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lundi 20 mai 2019

L'agent de Téhéran « m’a montré son arme et m’a dit qu'il pouvait me tirer dessus sur le champ »


The Times - Ervin était assis dans un fastfood quand ses bourreaux l'ont rattrapé. « J'ai senti une main autour du cou », se souvient le dissident iranien. « Puis deux hommes sont venus s’asseoir à côté de moi. L'homme qui se tenait derrière moi a commencé à me menacer. Il m'a dit qu'ils savaient tout de mes activités politiques et que les conséquences seraient très graves si je n'arrêtais pas.

« Quand j'ai essayé de repousser son bras, j'ai senti quelque chose s'enfoncer dans la base de ma colonne vertébrale. J'ai regardé autour de moi et j'ai vu qu'il avait une arme de poing avec un silencieux. Il m'a dit que si je faisais un geste violent, il me tirerait dessus, ici et là. »
Ervin n'était pas à Téhéran. Il était au cœur de la plus grande ville d'Écosse.
Ce qui est certain, c'est que les manifestations bruyantes contre le régime, qui avaient lieu toute l'année dans la ville, ont cessé. Ervin affirme qu'il a été approché quelques jours après avoir été filmé en train de manifester devant le Centre islamique chiite Asna Ashri (SAAIC), que les exilés considèrent comme le consulat de facto de l'Iran en Écosse.
« Les hommes m'ont dit qu'ils me donneraient beaucoup d'argent si j'acceptais de travailler avec eux », a-t-il confié. « Ils m'ont ensuite dit où mes parents et mon frère et ma sœur étaient allés ces derniers jours. Ils savaient que j'étais membre d'un parti de l'opposition et que si j'acceptais de leur donner des renseignements et des noms, ils s'assureraient que ma famille et moi serions en sécurité et que nous n'aurions plus jamais à nous soucier de nos difficultés financières. »
Après avoir demandé du temps pour étudier leur offre, il a exhorté ses proches en Iran à fuir au Kurdistan irakien, puis a dit aux hommes, lorsqu'ils l'ont de nouveau approché quelques semaines plus tard, qu'il cesserait ses activités politiques mais n'espionnerait pas pour eux. « Ils m'ont insulté et menacé, mais ils m'ont finalement laissé partir. »
Bashir, un étudiant, affirme qu'après avoir participé à des manifestations en faveur de la démocratie à Glasgow et devant l'ambassade d'Iran à Londres, son père avait été arrêté en Iran. « Un jour après la fin des cours, j'étais assis à George Square quand deux hommes sont venus s'asseoir à côté de moi », raconte-il. « Ils étaient élégamment habillés et portaient la barbe. Ils m'ont regardé et le plus grand m'a dit en persan : "Veux-tu que nous rendions le corps de ton père à ta famille ? Tu dois cesser tes activités politiques tout de suite." Le grand type a ouvert sa veste, m’a montré un pistolet et m’a dit : "On pourrait te tuer tout de suite si on le voulait." »
Terrifié, Bachir a accepté immédiatement de faire ce que les hommes lui demandaient. « Depuis que j'ai été menacé, je ne sors plus beaucoup, mais quand je sors, j'ai peur que d’être suivi », dit-il. « Il y avait des manifestations régulières, mais maintenant il n'y a plus rien. Nous vivons dans la peur. »
Mike Kurtyka, qui dirige le Cénacle, une église de Glasgow pour les chrétiens iraniens, y compris les demandeurs d'asile, a déclaré qu'on lui avait fait part d’inquiétudes concernant la surveillance et des menaces. « Les gens disent qu'ils ne font même pas confiance aux interprètes du ministère de l'Intérieur, parce qu'ils pensent que ce sont des espions. »
La plupart des victimes ont trop peur d'être nommées, mais Jamshid Mahmoudi et Bijan Karimi croient que parler en public leur donnera plus de sécurité. « Il n'y a rien que le régime ne sache déjà sur nous », a expliqué M. Mahmoudi.
Les amis affirment qu'ils ont été approchés dans un restaurant en décembre dernier par deux hommes qui leur ont ordonné de cesser leurs activités politiques. M. Mahmoudi a dit : « Quand ils nous ont menacés, je leur ai demandé qui ils étaient et je leur ai dit : "On n'est pas en Iran. Je vais appeler la police. Un des hommes a ri et a dit : "Nous savons exactement où est ta famille et ce qu'elle fait. " Il a ensuite ouvert sa veste et nous a montré qu'il avait une arme. »
Karimi a dit : « Ils avaient une liste de noms et voulaient savoir où étaient ces gens. Après nous avoir montré l'arme, j'ai eu si peur que je n’arrivais plus à parler. Finalement, nous sommes partis et nous avons continué à regarder derrière nous, mais ils ne nous ont pas suivis. »
Mahmoudi a décrit sa peur constante. « Nous pensions être en sécurité ici, mais la ville est toute petite maintenant. »
Hamid Bahrami, ancien prisonnier politique et étudiant en journalisme à Glasgow, a déclaré : « J'ai reçu des messages de menaces à mon retour d'un rassemblement organisé par l'opposition iranienne à Paris en février. »
La police écossaise a confirmé qu'elle avait fourni « assistance et conseils » à M. Bahrami après qu'il eut signalé les menaces.
D'autres dissidents disent avoir trop peur des représailles pour aller voir les autorités. Raman Ghavami, un analyste du Moyen-Orient basé en Écosse, a déclaré : « Depuis janvier 2018, aucune manifestation n'a eu lieu. Ces menaces des services de sécurité iraniens ont eu un effet significatif. »
Javad, un traducteur qui a travaillé avec des demandeurs d'asile iraniens à Glasgow, affirme qu'on l'a fait chanter pour qu'il remette des informations confidentielles en 2016 après que sa famille ait été arrêtée par les autorités en Iran. Lui aussi affirme avoir été approché dans un restaurant.
« Ils m'ont dit que ma famille serait en sécurité et protégée si je les aidais. Je devais leur fournir des rapports hebdomadaires sur les Iraniens qui avaient demandé l'asile au Royaume-Uni. Au bout d'un moment, parce que je leur ai donné ce qu'ils voulaient, ils ont libéré ma famille. Mon cousin a trouvé un passeur pour les emmener en Turquie. Une fois sûr qu'ils étaient en sécurité, j'ai cessé de coopérer et j'ai quitté le Royaume-Uni, mais j'ai souffert d'une grave dépression.
« Ces gens ne peuvent pas continuer à intimider et ruiner d'autres vies. Glasgow devrait être une ville sûre dans un pays pacifique et démocratique. »

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