L’omniprésence des femmes dans les manifestations contre le régime prouve l’émergence d’une génération qui brigue l’Égalité.
CNRI Femmes - Chaque mois de novembre, dans le monde entier, on a une réflexion particulière sur la violence contre les femmes et sur la manière d’éradiquer ce problème dans le monde. En Iran, sous le régime misogyne des mollahs, la violence contre les femmes a dépassé toutes les limites. Même les experts du régime reconnaissent que l’Iran détient le premier rang en matière de violence contre les femmes.
Dans le monde entier, une femme sur trois a été victime de la violence. Ce chiffre est de 66%, soit les deux-tiers des femmes en Iran.
Les lois patriarcales, l’encouragement des mariages forcés et des mariages des enfants, l’incapacité du pouvoir à criminaliser la violence à l’égard des femmes et le fait que l’État soit le principal responsable de la violence à l’égard des femmes ont entraîné une augmentation alarmante de la violence domestique contre les femmes, avec un nombre croissant de femmes assassinées par leur conjoint et des centaines de victimes de crimes d’honneur.
Au début du mois de novembre, le parlement des mollahs a adopté un plan de croissance démographique qui est selon les experts des droits de l’homme des Nations unies “en contradiction flagrante avec le droit international“. Les experts des droits de l’homme ont appelé le régime iranien à abroger la nouvelle loi qui “restreint sévèrement l’accès à l’avortement, à la contraception, aux services de stérilisation volontaire et à l’accès aux informations sur ce sujet, en violation directe des droits fondamentaux des femmes en vertu du droit international.”
Les 23 et 25 novembre, deux femmes ont été pendues en Iran. Une femme non identifiée et son époux ont été pendus pour meurtre à la prison de Yasuj, dans le département de Kohgiluyeh et Chaharmahal-e Bakhtiari (sud-ouest de l’Iran). Deux jours plus tard, Maryam Khakpour a été pendue à la prison centrale de Qazvin (nord) pour des accusations liées à la drogue. Cette femme de 33 ans, mère d’un enfant de quatre ans, avait été condamnée à la lapidation pour adultère. Sa peine a ensuite été commuée en pendaison.
Le régime clérical a continué d’arrêter et de détenir des militantes des droits de l’homme. Les prisonnières politiques sont quant à elles victimes de nouvelles restrictions au mois de novembre, indique le Comité des femmes du CNRI. Ces restrictions ne se limitent pas aux prisonnières politiques et touchent toutes les femmes détenues. Au début du mois de septembre, la limitation du temps de promenade dans le quartier des femmes de la prison centrale d’Urmia (une prison surpeuplé et démunie de dispositifs de climatisation) a entraîné une manifestation de colère des détenues.
Face à cette vie de misère, les femmes iraniennes sont déterminées à devenir maître de leur destin.
En novembre dernier, les soulèvements d’Ispahan et de Shahrekord ainsi que deux mouvements de protestation nationale des enseignants et de nombreuses autres manifestations ont été marqués par une omniprésence des femmes sur le devant de la scène.
Les voix et les poings levés des femmes étaient partout !
Le vendredi 19 novembre, des dizaines de milliers de personnes ont rejoint les agriculteurs d’Ispahan au 12e jour d’un sit-in de protestation.
Les manifestants ont couvert une grande partie du lit asséché de la rivière Zayanderud. Des milliers de femmes se trouvaient parmi les manifestants. Elles ont scandé, entre autres, ” Fusils et chars ne servent à rien, les mollahs doivent disparaître”, “Ni Gaza ni Liban, ma vie pour l’Iran”, “Si l’eau ne coule pas, ce sera le jour du jugement”, “Notre ennemi est ici, ils mentent en disant que c’est l’Amérique”, “Gare au jour où les agriculteurs appellent au soulèvement”.
Craignant que la manifestation ne s’étende à d’autres régions d’Ispahan et d’Iran, le régime clérical a coupé l’Internet pour empêcher la diffusion des images de cette vaste manifestation de soutien aux agriculteurs d’Ispahan.
Les agriculteurs ont installé des tentes sur le lit asséché de la rivière Zayanderud et ont commencé un sit-in le 8 novembre pour réclamer leur droit d’accès à l’eau. Ils veulent rétablir le débit de la rivière pour aider à irriguer les terres agricoles devenues sèches et stériles.
La mauvaise gestion par les mollahs des eaux en Iran a entraîné la destruction de l’agriculture et de l’élevage. De nombreux agriculteurs ont dû vendre leur bétail pour survivre.
La situation d’Ispahan est particulièrement dramatique, car la rivière Zayanderud, qui était le plus grand cours d’eau du plateau iranien, s’est asséchée.
Une semaine plus tard, le vendredi 26 novembre, des milliers de femmes ont rejoint le flot des manifestants pour défier et repousser l’assaut des forces de l’ordre contre les agriculteurs d’Ispahan.
Selon des témoins, la présence massive de femmes initiatrices des slogans et de la résistance contre les forces de l’ordre, a marqué les manifs d’Ispahan. Leurs voix et leurs slogans étaient partout, appelant à l’unité contre l’ennemi numéro 1 de la nation. Elles ont juré de ne pas partir “jusqu’à ce que l’eau soit rendue à la rivière Zayanderud”.
Le vendredi 26 novembre 2021, des centaines de membres des forces de sécurité ont pris d’assaut les manifestants pacifiques qui voulaient se rassembler près du pont Pol-e Khajoo, dans le lit asséché de la rivière Zayanderud. Des milliers de personnes se sont précipitées pour soutenir les manifestants et ont affronté les unités spéciales anti-émeutes. La population a également affronté la police dans les rues d’Ispahan.
Les forces de sécurité ont dispersé les manifestants, mais ceux-ci se sont de nouveau rassemblés et ont finalement forcé les forces de sécurité à battre en retraite.
Les manifestations ont eu lieu malgré l’attaque du régime clérical et l’incendie des tentes du sit-in des agriculteurs à 4 heures du matin jeudi, et malgré l’envoi des SMS aux habitants d’Ispahan les mettant en garde contre toute participation à la manifestation.
La manifestation que les agriculteurs avaient entamée il y a deux semaines pour réclamer leur droit à l’accès à l’eau de Zayanderud a pris un tour politique, et les jeunes manifestants en colère, parmi lesquels de nombreuses femmes, ont commencé à scander “Mort à Khamenei !”.
Les images en provenance d’Iran montrent la présence généralisée de femmes dirigeant la foule avec leurs slogans et se précipitant au secours de ceux qui sont battus ou arrêtés par les forces de l’ordre. Les vidéos ont montré les méthodes violentes des forces de sécurité pour disperser la foule. Elles montrent également plusieurs manifestants touchés à la tête et dans le dos par des tirs de fusils à plomb.
Les troupes gouvernementales se sont acharnés sur les manifestants par des tirs de lacrymogène et des fusils à plomb. Une quarantaine de manifestants ont perdu un œil lors de ces tirs et au moins une centaine d’autres ont été blessés. Quelques 300 manifestants, dont des adolescents, ont été interpellés.
Les habitants de Chahrekord (à l’ouest d’Ispahan) se sont également levés pour soutenir les agriculteurs d’Ispahan et réclamer leur part d’eau.
Les femmes ont joué un rôle très actif lors des quatre jours de protestations du 21 au 24 novembre, et ont appelé à la poursuite des protestations.
Les forces de l’ordre ont tenté d’empêcher la propagation des manifestations en prenant le contrôle du microphone sur la plate-forme des discours. Les agents en civil ont affronté les manifestants qui voulaient s’emparer du micro et les ont jetés hors de la plate-forme. Mais les manifestants ont continué à marcher, en scandant des slogans contre le pouvoir en place, et se sont dirigés vers le siège du gouverneur.
“Tant que le problème de l’eau causé par la mauvaise gestion de la République islamique et la mafia de l’eau ne sera pas résolu, nous n’abandonnerons pas et nous ne quitterons pas la rue”, ont juré les manifestants.
La pénurie d’eau due à la mauvaise gestion du gouvernement
Les experts en matière en Iran ont imputé la sécheresse qui sévit depuis longtemps non seulement à des précipitations inférieures à la normale, mais à des années de mauvaise gestion des ressources en eau du pays par le pouvoir en place.
L’installation d’une fabrique d’acier (Mobarakeh Steel) en 1991 à Ispahan et d’une autre (Alloy Steel) en 1999 à Yazd sont parmi les mesures qui ont conduit à une pénurie d’eau, écrit la presse d’État. (Le journal d’État Mostaghel – 22 novembre 2021)
La production de chaque kilo d’acier consomme environ 30 000 litres d’eau. Outre l’assèchement de la rivière Zayandehrud, les nappes phréatiques risquent également de s’assécher. (Le journal d’État Setareh Sobh – 22 novembre 2021)
Bien entendu, les médias du régime clérical ne disent rien de l’industrie nucléaire et de l’industrie des missiles, qui sont situées dans les mêmes zones et consomment une grande quantité de l’eau de Zayanderud.
Le pouvoir en place ne peut résoudre ces problèmes conflictuels et trouve la seule solution dans la répression violente des manifestants.
Deux manifestations nationales des enseignants
La présence des femmes a été particulièrement remarquée aussi dans les manifestations nationales des enseignants en Iran. Dans la plupart des villes, les femmes étaient largement présentes et dirigeaient souvent les slogans.
Les enseignants iraniens ont organisé deux manifestations nationales les 11 novembre et 2 décembre 2021, dans respectivement 53 et 66 villes du pays.
Les enseignants protestent contre leurs conditions de vie précaire, leurs bas salaires et la hausse vertigineuse des prix. Ils contestent également le mépris du régime clérical pour leurs revendications. Ils ont juré de ne pas céder jusqu’à ce qu’ils obtiennent leurs droits.
Dans certaines villes, les enseignants protestataires portaient des photos des victimes du soulèvement de novembre 2019.
Les forces de sécurité ont attaqué les manifestants à Téhéran et déchiré leurs photos. Elles ont également empêché de filmer les manifestations. Plusieurs enseignants ont été interpellés manu militari.
À Machhad (nord-est), les forces de sécurité ont utilisé la violence pour disperser les enseignants.
À Gorgan (nord), les enseignants ont couvert symboliquement un œil en solidarité avec les manifestants d’Ispahan qui ont perdu l’œil vendredi dernier.
Dans certaines villes, dont Ardabil (nord-ouest), les enseignants ont tenu leur manifestation malgré la neige et la rigueur du climat.
À Ispahan, les femmes ont scandé : “Enseignant debout contre la discrimination”.
À Racht (nord), elles ont scandé : “Les enseignants emprisonnés doivent être libérés !”.
À Tabriz (nord-ouest), elles ont scandé : “Les enseignants restent vigilants contre la discrimination.”
Les protestations nationales des enseignants iraniens se sont intensifiées en septembre afin d’obtenir leurs revendications légitimes en matière de salaires et de conditions de vie décentes. La plupart des enseignants ont des conditions de vie très précaires avec des salaires qui représentent un quart ou un tiers du seuil de pauvreté.
Les femmes sont de plus en plus présentes dans la direction des protestations en Iran. Il s’agit bel et bien de l’émergence d’une génération qui brigue l’égalité. Le moins que l’on puisse dire c’est qu’elles méritent le soutien de tous les défenseurs des droits des femmes dans leur lutte pour la liberté et l’égalité.
Plus d’Infos : https://women.ncr-iran.org/fr/2021/12/05/lomnipresence-des-femmes-dans-les-manifestations-en-iran/
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