Pendant le Ramadan en Iran, les gens qui mangeaient où buvaient en public ont été interpellés et conduits au tribunal pour se voir infliger des peines de fouet ou des amendes. Les inculpés n’avaient pas le droit de protester et les peines ont été exécutées immédiatement. Voici un rapport sur une journée affolante et banale au tribunal de la ville de Racht dans le nord de l’Iran.
Dans le climat chaud et humide des derniers jours du printemps, on est témoins de scènes étranges. Toutes les 30 minutes, un interpellé menotté est conduit au tribunal. Un policier amène un jeune homme de 32 ans. Un milicien du Bassidj arrive avec un lycéen. Une femme en tchador traine une jeune femme d’une vingtaine d’années. Un agent en civil et un soldat poussent deux jeunes de 13 et 19 ans.
Tous font la queue devant le bureau du procureur général et entrent chacun à leur tour. On déclare l’identité de l’inculpé, son âge et le lieu de l’arrestation en flagrant délit, alors qu’ils mangeaient, buvaient ou fumaient en public. C’est alors qu’en silence, le juge jette un regard sur l’accusé et le fait conduire hors de la pièce. Un soldat ouvre un dossier et le renvoie vers une des trois branches du tribunal de Racht.
Un des accusés affirme avoir oublié que c’était le mois de Ramadan. Un autre justifie qu’il était malade et qu’il n’avait pas mangé en public, il buvait dans un coin quand un milicien l’a interpellé. La jeune femme qui avait été transférée à midi au tribunal explique qu’elle jeûnait mais qu’elle a dû rompre son jeûne à cause de la chaleur et un problème d’hypotension. C’est à ce moment qu’elle a été arrêtée par la police dans un parc en train de boire de l’eau et de manger un gâteau. Un autre jeune qui était en train de fumer dans sa voiture affirme avoir lui aussi oublié le mois de Ramadan.
Sans prêter la moindre attention aux explications des prévenus, le juge prononce les peines en soulignant que contrairement aux autres condamnations, on ne peut pas s’y opposer. Le juge condamne Ahmad, âgé de 28 ans à 74 coups de fouet pour avoir fumé une cigarette. Aussitôt après, ce dernier est conduit à la section des identités et des empreintes digitales. Il est ensuite transféré à l’unité d’application des peines. Ahmad n’a aucun droit de protester. De même, la jeune femme interpellée est condamnée à 40 coups de fouet et 100.000 tomans d’amende.
D’après un soldat de garde devant le bureau du procureur adjoint, depuis le début du mois de Ramadan, 30 personnes sont quotidiennement conduites au tribunal. Ce chiffre monte parfois à 50 par jour.
Selon l’article 638 du code pénal des mollahs, toute personne se livrant en public à des actes interdits par la religion (haram), est passible de 10 jours à 2 mois de prison et à 74 coups de fouet.
D’après les chiffres, les personnes interpellées pour la première fois pour avoir rompu le jeûne, sont d’ordinaire condamnées au fouet et ceux qui cuisinent et vendent de la nourriture à l’intérieur des cafés ou des restaurants avant l’appel à la prière qui marque officiellement la rupture du jeûne au coucher du soleil, sont condamnées de 10 jours à 2 mois de prison. Bien entendu leur magasin est fermé provisoirement.
D’après les recherches faites à Racht, capitale de la province de Guilan dans le nord de l’Iran, ce sont les miliciens du Bassidj, des policiers ou dans certains des cas des gardiens de la révolution qui sévissent alors qu’à Téhéran, ce sont les autorités judiciaires qui interviennent sous la surveillance d’un juge.
Etant donné la corruption rampante, les abus sont légions. Les policiers ou les miliciens se livrent au racket : ils interpellent des gens en les accusant d’avoir rompu leur jeûne et exigent de l’argent en échange de leur libération. De leur côté, les officiels qui exécutent les peines de fouet profitent aussi grassement de ces conditions.
De même le procureur général de la ville de Qazvine a fait part de 90 dossiers de gens ayant brisé le jeûne. Seuls 20 dossiers ont été envoyés à la branche spéciale d’application des peines pour des coups de fouet et des amendes. Le reste a gonflé pas mal de poches.
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