Le Bureau de coordination des affaires humanitaires des Nations Unies et le Mécanisme de protection civile de l’Union Européenne ont récemment publié des estimations concernant la gravité des inondations qui ont frappé au moins 25 des 31 provinces iraniennes à la mi-mars.
Les chiffres indiquent que plus de 12 millions de citoyens iraniens ont été touchés par la catastrophe et qu'environ deux millions d'entre eux ont actuellement besoin de secours humanitaires. Cependant, le gouvernement iranien n’a pas accordé de telles mesures, et Iran Human Rights Monitor a saisi les rapports internationaux pour accuser Téhéran de retenir les fonds disponibles.
L'IHRM a pointé du doigt une lettre écrite par le Guide suprême Ali Khamenei environ un mois après le début de la catastrophe. Dans ce document, il a retiré son accord antérieur pour la libération de fonds du Fonds de développement national, une réserve monétaire nationale composée en grande partie de revenus provenant des exportations de pétrole du pays. Khamenei s’inquiète probablement de l'épuisement possible de ce fonds, en raison de l'escalade des sanctions imposées par les États-Unis. Il a donc insisté sur le fait que le FND ne puisse être utilisé qu'une fois que le budget actuel aura été pleinement utilisé.
Mais, comme le souligne IHRM, ces mêmes préoccupations n’ont pas empêché Téhéran de dépenser de l’argent pour d’autres priorités, notamment au-delà des frontières de l’Iran. Alors que la crise des inondations est encore présente dans l’esprit de toute la nation, les médias ont rapporté le 27 avril que le régime avait dépensé environ 37 millions d’euros pour des projets de construction en Irak et en Syrie. Pendant ce temps, les victimes des inondations déclarent n'avoir encore reçu aucune aide gouvernementale.
Cette situation est exacerbée par l'aggravation de la crise économique en République islamique. Et certaines institutions gouvernementales iraniennes ont cherché à éclairer à la fois les détails de cette crise et les faiblesses de la réponse actuelle du régime. IranWire a annoncé la semaine dernière que le Centre de recherche du Parlement avait prédit une augmentation spectaculaire du niveau de « pauvreté absolue » dans tout le pays. Alors que les chiffres précédents attribuent cette condition à environ 16 % de la population, elle devrait maintenant toucher 40 % dans les 12 prochains mois. Dans le même temps, on peut s’attendre à ce que certaines entités sans lien avec le gouvernement iranien prédisent des résultats encore pires.
Les taux d’inflation galopants, la hausse du coût des biens de première nécessité et les subventions mal structurées citées dans l’étude du Centre de recherche soulignent avec la difficulté avec laquelle les Iraniens ordinaires auront à se remettre des inondations. Et pourtant, après la destruction de près de 90 000 maisons et de dommages totalisant plus de 2.24 milliards d’euros, c’est exactement ce que de nombreux citoyens tentent de faire.
Cependant, ces efforts civils ont parfois provoqué des conflits avec le régime, soit parce que les victimes d’inondations sont concentrées sur des zones de reconstructions différentes de celles des autorités du régime, soit parce que leurs efforts sont accompagnés de manifestations de mécontentement face à l’absence de réaction gouvernementale adéquate. Le document susmentionné de l’IHRM a mis en lumière certaines des manifestations publiques qui ont émergé de la situation toujours non résolue et a répété que la réaction d’entités telles que le Corps de la Garde de la révolution islamique (les pasdarans) avait tendance à se concentrer sur la répression de la dissidence au lieu de répondre aux revendications de la population.
En conséquence, un certain nombre d’Iraniens auraient été arrêtés par des autorités et faits l’objet de poursuites précisément parce qu’ils tentaient de fournir des secours aux victimes des inondations indépendamment de l’autorité gouvernementale, ou simplement parce qu’ils ont parlé publiquement de la gravité de la situation dans les régions touchées. Selon l’IHRM, au moins 24 personnes ont été arrêtées dans la seule province du Khouzistan pour « diffusion de rumeurs d’inondations ». Et vendredi dernier, le Centre pour les droits de l’homme en Iran a fait état de l’arrestation de deux femmes affiliées au groupe caritatif « Voice of Iranian Women ».
Le 29 avril, Akam Nasirian a été arrêtée par des agents de la sécurité qui n'avaient pas indiqué pour quel organisme d’application de la loi, ils travaillaient. Elle est depuis incarcérée à la prison d'Evine, où elle serait accusée de « trouble de l'opinion publique ». Le 15 mai, son collègue Nahid Shaghaghi a été arrêté lors d'une perquisition à son domicile et emmené dans un lieu tenu secret. Bien qu'il ait été suggéré qu'au moins une de ces arrestations ait été motivée en partie par l'activisme du groupe en faveur des droits des femmes et son opposition aux lois concernant le voile obligatoire du pays, il est également vrai que « Voice of Iranian Women » a contribué aux opérations d’aide et de secours dans les zones inondées et que les personnes récemment arrêtées ont contribué à ces efforts.
Source : INU
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