Pages

vendredi 1 janvier 2021

Iran: le massacre de 30000 prisonniers politiques en 1988

À l’été 1988, le régime iranien a exécuté sommairement des dizaines de milliers de prisonniers politiques détenus dans des prisons à travers l’Iran. Le massacre a été perpétré sur la base d’une fatwa édictée par le sinistre Rouhollah Khomeini.

Ce rapport est un extrait de la deuxième édition d’un ouvrage intitulé «Un crime contre l’humanité». Le livre a été publié en août 2017 par l’Organisation des Moudjahidine du peuple d’Iran (OMPI-MEK). Il contient notamment de nouveaux événements concernant le drame de 1988 et comprend les sujets suivants:

Un crime contre l’humanité
Histoire et contexte du massacre de 1988
Comment le massacre de 1988 a commencé
Principaux événements du drame des prisonniers politiques en 1988
La tuerie s’est poursuivie jusqu’au début de 1989
Les noms de 5049 membres de l’OMPI assassinés
La hiérarchie responsable du massacre de 1988
Les Commissions de de la mort
Des déclarations officielles confirmant les exécutions
Des fosses communes identifiées dans 36 villes d’Iran
Photographies et mémoires
Des documents complémentaires
Condamnation internationale du massacre de 1988

Un crime contre l’humanité
Dans les derniers jours de juillet 1988, un massacre a été orchestré dans les prisons politiques d’Iran. Le bain de sang a été lancé sur la base d’un décret sans date (fatwa) avec le cachet et la signature de Khomeiny, guide suprême et fondateur de la République islamique des mollahs. En 236 mots, il a signé la condamnation à mort de tous les prisonniers affiliés au principal mouvement d’opposition iranien, l’Organisation des Moudjahidine du peuple d’Iran (OMPI / MEK):
«Ceux qui sont emprisonnés dans tout le pays et qui restent inébranlables dans leur soutien à [l’OMPI / MEK] font la guerre à Dieu et sont donc condamnés à l’exécution…»

Khomeiny a confié le sort de ces prisonniers déjà condamnés à des peines spécifiques, à trois individus qui constitué la «commission de la mort» à Téhéran, et à des commissions similaires dans les chefs-lieux provinciaux. Il a exigé que «ceux qui prennent les décisions ne doivent faire preuve d’aucune mansuétude, être pleins de« colère et de haine » et « ne pas hésiter » à procéder aux exécutions.

Dans un échange de questions-réponses très court qui ne durait que quelques minutes, les commissions de la mort ont d’abord demandé à chaque détenu de déclarer son affiliation politique. S’ils mentionnaient le nom Mojahed (OMPI), leur sort était scellé et aucune autre question n’était posée. Cependant, si le détenu utilisait le terme «Monafeq», qui signifie «hypocrite», le terme péjoratif utilisé par Khomeiny pour désigner l’OMPI, il était renvoyé à sa cellule.

Ces entretiens précipités ont déterminé les décision des commissions de la mort pour savoir si le prisonnier restait fidèle à l’OMPI et s’il serait exécuté ou non. Tous les personnes qui n’ont pas accepter de renier leur convictions, ont été exécutés. Exécuté à la hâte dans les semaines de l’été 1988, ce processus a essentiellement vidé les prisons des prisonniers affiliés à l’OMPI.

L’héritier de Khomeiny proteste contre la précipitation des exécutions des prisonniers lors du massacre de 1988
Le 9 août 2016, des proches de Hossein-Ali Montazeri, l’ancien héritier de Khomeiny, ont publié une cassette audio choquante dans laquelle on peut entendre Montazeri affirmer à une réunion de membres de la « commissions de la mort» à Téhéran il y a 28 ans (Le 15 août 1988) qu’ils sont coupable de commettre un crime atroce. L’enregistrement de Montazeri a révélé de nouvelles informations sur la portée et l’ampleur du massacre de prisonniers politiques à l’époque. Il a provoqué une onde de choc en Iran et en particulier parmi les responsables du régime qui avaient tenté pendant plus de deux décennies d’imposer un silence absolu sur le massacre.

Dans la bande audio, Hossein-Ali Montazeri, qui a par la suite été démis de ses fonctions de successeur de Khomeiny, pour ses prises d’opposition contre la dérive meurtrière de Khomeiny, a déclaré aux membres de la «commission de la mort», Hossein-Ali Nayyeri, juge de la charia du régime, Morteza Eshraqi, procureur, Ebrahim Raeesi, procureur adjoint, et Mostafa Pourmohammadi, représentant du ministère du Renseignement (MOIS ou VEVAK) :
«Le plus grand crime commis sous la République islamique et pour lequel l’histoire nous condamnera, a été commis par vous. Vos noms seront à l’avenir gravés dans les annales de l’histoire en tant que criminels (…) Exécuter ces personnes alors qu’il n’y a pas eu de nouvelles activités (de leur part) signifie que… l’ensemble du système judiciaire a été en faute.

Khomeiny a exigé une conformité totale à ses décisions de la part des responsables

Tous les responsables du régime de l’époque devaient se conformer pleinement à l’ordre du massacre, sinon ils risquaient d’être limogés. L’ayatollah Montazeri, qui a protesté contre la tuerie, est tombé en disgrâce et a été limogé par Khomeiny en mars 1989. Les mémoires de Montazeri publiés en décembre 2000 ont révélé l’ampleur horrible du massacre. Ce qui a donné du poids aux révélations, c’est qu’elles ont été faites par un homme qui était au moment des exécutions le successeur officiel de Khomeiny et la deuxième plus haute autorité du régime. Pourtant, lorsqu’il s’agissait de massacrer des prisonniers politiques, Khomeiny n’a montré aucune indulgence pour la moindre opposition, même de la part de Montazeri.

Les vagues de carnage
Le carnage peut être séparé en plusieurs vagues distinctes. Premièrement, les exécutions massives d’OMPI à la prison d’Evine à Téhéran et à la prison de Gohardasht, située à la périphérie de Karaj, à 40 km de la capitale. Ceux-ci sont considérés comme le cœur du massacre en termes politiques, dans la mesure où, pour diverses raisons, y compris leur emplacement permettant à la société iranienne d’en savoir plus sur les événements que dans d’autres prisons, cette vague de meurtres est la mieux documentée avec des informations et des témoignages.

Deuxièmement, les exécutions qui ont eu lieu simultanément dans les prisons politiques d’au moins 100 autres villes, dans le cadre de la purge politiques dans tout le pays. Des informations restent à être réunies d’un nombre considérable de ces prisons.

Troisièmement, les exécutions d’anciens prisonniers politiques, qui avaient auparavant été libérés et n’étaient pas en prison lors du verdict de Khomeiny, ont été de nouveau arrêtés et immédiatement envoyés à la potence.

Quatrièmement, les exécutions des prisonniers marxistes, tués sur la base de la fatwa de Khomeiny ou d’un autre décret auquel nous n’avons toujours pas accès. Les prisonniers marxistes ont été convoqués pour des entretiens vers la fin août 1988. Cette fois, chaque prisonnier a été interrogé sur ses convictions.

Cinquièmement, les exécutions visant des personnes qui ne purgeaient pas de peine de prison, qui avaient été arrêtées pour leurs efforts pour aider l’opposition. Après quelques jours d’incarcération, ils ont été exécutés sur ordre de tribunaux expéditifs.

Les rapports et les éléments de preuve confirment que les tueries se sont poursuivies jusqu’aux premiers mois de 1989. Parmi les dernières victimes figuraient certains des prisonniers dont l’appartenance politique n’avait pas été déterminée, mais qui ont été tués sur ordre ultérieur de Khomeiny aux commissions de la mort.

Ce massacre a été condamné comme crime contre l’humanité par les défenseurs des droits de l’homme et les ONG du monde entier. C’est l’un des événements les plus importants sous le règne de Khomeiny et a eu un effet durable et profond sur les relations du régime et de la société iranienne.

Ce rapport détaille ce qui s’est passé et qui en était responsable, révélant des preuves irréfutables de la nature totalitaire du régime. Les dirigeants «extrémistes» ou soi-disant «réformistes» ont tous trempés directement dans le massacre ou ont admis en avoir eu connaissance. En fait, au fil du temps, les responsables du massacre ont obtenu des positions de plus en plus élevées dans la hiérarchie politique.

L’un des exemples les plus odieux est celui d’Ibrahim Ra’issi, un membre de la commission de la mort à Téhéran. En 2015, Khamenei l’a nommé Directeur de la Fondation Astan-e Quds Razavi, une institution de plusieurs milliards de dollars qui administre le mausolée de l’imam Reza à Machhad. Cette nomination l’a promu à un clerc parmi les plus élevés de la théocratie au pouvoir. Un an plus tard, à nouveau sur ordre de Khamenei et avec le plein soutien du Corps des gardiens de la révolution, il a été nommé candidat à la Présidence, et plus tard, il a été nommé par Khamenei à la tête du pouvoir judiciaire du régime.

D’autres membres des commissions de la mort occupent également des postes clés dans le système

L’actuel ministre de la Justice du gouvernement d’Hassan Rohani est Alireza Ava’i. Ce dernier était membre de la commission de la mort dans la province méridionale du Khouzistan. Avant lui, Mostafa Pourmohammadi a occupé le poste pendant quatre ans dans la première administration Rohani; il avait également membre de la commission de la mort à Téhéran.

En 2016 et 2017, des questions sur le massacre de 1988 ont refait surface au milieu de l’indignation public contre la candidature de Ra’issi, et un nouveau élan a été donné au mouvement pour la justice. De nombreux responsables et leurs complices ont oublié leurs dénégations précédentes et ont commencé à défendre ouvertement leur rôle dans les meurtres. Parmi eux figurait Khamenei, qui n’a montré aucun signe de regret. Bien au contraire, ces aveux publics ne faisaient que souligner le rôle essentiel que le massacre avait joué dans le maintien du régime au pouvoir.

Même si près de trois décennies se sont écoulées depuis le massacre, il n’appartient pas au passé. Il est étroitement lié à la quête de liberté du peuple iranien et il est au cœur des objectifs de la Résistance pour traduire en justice les auteurs de ce crime contre l’humanité resté impuni.

Aucun commentaire:

Enregistrer un commentaire