 2009 à Téhéran.
La section 350 était utilisée pour la détention de prisonniers politiques mais elle a été partiellement fermée après une émeute dans la prison en 2014, suite à quoi, tous les prisonniers ont été transférés à la prison Rajaï Chahr de Karaj, la quatrième ville d'Iran.
Le service de traitement à la méthadone : Il existe un hall, en réalité une grande cellule, qui est toujours fermé. Les prisonniers l'appellent la salle de traitement à la méthadone. Des caméras à circuit fermé sont installées dans cette cellule pour surveiller les détenus 24H/24, les privant ainsi d'un minimum de liberté d'action dans l'espace restreint de la cellule.
Les prisonniers sont privés de pause et doivent passer toute la journée dans ce hall fermé à clef. La porte ne s'ouvre que lorsque la nourriture est distribuée.
Le quartier des femmes est composé de trois salles dont toutes les fenêtres sont scellées. Il n’y a donc pas assez de lumière naturelle pour que les prisonnières, ce qui aggrave leur maladie. Les salles de bain et la cuisine manquent de ventilation.
Il n'y a pas de centre médical d'urgence pour les prisonniers. Pour avoir ses médicaments, une détenue doit d'abord obtenir une autorisation, puis attendre le jour de la visite le dimanche pour donner l'ordonnance à sa famille et lui permettre d'acheter ses médicaments auprès d'une pharmacie extérieure. Ensuite, elle devra attendre la prochaine visite pour que ses proches puissent lui donner ses médicaments.
Se référer à un centre médical en dehors de la prison est extrêmement difficile et peut prendre plusieurs mois avant de recevoir une autorisation.
Au moment où la détenue obtient un congé de maladie, généralement après 9 à 12 mois, sa maladie a progressé. Une fois à l'hôpital, son traitement est généralement interrompu à mi-parcours.
Chaque entrée et sortie de la prison nécessite une fouille humiliante. Une prisonnière doit être menottée quand elle entre dans le dispensaire.
Le quartier des femmes est surveillé en permanence par des caméras.
Chaque fois que les gardiens de prison rencontrent une manifestation ou une forme de résistance de la part des prisonnières, ils menacent de les transférer dans la tristement célèbre prison de Qarchak.
Le quartier 7 abritent principalement des prisonniers reconnus coupables de crimes financiers. Le quartier dispose de huit salles pouvant accueillir chacune, 200 détenus, mais 700 prisonniers sont actuellement détenus dans chaque salle.
Parfois, des prisonniers politiques sont emmenés dans le quartier 7, ce qui constitue une violation des règles iraniennes relatives au principe de la séparation des crimes.
Les halls 1 et 12 du quartier 7 sont situés au sous-sol. Beaucoup de prisonniers dans ces halls souffrent de maladies articulaires dues à l'humidité. Les prisonniers sont généralement privés d'eau chaude pour se doucher durant l’hiver.
Les problèmes les plus courants sont notamment la saleté et l’inadaptation des équipement sanitaires, la prévalence des maladies contagieuses, le manque de soleil.
Le quartier 8 est constitué principalement de personnes reconnues coupables de crimes financiers, de trafiquants de drogue et de pirates - principalement de Somalie.
En été, la section 8 de la prison d'Evine pue plus que d'habitude. Il fait chaud et l’odeur est insupportable car il n’y a pas de climatiseur et les fontaines à eau ne fonctionnent pas correctement. Les cellules sont sales et infestées de scarabées et de punaises, en particulier lorsque la température augmente.
Inspections et menaces
Jusqu'à 50 agents pénitentiaires fouillent périodiquement les cellules des prisonniers. Tous les prisonniers sont tenus de se rendre dans la cour de la prison pendant la fouille. Les agents confisquent et « volent » les affaires des prisonniers lors de la perquisition.
Après chaque inspection, de nombreuses affaires appartenant aux prisonniers disparaissent et une grande partie de leur nourriture est saccagée.
Les autorités pénitentiaires vendent de diverses manières des téléphones d'occasion et des cartes SIM à des prix élevés aux prisonniers et confisquent les mêmes téléphones et cartes SIM lors des inspections.
Les prisonniers politiques décrivent avoir été sévèrement battus par des prisonniers dangereux incités par des responsables de la prison. Ils utilisent ces criminels comme couverture pour harceler les prisonniers politiques et les prisonniers d'opinion.
Visites en prison
Il n’existe aucun critère ou norme concernant les droits de visite des prisonniers dans la notoire prison d’Evine. Les visites de la famille et les appels téléphoniques sont des outils utilisés par les autorités pénitentiaires pour exercer davantage de pression sur les prisonniers.
Les prisonniers politiques et les prisonniers d'opinion régulièrement harcelés par les autorités n’ont droit qu’à des visites extrêmement limitées.
Parfois, les visites et les appels téléphoniques sont interdits pour punir les prisonniers. Les prisonniers politiques sont punis lorsqu'ils protestent contre un comportement arbitraire et un traitement inhumain de la part des pasdarans ou lorsqu'ils transmettent à leur famille des détails sur les conditions de détention. Si une prisonnière envoie une lettre en dehors de la prison, elle est sévèrement punie. Les peines vont du refus de visites et d'appels téléphoniques à l'emprisonnement dans des cellules isolées, en passant par la fabrication de nouvelles accusations et, dans certains cas, par son envoi en exil interne.
Le hall de visite de la prison d’Evine compte environ 80 cabines spécialement conçues pour les visites. Ce nombre de cabines est suffisant pour que les familles des prisonniers politiques puissent effectuer rapidement leur visite. Cependant, les autorités pénitentiaires ont pour politique d’envoyer les visiteurs par groupes de dix personnes à la fois.
Les prisonniers ne peuvent communiquer avec les membres de leur famille proche que pendant 20 minutes via une rencontre en cabine. Une rencontre de cabine est une visite à travers une fenêtre sale et floue et à travers un micro-casque contrôlé par les autorités pénitentiaires.
Le quartier des femmes n’a pas de téléphone pour que les prisonnièress politiques puissent téléphoner à leur famille et à leurs enfants.
Les détenues politiques ne bénéficient que de visites d’une durée de 20 minutes (le plus souvent en cabine) par semaine avec leur famille.
Certaines des prisonnières politiques ont de jeunes enfants avec lesquels elles ne sont en contact que par téléphone. Certains psychologues pensent que les visites en cabine depuis derrière un mur de verre peuvent être destructrices pour la santé psychologique des enfants des prisonniers. Par conséquent, beaucoup de familles essaient, autant que possible, de ne pas amener les enfants.
Pour en lire davantage : https://iran-hrm.com/index.php/2018/10/28/a-glimpse-of-evin-prison-irans-most-notorious-jail/
Source : Les Droits de l’homme en Iran
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