Le Centre pour les droits de l'homme en Iran (CDHI) condamne avec force la condamnation de l'éminente avocat de la défense iranienne, Nasrin Sotoudeh, lors d’une procédure judiciaire qui viole cruellement les normes internationales.
« Aucune tentative ne pourra dissimuler le fait que Sotoudeh est persécutée en raison de sa défense pacifique des droits humains en Iran, notamment le droit pour les femmes de choisir de porter ou non le hijab », a déclaré le directeur exécutif du CDHI, Hadi Ghaemi.
« La communauté internationale doit s'unir pour condamner avec force le traitement odieux infligé à cette courageuse avocate de la défense et exiger sa libération », a-t-il ajouté.
Sotoudeh, l’une des défenseuses des droits humains les plus virulentes de l’Iran, est emprisonnée depuis juin 2018, en partie pour avoir représenté une femme devant un tribunal qui avait été arrêtée pour avoir manifesté pacifiquement contre la loi officielle sur le hijab obligatoire.
Elle a été condamnée pour plusieurs chefs d'accusation mais n'a reçu ni verdict ni sa peine par écrit, a déclaré son mari Reza Khandan au CDHI, le 5 mars 2019.
Khandan a été condamné à six ans de prison en janvier 2019, en partie pour avoir publié des nouvelles sur Facebook sur l’affaire de son épouse. Reste à savoir ce qu'il adviendra de leurs deux enfants si leurs deux parents sont emprisonnés au même moment.
Sotoudeh a été jugée par contumace à Téhéran, le 30 décembre 2018, devant la 28ème chambre du tribunal révolutionnaire présidé par le juge extrémiste Mohammad Moghiseh. Elle a refusé de comparaître devant le tribunal parce qu'on lui avait refusé le droit de choisir son propre avocat et qu'elle voulait protester contre la procédure judiciaire injuste, selon Khandan.
On ignore sur quelles accusations Sotoudeh a été condamnée, mais les accusations dont elle faisait l'objet pourraient entraîner des décennies d'emprisonnement : « rassemblement et collusion contre la sécurité nationale », « propagande contre l'État », « appartenance au Centre des défenseurs des droits de l'homme, Groupe Legam [contre la peine capitale] et le Conseil national de la paix », « encouragement à la corruption et à la prostitution », « comparution devant la justice sans le hijab islamique », « trouble à l'ordre public » et « publication de mensonges dans l'intention de troubler l'opinion publique ».
Sotoudeh, 55 ans, est arrêtée depuis le 13 juin 2018, par des agents de la sécurité chez elle et a été emmenée à la prison d'Evine à Téhéran. Une fois à l'intérieur de la prison, Sotoudeh a été informée qu'elle purgerait une peine de cinq ans d'emprisonnement prononcée par contumace par le juge Moghiseh en 2015 et qu'elle faisait face à de nombreuses autres accusations.
En plus de défendre les femmes arrêtées pour avoir protesté contre la loi iranienne sur le hijab, Sotoudeh a également critiqué publiquement la décision du pouvoir judiciaire d’obliger les personnes inculpées pour des motifs politiques à choisir leur avocat sur une liste approuvée par le pouvoir judiciaire.
De 2010 à 2013, Sotoudeh a passé trois ans dans la prison d'Evine pour avoir défendu des affaires politiquement sensibles en Iran en tant qu'avocate de la défense.
En juillet 2018, l’Institut des droits de l’homme (IBAHRI) de l’Association internationale du Barreau a envoyé une lettre au Guide suprême iranien, Ali Khamenei, pour demander la libération immédiate de Sotoudeh.
Sotoudeh fait partie d’au moins sept avocats des droits humains qui ont été arrêtés en Iran en 2018 dans le cadre d'une répression croissante visant à limiter davantage le droit des détenus à bénéficier d’un conseil.
En septembre 2018, elle a reçu le prestigieux prix des droits de l'homme Ludovic Trarieux pour son engagement en faveur des droits humains et pour l'indépendance de la profession juridique. Sotoudeh a également reçu le prix Sakharov pour la liberté de pensée de la part du Parlement européen, en 2012.
En novembre 2018, l'ONU a réitéré « son inquiétude face à la condamnation par contumace et à l'emprisonnement ultérieur » de Sotoudeh et a appelé l'Iran à garantir son droit à un procès équitable, pour elle, son mari, et un compagnon de son époux, Farhad Meysami, militant des droits des femmes et à veiller à ce qu’ils ne soient pas « privés arbitrairement de leur liberté ».
Ajoutant sa voix à un appel qui a pris une ampleur internationale, le Parlement européen a adopté à une écrasante majorité une motion en décembre 2018 appelant les autorités iraniennes à « libérer immédiatement et sans condition » Sotoudeh.
« Dès le début, Sotoudeh a été contrainte de naviguer dans un système juridique kafkaïen dans lequel elle se voyait refuser le droit de choisir son propre avocat, tout en étant jugée par contumace », a déclaré Ghaemi.
« La justice iranienne a poursuivi Sotoudeh pour des accusations de sécurité nationale afin de lui faire clairement savoir qu'elle ne tolérerait pas la défense pacifique des droits humains par des militants ou leurs avocats », a-t-il ajouté. « Nous devrions tous dénoncer cette justice fantasque ».
Source : Centre pour les droits de l’homme en Iran
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