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vendredi 9 novembre 2018

Déclaration d'Amnesty International sur les centaines de personnes arrêtées lors d’un vaste coup de filet contre les Arabes ahwazis en Iran


amnesty international iranAmnesty international, le 2 novembre 2018 - Les autorités iraniennes ont pris de vastes mesures de répression contre la minorité ethnique arabe ahwazi, arrêtant des centaines de personnes dans la province du Khuzestan, dans le sud de l'Iran, ces dernières semaines, a déclaré Amnesty International.

Cette vague d’arrestations fait suite à une attaque armée meurtrière perpétrée contre un défilé militaire dans la ville d’Ahvaz le mois dernier, au cours de laquelle au moins 24 personnes, dont des spectateurs, ont été tuées et plus de 60 blessées.
« L'ampleur des arrestations de ces dernières semaines est extrêmement alarmante. Le moment où elles interviennent laisse à penser que les autorités iraniennes utilisent l’attentat d'Ahvaz comme prétexte pour s’en prendre aux membres de la minorité ethnique arabe ahwazi, notamment à des membres de la société civile et à des militants politiques, afin d'écraser la dissidence dans la province du Khuzestan », a déclaré Philip Luther, directeur de la recherche et du plaidoyer pour le Moyen-Orient et l’Afrique du Nord à Amnesty International.
« Toutes les personnes soupçonnées de responsabilité pénale dans le terrible attentat perpétré à Ahvaz doivent être traduites en justice dans le cadre de procès équitables, mais ce n’est pas en procédant à des arrestations arbitraires que l’on rendra justice aux victimes. »
Le moment où elles interviennent laisse à penser que les autorités iraniennes utilisent l’attentat d'Ahvaz comme prétexte pour s’en prendre aux membres de la minorité ethnique arabe ahwazi, notamment à des membres de la société civile et à des militants politiques, afin d'écraser la dissidence dans la province du Khuzestan.
À ce jour, Amnesty International a reçu de militants arabes ahwazis en dehors de l'Iran le nom de 178 personnes arrêtées. Ce chiffre pourrait être très en deça de la réalité, car d’après certains militants en dehors du pays, pas moins de 600 personnes ont été arrêtées. Selon certaines informations, les arrestations se poursuivent et sont presque quotidiennes.
Parmi les personnes appréhendées figurent des militants politiques et des défenseurs des droits des minorités. Les arrestations ont eu lieu dans des villes et villages de la province du Khuzestan, notamment à Ahvaz, Hamidiyeh, Khorramshahr (appelée Mohammareh par les Arabes ahwazis) et Shush.
Ces arrestations de grande ampleur ont créé un climat de peur au sein de la communauté arabe ahwazi, qui faisait déjà l’objet de persécutions et de discriminations en Iran.
« Les antécédents consternants de l’Iran en matière de persécutions et de discriminations à l’encontre des membres de la communauté arabe ahwazi laissent à penser que ces arrestations ont un caractère arbitraire et sont motivées par des considérations politiques », a déclaré Philip Luther.
« Amnesty International appelle les autorités iraniennes à libérer immédiatement et sans condition toute personne détenue uniquement pour avoir exercé pacifiquement son droit à la liberté d'expression, d'association ou de réunion pacifique, ou uniquement en raison de son identité ethnique. »
Amnesty International a reçu des informations selon lesquelles des agents du ministère du Renseignement avaient procédé aux arrestations, accompagnés soit de la police ordinaire, soit de la police anti-émeute.
Les antécédents consternants de l’Iran en matière de persécutions et de discriminations à l’encontre des membres de la communauté arabe ahwazi laissent à penser que ces arrestations ont un caractère arbitraire et sont motivées par des considérations politiques.
Ils n'ont ni présenté de mandat d'arrêt, ni informé les intéressés du motif de leur arrestation. La plupart des personnes appréhendées sont détenues au secret, sans pouvoir consulter un avocat ni entrer en contact avec leurs proches, dans des conditions qui s’apparentent à des disparitions forcées ; elles courent un risque élevé de subir des actes de torture et d'autres formes de mauvais traitements.
Le gouverneur de la province du Khuzestan, Gholamreza Shariati, a affirmé qu’aucun militant de la société civile n’avait été arrêté, mais Amnesty International a reçu des informations dignes de foi selon lesquelles des étudiants, des écrivains, des membres de la société civile, des défenseurs des droits des minorités et des militants politiques faisaient partie des personnes appréhendées à leur domicile, sur leur lieu de travail ou dans la rue.
Sahba (Lamya) Hammadi, une militante de la société civile qui est enceinte, est au nombre des personnes arrêtées. Elle a été appréhendée le 6 octobre à son domicile dans la ville de Susangerd (appelée Khafajiyeh par les Arabes ahwazis), dans la province du Khuzestan. Elle a pris contact avec sa famille le jour de son arrestation, mais ses proches n’ont aucune nouvelle depuis lors.
Zoudieh Afrawi et Gheysieh Afrawi, deux femmes de Susangerd, ont été arrêtées séparément à leurs domiciles respectifs le 22 octobre. Les enfants des deux femmes avaient été appréhendés plus tôt dans la journée. Les forces de sécurité sont revenues chez elles plus tard le jour même et les ont arrêtées à leur tour. Elles ont toutes deux téléphoné à leur famille une semaine après leur arrestation et lui ont dit qu'elles étaient détenues par le ministère du Renseignement. Depuis lors, leurs proches n'ont reçu aucune nouvelle.
Mohammad Momeni Timas, militant de la société civile, a été arrêté le 30 septembre. Il s'était rendu au tribunal révolutionnaire d'Ahvaz pour s'enquérir de ce qu'il était advenu de deux de ses enfants, qui avaient été arrêtés, et a alors été lui-même appréhendé. Sa famille est sans nouvelles de lui depuis lors.

Complément d’information
Les Arabes ahwazis, en Iran, subissent des discriminations et des restrictions arbitraires en ce qui concerne l’accès à l'éducation, à l'emploi et à un logement convenable, ainsi que l’exercice de leurs droits culturels et linguistiques. Ils ont exprimé à maintes reprises leur inquiétude face à l’impossibilité d’apprendre, promouvoir et utiliser leur propre langue, en privé et en public, librement et sans ingérence ni discrimination.
L’attentat perpétré à Ahvaz le 22 septembre visait un défilé militaire organisé à l’occasion du 38e anniversaire de la guerre Iran-Irak. Les autorités iraniennes ont annoncé que les quatre assaillants armés, déguisés en pasdaran (gardiens de la révolution) et en bassidjis (miliciens volontaires), avaient été abattus par les forces de sécurité pendant l'attaque. Au cours des jours qui ont suivi, le ministère iranien du Renseignement a annoncé l’arrestation de 22 suspects, et la chaîne de télévision publique Press TV a diffusé une vidéo dans laquelle apparaissaient certains des suspects, menottés et les yeux bandés, face à un mur.
Depuis lors, plusieurs groupes ont revendiqué l'attentat, notamment la Résistance nationale d’Ahvaz, qui se décrit comme une entité composée de plusieurs groupes séparatistes ahwazis, et le groupe armé autoproclamé État islamique.

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