Pages

lundi 31 août 2020

Les Derviches volontairement bannis dans des régions pauvres

 CSDHI – Les militants de la minorité religieuse des Derviches Gonabadi ont été forcés de vivre loin de chez eux après leur libération de prison. Ils ont donc rejeté l’affirmation d’un responsable iranien selon laquelle Téhéran n’a pas de politique d’exil des condamnés libérés vers des régions pauvres et éloignées.

Les prisonniers libérés, bannis en exil le plus loin possible

Gholamhossein Esmaili est le porte-parole du pouvoir judiciaire iranien. Lors d’un point de presse, il a affirmé que le pouvoir judiciaire ne dispose pas d’une liste prédéterminée de lieux de bannissement de certains condamnés iraniens libérés de prison. Après leur libération, ces individus seraient condamnés à vivre loin de leur ville natale pendant un certain temps. M. Esmaili répondait aux nouvelles des médias officiels iraniens, publiées récemment. Il faisait référence à une prétendue liste du ministère de l’intérieur. En effet, cette liste désigne 36 lieux comme lieux d’exil des condamnés dans le cadre de leur peine.

L’article 23 du code pénal islamique iranien de 2013 donne aux juges le pouvoir d’ajouter une variété de peines aux peines de prison. Les peines supplémentaires peuvent inclure une « résidence obligatoire dans un lieu déterminé ». Elles incluent aussi une « interdiction de résider dans un lieu déterminé (ou dans des lieux déterminés) » après la prison. Ces deux types de peines consistent à obliger les condamnés à vivre loin de leur domicile pendant des périodes déterminées, généralement plusieurs années.

Des lieux « inappropriés »

Le code pénal iranien ne précise pas quels lieux doivent servir de résidence « obligatoire » pour les détenus libérés, condamnés au bannissement de leur domicile. Il n’y a pas non plus de spécification de ce type dans un règlement judiciaire de juin 2019 expliquant comment l’article 23 du code pénal est censé être appliqué.

L’article 135 du règlement, publié dans le journal officiel iranien, stipule que les autorités doivent uniquement dresser une liste des lieux de bannissement jugés « inappropriés ». Et cela en raison de leurs conditions « politiques, sécuritaires et sociales ».

Malgré l’absence d’une liste officielle de lieux appropriés d’exil intérieur, les autorités iraniennes ont banni des condamnés libérés dans des régions pauvres et reculées pendant des décennies. Ce type de méthode existe depuis le règne du shah, que les mollahs ont évincé lors de la révolution islamique de 1979.

Quatre militants Derviches exilés dans des lieux prédéterminés

Dans des interviews accordées mardi à VOA Persian, quatre militants derviches ont été forcés de vivre dans de tels endroits depuis leur libération de prison, début 2020. Ils ont déclaré que l’affirmation de M. Esmaili, selon laquelle aucun condamné n’est exilé dans des lieux prédéterminés, est fausse.

Les quatre militants, Saeed Dourandish, Reza Entesari, Sina Entesari et Saeed Soltanpour, ont tous été arrêtés en février 2018 lors des manifestations anti-régime des Derviches iraniens à Téhéran. Les autorités iraniennes les ont ensuite condamnés chacun à cinq ans de prison. Puis, il leur a accordé des libérations anticipées en mars et mai 2020 pour soulager la surpopulation des prisons, infestées par le coronavirus. Cependant, les quatre militants ont également été contraints de s’exiler à l’intérieur du pays après avoir été libérés, conformément aux termes de leur peine.

Dourandish et Soltanpour ont été respectivement exilés dans les villes de Zabol et Zahak, près de la frontière avec l’Afghanistan. Reza Entesari a été exilé dans la ville de Khaf, dans le nord-est du pays, près de l’Afghanistan. Sina Entesari a été exilé dans la ville de Mirjaveh, dans le sud-est, près du Pakistan. Ces quatre villes sont pauvres et situées à environ 1 000, 1 500 kilomètres de Téhéran.

La vie en exil intérieur

Pendant qu’ils purgent leur peine d’exil interne, les condamnés libérés sont tenus de se présenter aux autorités locales chaque jour ou presque. Certains sont également confrontés à des restrictions supplémentaires notamment pour travailler et interagir avec d’autres personnes.

Soltanpour a déclaré que lui et d’autres derviches prisonniers libérés ont été envoyés « spécialement » pour vivre dans des villes pauvres près de la frontière orientale de l’Iran.

« La vie est une lutte pour la population dans ces villes pauvres. Les conditions sanitaires sont mauvaises aussi », a déclaré Dourandish.

Reza Entesari a déclaré : « Si le porte-parole du pouvoir judiciaire Esmaili a raison de dire que l’Iran ne désigne aucun lieu particulier comme étant approprié pour le bannissement des condamnés, « Pourquoi envoient-ils les prisonniers politiques en exil interne uniquement dans les villes au climat rude ? Pourquoi ne pas nous envoyer aussi dans des villes au climat agréable comme Chiraz, Mashhad ou Bushehr ? »

« Ma vie est centrée à Téhéran, mais ils m’ont envoyé à la frontière sud-est du pays », a déclaré Sina Entesari.

« Les services du renseignement iranien ont choisi des villes de bannissement des prisonniers politiques où ils souffriraient le plus. »

Les Derviches impliqués dans les manifestations de 2018 à Téhéran avaient demandé la libération de leurs membres arrêtés. Ils réclamaient aussi la suppression des contrôles de sécurité autour de la maison de leur leader, Noor Ali Tabandeh. Il est décédé en décembre 2019.

Les membres de la secte religieuse musulmane soufie se plaignent depuis longtemps du harcèlement des dirigeants islamistes chiites d’Iran. Ces derniers les considèrent comme des hérétiques.

Source : VOA

Aucun commentaire:

Enregistrer un commentaire