lundi 26 novembre 2012

Résolution du Parlement européen sur la situation des droits de l'homme en Iran




notamment sur les exécutions massives et la mort récente du blogueur Sattar Beheshti (2012/2877(RSP))    

Le Parlement européen,
–   vu ses précédentes résolutions sur l'Iran, en particulier celles relatives aux droits de l'homme,
–   vu la déclaration du 23 octobre 2012 de la vice-présidente de la Commission / haute représentante de l'Union pour la politique étrangère et de sécurité commune sur les dix exécutions qui ont eu lieu récemment en Iran,
–   vu la déclaration du 11 novembre 2012 du porte-parole de la vice-présidente de la Commission / haute représentante de l'Union pour la politique étrangère et de sécurité commune sur la mort en détention du blogueur iranien Sattar Beheshti,
–   vu le rapport du 13 septembre 2012 du rapporteur spécial des Nations unies sur la situation des droits de l'homme en Iran,
–   vu la sortie de prison, en septembre 2012, du pasteur Youcef Nadarkhani,
–   vu les résolutions de l'Assemblée générale des Nations unies n° 62/149 du 18 décembre 2007 et n° 63/168 du 18 décembre 2008 relatives à un moratoire sur l'application de la peine de mort,
–   vu le pacte international relatif aux droits civils et politiques, le pacte international relatif aux droits économiques, sociaux et culturels, la convention sur l'élimination de toutes les formes de discrimination raciale et la convention relative aux droits de l'enfant, auxquels l'Iran est partie,
–   vu l'article 110, paragraphes 2 et 4, de son règlement,
A. considérant que la situation actuelle des droits de l'homme en Iran se caractérise par un cycle continu de violations systématiques des droits fondamentaux; que les défenseurs des droits de l'homme (et notamment des droits des femmes, des enfants et des activistes œuvrant pour les droits des minorités), les journalistes, les blogueurs, les artistes, les dirigeants étudiants, les avocats, les syndicalistes et les écologistes continuent d'être soumis à de fortes pressions et à la menace constante d'être arrêtés;
B.  considérant que le blogueur Sattar Beheshti, qui critiquait sur l'internet le régime iranien, a été arrêté le 30 octobre 2012 par l'unité de la police spécialisée – dénommée Fata – pour de prétendus cybercrimes et qu'il est mort en détention; que les circonstance exactes de son décès n'ont pas encore été établies mais que plusieurs sources indiquent qu'il serait mort des suites de tortures infligées dans un centre de détention en Iran;
C. considérant que des membres de la famille de Sattar Beheshti vivant en Iran ont été menacés d'arrestation s'ils parlaient aux médias de sa mort ou engageaient des poursuites contre les présumés coupables des tortures;
D. considérant que la mort de Sattar Beheshti est un nouveau tragique exemple de l'usage systématique et courant de la torture, des mauvais traitements et du déni des droits fondamentaux auquel les prisonniers d'opinion sont habituellement confrontés en Iran, tandis que les agents de sécurité et de renseignement opèrent dans un climat d'impunité totale;
E.  considérant qu'après avoir gardé plusieurs jours le silence sur le décès de Sattar Beheshti, le conseil des droits de l'homme de l'appareil judiciaire iranien a affirmé son intention d'examiner toutes les circonstances de l'affaire et de poursuivre avec vigueur toutes les personnes qui seraient impliquées dans l'affaire;
F.  considérant que le vice-président du parlement iranien, Mohammad Hasan Abutorabifard, a déclaré le 11 novembre 2012 que la commission sur la sécurité nationale et la politique étrangère du parlement iranien allait enquêter sur cette affaire;
G. considérant que les rapporteurs spéciaux de l'ONU sur la situation des droits de l'homme en Iran, sur les exécutions sommaires, sur la torture et sur la liberté d'expression ont salué les décisions du parlement et de l'appareil judiciaire iraniens d'enquêter sur le décès de M. Beheshti, tout en faisant observer qu'un certain nombre d'affaires avaient été rapportées en Iran dans lesquelles, selon les allégations, des détenus étaient morts en prison, du fait de mauvais traitements, de tortures, de l'absence de soins ou de négligence médicale;
H. considérant que, le 22 octobre 2012, Saeed Sedighi et neuf autres hommes ont été exécutés dans des affaires de drogue; que la plupart d'entre eux n'ont pas bénéficié d'un procès équitable et qu'ils ont subi des tortures en cours de détention;
I.   considérant qu'après l'exécution de M. Sedighi, les autorités ont averti les membres de sa famille de ne pas parler aux médias et les ont empêchés d'organiser une cérémonie publique de funérailles après son enterrement;
J.   considérant qu'il s'est produit en Iran, ces dernières années, une augmentation dramatique des exécutions, y compris de mineurs, avec plus de trois cents exécutions recensées depuis le début de 2012; que la peine de mort est fréquemment prononcée dans des affaires où les accusés se voient dénier leur droit à un juste procès ou pour des crimes qui, selon les normes internationales, n'entrent pas dans la catégories des "crimes les plus graves";
K. considérant que les autorités iraniennes poursuivent leurs efforts pour obtenir un internet "halal", en déniant effectivement aux Iraniens l'accès à la Toile, et pour retourner les technologies de l'information et de la communication contre les libertés fondamentales, comme les libertés d'expression et de réunion; que l'Iran restreint la liberté sur l'internet en limitant les bandes passantes, en développant des serveurs sous contrôle étatique et ses propres protocoles, fournisseurs d'accès et moteurs de recherche, et en bloquant les sites des réseaux sociaux intérieurs ou internationaux;
L.  considérant que le prix Sakharov pour la liberté de l'esprit a été décerné en 2012 à deux militants iraniens, l'avocate Nasrin Sotoudeh et le réalisateur Jafar Panahi; que Nasrin Sotoudeh et Jafar Panahi purgent tous les deux des peines de prison pour avoir dénoncé des violations des droits de l'homme en Iran; que Mme Sotoudeh a commencé une grève de la faim après s'être vu refuser la visite de sa famille;
1.  fait part de sa vive préoccupation à l'égard de la dégradation constante de la situation des droits de l'homme en Iran, de l'augmentation du nombre de prisonniers politiques et de prisonniers de conscience, du nombre toujours élevé des exécutions, y compris parmi les mineurs, de la pratique répandue de la torture, de la tenue de procès inéquitables et des sommes exorbitantes exigées à titre de caution, ainsi que des sévères restrictions à la liberté d'information, d'expression, d'association, de religion, d'enseignement et de circulation;
2.  est profondément préoccupé par la mort de Sattar Beheshti en prison; presse les autorités iraniennes de mener une enquête minutieuse sur ce décès afin d'en établir les circonstances exactes;
3.  est profondément préoccupé du fait que des sources indiquent que Sattar Beheshti a été torturé en prison; presse les autorités iraniennes de veiller à ce qu'un enquête soit menée dans chaque affaire où, dans des centres de détention, sont allégués des tortures ou un traitement cruel, inhumain ou dégradant, et que ceux qui les ont perpétrés soient tenus responsable de ces actes; rappelle que l'utilisation du châtiment corporel – qui constitue un acte de torture – est incompatible avec l'article 7 du pacte international relatif aux droits civils et politiques;
4.  condamne fermement l'application de la peine de mort en Iran et demande aux autorités iraniennes, conformément aux résolutions nos 62/149 et 63/138 de l'Assemblée générale des Nations unies, d'instaurer un moratoire sur les exécutions dans l'attente de l'abolition de la peine de mort; demande instamment au gouvernement iranien d'interdire l'exécution de mineurs et de commuer toutes les peines capitales déjà prononcées contre des mineurs; lui demande de publier des statistiques sur la peine de mort et des détails sur l'administration de la justice dans les affaires passibles de la peine de mort;
5.  déplore profondément le manque d'impartialité et de transparence de la procédure judiciaire et le déni des droits inhérents à une procès régulier en Iran; invite les autorités iraniennes à garantir à tous les détenus un strict respect de leur droit à avoir un procès juste et équitable, ainsi que le stipule le pacte international relatif aux droits civils et politiques;
6.  presse les autorités iraniennes de libérer tous les prisonniers politiques et prisonniers de conscience, notamment les lauréats du prix Sakharov, Nasrin Sotoudeh et Jafar Panahi, et de les autoriser à se rendre au Parlement européen en décembre 2012 pour recevoir leur prix; exprime son inquiétude devant la détérioration de l'état de santé de Nasrin Sotoudeh; demande aux autorités judiciaires et pénitentiaires d'Iran de cesser tout mauvais traitement à son égard; exprime sa sympathie et sa plein solidarité au sujet des demandes de Nasrin Sotoudeh; invite les autorités iraniennes à accorder aux prisonniers un accès à l'avocat de leur choix, à des soins médicaux nécessaires et aux visites de leurs proches, auquel ils ont droit selon le droit international dans le domaine des droits de l'homme, et à les traiter avec dignité et respect;
7.  demande aux autorités iraniennes de tolérer les manifestations pacifiques et de chercher une solution aux nombreux problèmes auxquels la population iranienne est confrontée;
8.  invite les autorités iraniennes à garantir la liberté de religion, conformément à la Constitution du pays et au pacte international relatif aux droits civils et politiques;
9.  presse les autorités iraniennes d'apporter la preuve de leur engagement plein et entier à coopérer avec la communauté internationale en vue d'améliorer la situation des droits de l'homme en Iran; invite le gouvernement iranien à respecter les obligations qui lui incombent, tant au regard du droit international que des conventions internationales qu'il a signées;
10. est persuadé qu'une visite d'un rapporteur spécial de l'ONU peut aider à établir un panorama de la situation des droits de l'homme en Iran; observe, avec inquiétude, que l'Iran a refusé, depuis 2005, toutes les visites de rapporteurs spéciaux de l'ONU ou du Haut Commissaire aux droits de l'homme; invite l'Iran à honorer sa promesse expresse d'autoriser en 2012 la visite en Iran du rapporteur spécial de l'ONU pour les droits de l'homme, Dr Ahmed Shaheed;
11. invite la Commission à faire, en étroite coopération avec lui-même, un usage effectif du nouvel instrument européen pour la démocratie et les droits de l'homme, afin de soutenir la démocratie et le respect des droits de l'homme en Iran, y compris la liberté d'expression en ligne;
12. invite les représentants de l'Union et la vice-présidente de la Commission / haute représentante de l'Union pour la politique étrangère et de sécurité commune à encourager les autorités iraniennes à reprendre le dialogue sur les droits de l'homme; réaffirme qu'il est prêt à engager un dialogue sur les droits de l'homme avec l'Iran, à tous les niveaux, sur la base des valeurs universelles inscrites dans la charte de l'ONU et les conventions internationales;
13. soutient pour l'Union européenne une approche double en Iran (combinant les sanctions avec la diplomatie) mais s'inquiète en même temps des effets négatifs pour la population iranienne de sanctions généralisées contre l'Iran, notamment l'inflation et la pénurie de biens de première nécessité, notamment de médicaments;
14. invite le Conseil à renforcer les mesures ciblées contre des personnes ou des entités iraniennes, notamment les institutions de l'État, qui sont responsables ou complice de graves violations des droits de l'homme ou restrictions des libertés fondamentales, notamment par l'usage dévoyé des technologies de l'information et de la communication (TIC) et de l'internet ou la censure des médias; invite la Commission et les États membres à veiller à ce que tous les actifs dans l'Union européenne, dont les biens immobiliers, appartenant à des Iraniens visés par les mesures restrictives, soient saisis et confisqués;
15. charge son Président de transmettre la présente résolution à la vice-présidente de la Commission / haute représentante de l'Union pour les affaires étrangères et la politique de sécurité, au Conseil, à la Commission, aux gouvernements et aux parlements des États membres, au Secrétaire général des Nations unies, au Conseil des droits de l'homme des Nations unies, ainsi qu'au gouvernement et au parlement de la République islamique d'Iran et de la faire traduire en persan.
 

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