Un conseiller principal du président Hassan Rouhani a ouvertement menacé des journalistes iraniens basés en dehors du pays - un rare exemple d’un représentant iranien fournissant des preuves de la campagne soutenue du gouvernement contre le journalisme indépendant.
Hesameddin Ashena a publié sur Twitter les propos suivants : « Les médias de langue persane sont avertis par la présente d’éviter de s'engager dans la guerre psychologique liée à l'avion ukrainien et de coopérer avec les rebelles anti-iraniens. »
Bien que les responsables iraniens aient longtemps intimidé les journalistes iraniens de la diaspora et les médias en général, ils ont généralement évité de faire des menaces directes. Le tweet d'Ashena est donc une nouvelle onde de choc en un temps extrêmement instable pour l'Iran. La menace a également eu des répercussions parmi le public en général, suscitant des craintes que l'accès à Internet puisse être bloqué de nouveau comme en novembre, alors que la République islamique continue d'essayer de contrôler le récit des événements récents - depuis l’assassinat de Ghasem Soleimani et les représailles de l’Iran contre les bases américaines en Irak jusqu’à la ruée meurtrière à Kerman et au tragique crash de l’avion ukrainien, le 8 janvier 2020.
Le tweet est intervenu quelques heures après l'annonce par le Premier ministre canadien Justin Trudeau de la preuve selon laquelle l'avion de passagers ukrainien qui s'est écrasé près de Téhéran a été abattu par un missile iranien.
Les avertissements des autorités de la République islamique adressés aux professionnels des médias iraniens basés dans le pays sont généralement suivis de mesures sévères, notamment des assignations, des arrestations, des peines de prison ou d'autres condamnations, y compris l'interdiction par les tribunaux des activités des journalistes. Pour les médias en dehors des frontières de l'Iran, les menaces sont souvent suivies de la part des autorités de harcèlements des familles de ces journalistes, de sorte que même s'ils sont en mesure d'exercer leurs droits sociaux et civils à l'extérieur du pays, leurs proches soient empêchés de le faire.
Les Iraniens se sont exprimés sans surprise sur les médias sociaux au sujet de la menace d'Ashena, et la blague d'un satiriste a été largement partagée sur Twitter : « Envoyez vos agents en civil sur Twitter pour conclure les manifestations en deux jours ! »
Un journaliste a fait directement appel au conseiller : « M. Ashena ! Ne menacez pas un journaliste ! »
À la suite des manifestations de novembre 2019, le gouvernement iranien a accusé les médias étrangers et son personnel d’ « activités terroristes » après avoir rendu compte des manifestations et de la répression des autorités à leur encontre.
Pendant des années, les journalistes basés à l'étranger ont détaillé les pressions incessantes, la censure et le harcèlement auxquels eux et leurs collègues journalistes basés dans le pays sont confrontés. Ils ont décrit comment les responsables iraniens exécutent leurs menaces de manière obscure et indirecte, souvent verbalement ou parfois via des instructions « confidentielles » émises par le Conseil de sécurité nationale sur une question spécifique qu'il considère comme constituant un danger pour le pays. Les menaces directes et écrites sont rares, en particulier pour un responsable ayant des liens aussi étroits avec le président.
Les Iraniens ont été choqués par la répression sans précédent du régime contre la circulation de l'information lors des manifestations de novembre 2019. Cette décision a révélé que le gouvernement, le Guide suprême et les organes dirigeants du pays avaient atteint un nouveau niveau de confiance insensée et une volonté accrue de supprimer les libertés des peuples de manière très publique. La récente démonstration publique de contrôle d'Ashena semble soutenir cette confiance et cette offre de contrôle renouvelée. Le conseiller, qui s'est positionné comme un expert des médias et de la communication, a préféré l'action directe à une violence plus subversive et subtile. Il est désormais prouvé dans le domaine public que la République islamique mène une campagne soutenue contre les médias et qu'elle est prête à intensifier ses tactiques chaque fois qu'elle le juge nécessaire.
Source : Iran Wire
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