Par Giulio Terzi, ancien ministre italien des Affaires étrangères
Le soulèvement national des douze derniers mois en Iran a lancé un message politique clair et sans équivoque, ne laissant aucun doute sur l’aspiration réelle du peuple à un changement de régime. Par conséquent, les responsables du régime au plus haut niveau, notamment le Guide Suprême Ali Khamenei, se sont vues ciblés par des slogans tels que « A bas le dictateur » et ont dû reconnaitre la conduite de la révolte par le mouvement d’opposition iranien, l’OMPI, qui a toujours été à l'avant-garde pour déchoir le régime théocratique et pour l’avènement d’un Iran respectant pleinement ses obligations internationales et l'État de droit.
A cet effet, il est important de souligner comment la plateforme politique du Conseil national de la Résistance iranienne (CNRI) dirigée par Maryam Radjavi a obtenu un soutien de plus en plus large, tant à l’échelle internationale qu’au niveau national, et est devenue une alternative crédible, fiable et démocratique, à un système politique décadent, responsable de la désagrégation économique, de la corruption endémique, de la répression sanglante en Iran – et ailleurs par le biais des « mandataires » du régime – qui isole définitivement le peuple iranien.
Dans ce contexte, après plus d'un an de manifestations à travers le pays contre le régime corrompu et despotique des Ayatollahs, le 15 décembre dernier, des expatriés iraniens dans 50 villes du monde entier se sont réunis pour sensibiliser l’opinion public sur la nécessité d'un changement profond dans leur pays. Les militants « pour la démocratie » ont dénoncé les récents complots terroristes contre le mouvement d’opposition et appelé les gouvernements étrangers à s'engager dans des politiques plus décisives et des engagements concrets contre les mollahs.
Il devrait maintenant être clair pour la communauté internationale que le confrontation entre le très impopulaire régime théocratique et la résistance démocratique de plus en plus influente, est plus forte que jamais. J'ai déjà eu l'occasion d'écrire sur la façon dont les hommes politiques occidentaux ont trop longtemps ignoré la présence de ces alliés « naturels » dans la société iranienne, ce qui ne peut plus se faire de manière crédible.
L'Europe risque de rater une occasion en or de contribuer à l’avènement d’un avenir meilleur pour le Moyen-Orient, tandis que les protestations se poursuivent sous différentes formes. L'amélioration des conditions de vie du peuple iranien et la conquête de la pleine liberté devraient être un impératif pour les pays occidentaux et une motivation supplémentaire pour façonner un horizon commun dans les processus décisionnels qui prennent forme aux Nations unies à New York et à Genève, dans l'UE à Bruxelles et à Washington.
Au fil des années, Téhéran a été actif dans la propagande haineuse contre la Résistance, dépeignant le mouvement comme un nid de « terroristes », une pratique commune à tous les régimes dictatoriaux contre les opposants politiques. A titre d'exemple, on pourrait citer la manière dont la même approche a été utilisée en Syrie par Assad en 2011, lorsque l'Etat dit islamique n'était pas encore né. La vérité est que le régime des mollahs a non seulement essayé de délégitimer l'opposition démocratique du CNRI par la diffusion d’informations diffamatoires, mais aussi avec une stratégie d'assassinats ciblés, qui se poursuit depuis de nombreuses années, il a également opté pour l'élimination physique des opposants politiques qui résident à l'étranger.
La terrible histoire des camps Liberty et Achraf en Irak est bien connue : des milliers de réfugiés politiques iraniens – officiellement sous la protection des Nations Unies et des États-Unis – ont été massacrés à plusieurs reprises par les milices envoyées par les mollahs. En Europe, au cours des vingt dernières années, de nombreux meurtres et tentatives d'attentats terroristes ont été perpétrés contre des dissidents iraniens. Plus récemment, en mars dernier, des agents de Téhéran ont été arrêtés en Albanie alors qu'ils préparaient l'attaque contre le siège de l'OMPI, où plus de 2 000 membres sont en exil.
En juin, une collaboration efficace entre les autorités de plusieurs pays européens a permis de déjouer un attentat près de Paris à l'occasion du rassemblement annuel du Conseil national de la Résistance iranienne. Si l'attaque avait été couronnée de succès, il serait difficile d’estimer combien parmi les 100 000 participants auraient été tués, ou si le nombre de morts aurait inclus les centaines de représentants politiques du monde entier qui ont participé à l'événement.
Peu de temps après, à l'issue d'une enquête menée aux États-Unis, deux citoyens d'origine iranienne ont été inculpés pour activités d'espionnage pour le compte de Téhéran. La plainte a montré que les militants de l'OMPI étaient la cible principale, avec une forte probabilité que des attaques terroristes contre eux soient menées aux États-Unis.
Enfin, en octobre dernier, les autorités danoises ont annoncé l'arrestation d'un assassin potentiel envoyé par Téhéran pour éliminer les militants de l'opposition qui résident dans le pays. Cela a conduit le gouvernement danois à lancer un appel pressant aux institutions européennes et aux autres États membres en attirant l'attention de tous sur le danger réel que représente la menace terroriste venant de Téhéran. En même temps, après une enquête approfondie sur les événements de Paris en juin dernier, le gouvernement français a imposé unilatéralement des sanctions au ministère iranien du Renseignement et à certains de ses agents bien connus. C'est sans aucun doute la marche à suivre.
Mais les dissidents ne sont pas les seules cibles des complots terroristes de Téhéran. Matteo Salvini, vice-premier ministre et ministre de l'Intérieur italien, a récemment souligné le caractère terroriste du Hezbollah libanais. Le Hezbollah, financé et soutenu par les Gardiens de la révolution (pasdaran), fonctionne comme une branche armée du régime des mollahs dans le monde entier, menant des actions en Europe et en Amérique latine depuis plus de trois décennies.
À ce stade, il est de plus en plus difficile de comprendre la raison pour laquelle l'UE hésite tant à agir face à cette profusion de preuves. Une partie de l'explication s’explique sans aucun doute une avidité aveugle. De nombreuses nations et entreprises européennes basées en Europe sont désireuses de garder un accès au pétrole iranien et aux marchés encore inexplorés, une sorte « d'Eldorado » totalement irréel et illusoire.
L'Italie et l'Espagne, par exemple, ont résisté énergiquement aux exhortations danoises, ainsi qu'à la décision de la France, de l'Allemagne et du Royaume-Uni de sanctionner l'Iran pour les violations manifestes de la résolution 2231 du Conseil de sécurité de l’ONU, qui appelle le régime des mollahs à éviter la mise au point et les essais de missiles balistiques et autres armes nucléaires.
Mais un autre facteur pèse également lourdement sur le processus décisionnel collectif de l'UE : Les politiques occidentales à l’égard de Téhéran ont longtemps été paralysées par un malentendu fondamental sur la situation politique réelle au sein de la République islamique. Les responsables des politiques actuelles ont tendance à prendre à tort en compte la résilience de l'Ayatollah face au pouvoir et considèrent toute tentative de perturber cette situation comme inefficace, voire nuisible. Ce qui nous montre plutôt la réalité des faits, c'est un régime de plus en plus vulnérable, année après année, et ces données ne peuvent plus être ignorées pendant longtemps.
Heureusement, pour donner une impulsion à une « impasse » aussi dangereuse, de nombreuses exceptions contribuent à la scène politique européenne, au sein du Parlement européen et des parlements de nombreux États membres, dont l'Italie, par une série d'appels urgents pour que Téhéran soit confrontée aux conséquences de sa propre attitude. Trente-trois sénateurs italiens ont récemment signé une déclaration de soutien au peuple iranien pour son soulèvement anti-régime, saluant la Résistance iranienne comme la principale alternative pour apporter la liberté et la démocratie en Iran. Une autre initiative a été prise par 310 parlementaires, membres de divers groupes politiques, pour demander au gouvernement italien de condamner officiellement les massacres en 1988 de 30 000 prisonniers politiques et de conditionner les relations avec Téhéran, à tous les niveaux, à l'abolition définitive des exécutions.
Dans le même ordre d'idées, 197 membres du Parlement européen ont appelé les institutions européennes à soutenir une enquête internationale et indépendante sur le massacre de 1988 ordonné par le régime, avec un rôle personnelle de certaines personnes qui occupent encore des postes gouvernementaux importants. Il s’agit notamment des ministres de la Justice choisis par le président « modéré » Rohani parmi ses deux leaders également « modérés » : l'actuelle ministre Alireza Avaie et son prédécesseur Mostafa Pourmohammadi.
Source : Le Comité mondial pour l'Etat de droit
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