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mardi 19 janvier 2021

Le Monde : Téhéran a mobilisé toutes ses forces pour sauver son diplomate jugé en Belgique

Assadollah Assadi, le diplomate terroriste iranien

Un tribunal d’Anvers, en Belgique, annoncera son verdict sur le diplomate terroriste iranien Assadollah Assadi et ses trois complices le 4 février 2021.
Selon les procureurs belges et sur la base des preuves, le régime iranien avait chargé Assadi et trois autres terroristes de cibler le rassemblement de l’opposition iranienne en France le 30 juin 2018. Selon les procureurs, la cible principale était Maryam Radjavi. Assadi avait ordonné à ses agents de poser la bombe aussi près que possible d’elle.

Dans un article du 13 janvier, le quotidien français Le Monde a révélé comment le régime iranien avait mobilisé ses efforts pour sauver Assadi.

Le Monde a souligné l’attention que Téhéran accorde au cas d’Assadi. « Un élément supplémentaire du dossier d’instruction belge, non dévoilé jusqu’ici, confirme toute l’attention que Téhéran porte à cette affaire. Une note rédigée par la sûreté et transmise au parquet fédéral, en charge des dossiers de terrorisme, détaillait, en août 2019, les nombreuses visites de responsables iraniens à M. Assadi, alors en détention préventive dans le Limbourg belge. Quatorze personnalités au total ont conversé avec lui : ambassadeur et conseillers de la République islamique à Bruxelles, médecin et avocat iraniens vivant en France et en Belgique mais aussi cinq ‘’visiteurs liés à une administration iranienne et basés en Iran’’, indique la note. Venus de Téhéran en délégation, ces personnes avaient indiqué à la Belgique qu’elles étaient membres du ministère des affaires étrangères. Les autorités belges n’ont toutefois pu identifier que trois d’entre elles. »

Iranian diplomat Assadollah Assadi faces terrorism trial in Belgium court

Le diplomate iranien Assadollah Assadi fait face à un procès pour terrorisme devant un tribunal belge.

Le Monde a ensuite évoqué le témoignage de Mme Radjavi, au cours duquel « la présidente du Conseil national de la résistance iranienne (CNRI), ciblé par le projet d’attentat, aurait remis aux enquêteurs une note détaillant le rôle de certains de ces officiels. L’un d’eux était, en réalité, l’un des principaux dirigeants du ministère du renseignement et de la sécurité, en charge de la supervision des agents en poste dans les pays étrangers et agissant sous couvert. »

Le quotidien ajoute : «Un comité spécial regroupant différents services aurait, par ailleurs, été constitué à Téhéran pour assurer le suivi de l’affaire Assadi. Lequel a menacé la Belgique de représailles si elle le condamnait. Le ministère public a, depuis, requis une peine de vingt ans de prison contre lui. »
Selon Le Monde, « Le diplomate, arrêté en Allemagne alors qu’il tentait de regagner l’Autriche, où il exerçait la fonction de troisième secrétaire de l’ambassade d’Iran, est le commanditaire et l’organisateur présumé du complot qui devait viser le CNRI, auquel participaient ce jour-là des dizaines de milliers de personnes, dont de nombreuses personnalités politiques de premier plan. Deux jours avant la réunion de Villepinte, il avait remis, au Luxembourg, des explosifs et un détonateur à un couple de Belgo-Iraniens, arrêtés à Bruxelles le 30 juin 2018 alors qu’ils se dirigeaient vers Villepinte. »

Outre sa pression diplomatique, le régime a tenté d’utiliser son outil de prise d’otages et sa campagne de chantage pour forcer les autorités belges à libérer Assadi.

Simultanément au procès d’Assadi, le régime a annoncé qu’il exécuterait Ahmadreza Djalali, un universitaire irano-suédois qui enseignait en Belgique. En réaction à la campagne d’extorsion du régime, le Parlement belge a adopté une résolution, menaçant de couper toutes les relations avec le régime de Téhéran si M. Djalali était exécuté. Le régime a donc été contraint de suspendre momentanément son exécution.

N’ayant pas réussi à faire chanter la Belgique, le régime a tenté de saper la légitimité du tribunal belge de juger Assadi. Bien que son diplomate terroriste soit pris en flagrant délit, le régime de Téhéran a tenté de le présenter comme un «diplomate» innocent de service.

Le Monde ajoute : « Selon la longue enquête de la justice belge et de la sûreté de l’Etat, le service de renseignement, toute l’opération a été conçue au plus haut niveau à Téhéran, en lien avec les prévenus qui travaillaient depuis longtemps pour le ministère du renseignement et de la sécurité. Jaak Raas, le patron de la sûreté, a expliqué que l’action avait été fomentée « au nom de l’Iran, sous son impulsion ».

Le procès d’Assadi est historique car c’est la première fois que le diplomate de carrière iranien est jugé pour terrorisme en Europe et pourrait marquer un précédent. Par conséquent, le procès d’Assadi a exaspéré le régime.

« Marchandage »
Il est probable, en tout cas, qu’une décision des magistrats d’Anvers jugée trop défavorable pour le prévenu ne laissera pas le régime de Téhéran sans réaction. La récente condamnation à mort d’un professeur de l’Université libre flamande de Bruxelles, Ahmad Reza Djalali, a été perçue, en Belgique, comme un avertissement. Ce médecin irano-suédois, arrêté en 2016 au cours d’une mission à Téhéran, a été accusé d’espionnage au profit d’Israël. Malade, M. Djalali a été placé à l’isolement peu de temps avant le début du procès belge. Son exécution a ensuite été différée. A la fin décembre, les députés belges ont voté une résolution demandant sa libération et dénonçant une « prise d’otage ».

L’arrestation, à l’automne dernier, d’une architecte germano-iranienne retraitée, Nahid Taghavi, placée au secret à la prison d’Evin, est, quant à elle, vue comme un message adressé à l’Allemagne, qui a procédé à l’arrestation de M. Assadi avant de le remettre à la Belgique.

En novembre 2020, la chercheuse australo-britannique Kylie Moore-Gilbert, taxée d’espionnage, a obtenu sa libération au bout de 800 jours, en échange de trois Iraniens impliqués dans un projet d’attentat contre des diplomates israéliens en Thaïlande. La Belgique sera-t-elle bientôt confrontée à un dilemme du même genre, alors que les appels à sauver M. Djalali sont nombreux ? « La question se posera peut-être pour le gouvernement, mais je ne connais pas un juge qui accepterait un marchandage », affirme un député, membre de la commission des affaires étrangères au parlement fédéral.

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