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mercredi 12 juin 2024

Franck Radjai, Directeur de Recherche au CNRS, et président de l’ULI

 Franck Radjai, Directeur de Recherche au CNRS, et président de l’Association des Universitaires pour la Liberté en Iran a écrit le 5 juin, la lette suivant au journal Le Monde.

Je suis Directeur de Recherche au CNRS à l’Université de Montpellier et Président de l’Association des Universitaires pour la Liberté en Iran (ULI). D’origine iranienne et ayant subi la répression sous le régime des mollahs en Iran, et touché au plus profond dans ma chair puisque cette dictature religieuse a exécuté ma sœur en 1981, je suis de près les informations concernant l’Iran et, plus particulièrement, celles concernant le mouvement de résistance mené par l’Organisation des Moudjahidines du Peuple d’Iran (OMPI) depuis 40 ans.

Je viens de voir une liste de questions ridicules adressées par Mme Ghazal Golshiri à mon ami Afchine Alavi concernant l’OMPI dans le cadre d’une « enquête » au nom de votre journal. Ces questions sont une insulte à des centaines de milliers d’Iraniens de la diaspora et des millions d’Iraniens qui soutiennent ce mouvement. Cela fait des dizaines d’années que j’effectue des travaux de recherches et je suis habitué aux méthodes scientifiques. Je ne détecte aucun signe d’un travail respectable dans ce que Mme Golshiri expose dans ce questionnaire. Elle laisse 48 heures à l’OMPI de répondre ! Cette méthode expéditive et la teneur des questions laissent clairement apparaître une nouvelle tentative de diabolisation dont l’OMPI est constamment l’objet de la part du régime des mollahs et dans le cadre de la politique de complaisance menée par des gouvernements occidentaux face au régime des mollahs. Il serait totalement incompréhensible et irresponsable de la part d’un journal de poids tel que Le Monde de se laisser entraîner dans ce jeu alors que le régime des mollahs fait face à une crise socio-économique sans précédent, à la montée des unités de résistance de l’OMPI en Iran, et au vaste soutien apporté par des majorités parlementaires en Europe et aux Etats-Unis au CNRI et au plan en 10 points de Mme Maryam Radjavi pour un Iran démocratique et laïc.

Je sais parfaitement de quoi je parle. J’ai dans le passé fait partie de ce mouvement et j’ai vécu en Irak. Je connais des centaines de personnes qui sont dans mon cas. J’ai pris contact avec certains d’entre eux après avoir reçu un exemplaire de ces questions et je constate qu’aucun d’entre nous n’a été contacté par l’auteure de cette « pseudo-enquête ». On peut donc tirer les conséquences sur les objectifs de cette démarche qui rejoint les efforts continues du pouvoir iranien de diaboliser ce mouvement. Je tiens à préciser qu’il y a une grande différence entre les « anciens membres » de l’OMPI comme moi et mes semblables, et les transfuges qui se sont mis au service du bourreau. Bizarrement, Mme Golshiri n’est tombée que sur eux. Je rappelle aussi que certains de ces transfuges ont participé à des tentatives de terrorisme comme ce fut le cas de certains d’entre eux, neutralisés par le gouvernement albanais, quand un attentat à la bombe contre l’OMPI a été déjoué à Tirana.

Il existe de nombreux exemples de ces « enquêtes » fabriquées sur des « témoignages » de collaborateurs directs du ministère du renseignement iranien. Elles ont tous été démenties. Je rappelle que l’inscription injuste de l’OMPI sur des listes noires fut justifié un temps par des accusations similaires et en provenance des sources qui étaient en fin de compte financés par Téhéran. Ces mises en cause ont donné lieu à des « enquêtes » sérieuses menées sur de longues périodes, ce fut le cas de l’enquête sur plus de dix ans des juges d’instruction en France qui ont conduit à des non-lieux et à l’annulation de toutes les inscriptions et accusations de ce genre. Des rapports et nombreux ouvrages publiés par la suite par des experts et journalistes, ont permis de démontrer clairement le rôle actif du ministère du renseignement du régime des mollahs derrière toutes les fausses accusations et soi-disant « témoignages ». Décidemment Mme Golshiri n’a jamais pris connaissance de ces multiples rapports.

Il m’a semblé nécessaire de réagir et de vous faire part de mes inquiétudes dans la mesure où aucun observateur indépendant et objectif ne peut ignorer aujourd’hui la vérité et les aspirations des Iraniens pour une société démocratique et juste, ainsi que les grands bouleversements qui en résulteront dans le paysage géopolitique. Même si je ne fais plus partie de l’OMPI mais je soutien cette cause noble et je ne peux contempler que votre journal se laisse entrainer dans le jeu des mollahs.

Très cordialement,

Franck Radjai

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