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vendredi 26 mars 2021

La menace des missiles balistiques du régime iranien s’est accrue, mais il est encore temps de l’arrêter


 Cela fait plus de dix ans que le Corps des gardiens de la révolution islamique (pasdaran) a rebaptisé son armée de l’air « Force aérospatiale » afin de refléter l’importance croissante accordée au développement de missiles avancés plutôt qu’au maintien d’un arsenal d’avions militaires obsolètes. Mais le changement de nom a été effectué en reconnaissance d’une tendance qui avait commencé des décennies plus tôt. Le commandant des forces aérospatiales des pasdaran, Amir Ali Hajizadeh, l’a reconnu en 2019 lorsqu’il a déclaré aux médias que Téhéran avait sérieusement commencé à fabriquer des missiles en 1984 et avait immédiatement entrepris de creuser des tunnels pour protéger ce qu’il prévoyait être un stock massif.

Trente-cinq ans plus tard, l’ampleur de ce stock a été mise en évidence pour l’opinion internationale par l’Organisation des Moudjahidine du Peuple d’Iran (OMPI), qui a révélé l’existence de systèmes de tunnels tentaculaires lors d’une conférence de presse qui a également abordé la responsabilité de Téhéran dans une attaque de missiles et de drones de septembre 2019 contre l’infrastructure pétrolière de l’Arabie saoudite. Ce n’est qu’à la suite de ces révélations que les médias officiels ont interviewé Hajizadeh et fait des stocks souterrains de missiles une question médiatique. Et pour compenser les effets de la révélation des secrets d’État, ils l’a fait d’une manière qui a fait apparaître le programme de missiles du régime comme une menace majeure pour leurs adversaires.

« Nous devons protéger notre arsenal de manière adéquate. L’idée remonte à 1984, juste au moment où nous avons commencé à penser aux missiles », a déclaré Hajizadeh. « Aujourd’hui, il y a des cités-missiles, profondément bâties sous les montagnes, des tunnels très sophistiqués sont creusés dans le sol pour stocker des munitions, et cacher des bases de lancement de missiles et d’autres instruments, ainsi que le personnel dans des conditions de guerre. Nos ennemis sont inquiets car de tels endroits sont hors de leur portée. »

Comme pour la plupart des discours fanfarons du régime des mollahs, ces propos sont exagérés. Mais cela ne veut pas dire que le danger pour les pays occidentaux n’est pas réel. Il est bien réel, et il s’accroît rapidement. Les pasdaran ont procédé à une dizaine de tests distincts de missiles balistiques au cours des quelques années qui ont suivi la signature de l’accord nucléaire entre l’Iran et les six puissances mondiales.

Chacun de ces tests était un avertissement clair sur la menace qui se trouve enfouie sous l’Iran dans son réseau labyrinthique de « cités-missiles ». Depuis juin 2017, la menace a été puissamment soulignée par l’utilisation militaire réelle des missiles balistiques de Téhéran à des conflits au-delà de ses frontières. En janvier 2020, Téhéran a retourné ces armes contre les agents américains, en attaquant deux bases militaires irakiennes où ils étaient hébergés.

L’incident avait pour but de riposter à l’attaque aérienne qui a tué le commandant de la force Qods affiliée aux pasdaran, Qassem Soleimani, au début du mois, mais le succès de l’entreprise est sujet à polémiques. Personne n’a été tué dans les deux bases concernées, mais l’une d’entre elles a été frappée par dix missiles balistiques, et des dizaines d’Américains qui y étaient stationnés ont été diagnostiqués plus tard avec des lésions cérébrales traumatiques.

Cet incident montre clairement la volonté du régime d’utiliser de telles armes, et cela devrait susciter de sérieuses inquiétudes quant à ce qui se passera si ces armes continuent à évoluer en termes de portée et de précision, et surtout si elles en viennent à être équipées d’une tête nucléaire.

Malheureusement, ce scénario cauchemardesque n’est pas du tout tiré par les cheveux. Le régime des mollahs a totalement abandonné ses obligations au titre de l’accord nucléaire de 2015 et a récemment commencé à travailler à la fabrication d’uranium métal, un composant essentiel pour le cœur d’une arme nucléaire. Il a subi peu de conséquences de la part des signataires européens de l’accord ou de l’Union européenne dans son ensemble. Au contraire, les dirigeants de l’UE ont exprimé leur engagement absolu à maintenir l’accord en place, alors même que le régime fait progresser son programme nucléaire tout en regardant l’horloge tourner vers le jour où il sera libre d’acquérir ouvertement et légalement une technologie de missiles balistiques plus avancée.

Les dispositions qui limitent ostensiblement le développement de ces armes expirent le 18 octobre 2023, mais les restrictions sont décidément bien faibles en l’état. La décision de Téhéran de déployer à plusieurs reprises des missiles balistiques en est une preuve évidente. En raison de la résolution 2231 du Conseil de sécurité des Nations unies mentionnée plus haut, le langage concernant le développement de missiles par l’Iran a été affaibli, passant d’une interdiction claire de tout travail impliquant des armes à capacité nucléaire à un appel non contraignant pour que le régime évite de travailler sur des armes conçues dans ce but précis.

Téhéran s’est battu avec acharnement pour obtenir ce changement. Et comme le montrent clairement les tirs d’essai et les déploiements militaires, le régime a exploité le résultat au maximum. Mais ces provocations au grand jour ne disent pas tout. L’ampleur de la menace des missiles balistiques a commencé à se préciser en 2019 avec les révélations de l’OMPI – et la confirmation par les médias officiels – de vastes réseaux souterrains de stocks en constante augmentation.

Le 11 mars, d’autres révélations de ce type ont été faites lors d’une conférence de presse organisée par la coalition mère de l’OMPI, le Conseil national de la Résistance iranienne (CNRI). Elle a noté que dans l’année qui a suivi l’attaque de missiles balistiques iraniens sur la base d’Ain al-Asad en Irak, les autorités ont creusé au moins deux nouveaux tunnels juste sur l’un des sites de missiles à partir duquel cette attaque a été organisée – un complexe près de la frontière occidentale de l’Iran, à Konesht Canyon dans la province de Kermanshah.

La conférence de presse a également indiqué que ce site abritait des plateformes de lancement mobiles qui pourraient permettre au régime de déplacer une partie de son arsenal encore plus près de la frontière. Si les affirmations les plus audacieuses de Téhéran concernant les essais antérieurs, et la portée maximale de ses missiles balistiques doivent être prises au sérieux, cela pourrait exposer une grande partie de l’Europe aux armes potentiellement capables de transporter des ogives nucléaires. Bien évidemment, la propension du régime à exagérer sa rhétorique suggère que cette situation est encore loin, mais c’est une issue possible que l’Occident ne peut se permettre de minimiser.

Pourtant, il est encore temps d’agir. Les révélations en cours de l’OMPI révèlent de plus en plus de détails sur la menace, ce qui signifie qu’il est également possible d’agir. Et c’est exactement ce que les États-Unis et l’Europe doivent faire, d’abord en corrigeant le langage édenté de la résolution de l’ONU, puis en utilisant tous les outils disponibles afin de faire pression sur le régime des mollahs pour qu’il démantèle les stocks de missiles balistiques existants, qu’il mette un terme au développement de ces armes et enfin qu’il fasse toute la lumière sur les liens antérieurs entre ce développement et les efforts du régime pour acquérir une capacité d’armement nucléaire.

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