Le récit de ces témoins oculaires révèle la barbarie du régime iranien et en même temps montre la détermination d’une génération de jeunes militants épris de liberté. Ils n’ont pas abandonné leurs idéaux face aux mollahs, malgré les tortures et le coût élevé en sacrifices et d’abnégations.
Assadollah Nabavi a déclaré dans son témoignage :
« Je m’appelle Assadollah Nabavi et j’ai passé 13 ans en prison pour avoir soutenu le mouvement des Moudjahidine du Peuple d’Iran [OMPI]. J’ai passé quatre ans de mon emprisonnement dans une prison de la province de Semnan et j’ai passé le reste à la prison d’Evine. Je suis l’un des témoins du massacre de 1988. Tous mes amis dans la prison ont été exécutés de juillet à août 1988. Seuls trois d’entre nous ont survécu.
Je voudrais faire deux remarques sur la base de ce dont j’ai été témoin et de mes recherches sur le rôle qu’Ebrahim Raïssi et les Commissions de la mort ont joué dans le massacre des prisonniers. Début juillet 1988, lorsque Raïssi et la Commission de la mort ont commencé le massacre dans les prisons de Téhéran, le massacre a commencé dans d’autres provinces.
Le 30 juillet 1988, ils ont commencé progressivement à faire exécuter mes amis. Au début, nous ne savions pas qu’ils étaient sur le point d’être exécutés, mais nous avons découvert plus tard quel était le plan du régime.
Ce dont j’ai été témoin lors du massacre de 1988 me fait toujours mal et est douloureux pour moi. Mais je voudrais partager deux souvenirs de cette période pour illustrer la brutalité du régime et de ses Gardiens de la Révolution.
Lorsque le massacre a commencé, j’ai été transféré à l’isolement. Je me suis réveillé à minuit en entendant des voix à l’extérieur de la cellule. Il y avait un petit trou dans la porte qui montrait l’extérieur de la cellule. J’ai vu les gardes porter une femme torturée en utilisant le même chariot qu’ils utilisaient pour apporter de la nourriture pour nous.
Je pouvais voir la trace de sang sur le sol à partir de ce trou, et j’entendis la femme gémir doucement. Les gardes essayaient de chuchoter pour que personne ne puisse comprendre ce qui se passait. Ils l’ont jetée dans une cellule à côté de moi, l’ont attaquée et lui ont pris son écharpe et son tchador.
Quand les gardes sont partis, j’ai essayé de communiquer avec elle en code morse. Après de nombreux essais, c’était vers l’aube que je pouvais communiquer avec elle. Elle s’appelait Aqdas Hemmati. Elle avait été sévèrement torturée. Ses jambes étaient lacérées, une de ses mains était complètement paralysée et elle était à peine en vie. Elle m’a dit qu’ils l’interrogeaient à cause de son lien avec une autre femme en prison. En fait, ils demandaient des informations sur l’autre femme.
Après que nous avons communiqué ensemble cette nuit-là, elle a de nouveau été emmenée pour interrogatoire. Elle a été sévèrement battue et flagellée. La troisième nuit, quand elle est revenue, elle m’a dit que l’interrogateur lui avait retiré son bandeau et lui a dit que c’est OK, tu peux me voir. Elle m’a dit que c’était un signe qu’ils voulaient l’exécuter. C’est vraiment arrivé. Ils l’ont emmenée à 2 h 30 du matin, et elle n’est jamais revenue. Ce n’est qu’un exemple de ce qui s’est passé dans une petite prison telle que Semnan. J’ai été en isolement cellulaire jusqu’à la fin de 1988.
Maintenant, je voudrais parler du rôle de Raïssi dans le massacre. Un jour, un garde a ouvert la porte et m’a dit de me préparer et que « Haj Agha » arrivait. Je ne comprenais pas qui il voulait dire par Haj Agha. Je marchais lorsque la porte s’est ouverte et une délégation est entrée. La cellule était très petite, mesurant 2 mètres sur 1,5 mètres. J’ai vu l’un d’eux, qui était un clerc, et l’autre était Kalat Mollaie, chef de l’organisation pénitentiaire de Semnan.
Le mollah m’a demandé, pourquoi es-tu toujours en vie ? Je lui ai dit : je devrais te demander pourquoi je suis en vie. Kalat Mollaie a dit au mollah : c’est celui dont je vous ai parlé.
Après quelques questions supplémentaires, ils ont fermé la porte et sont partis. Quand j’ai vu plus tard la photo de Raïssi, j’ai réalisé que le mollah était lui. Après les exécutions dans les prisons d’Evine et de Gohardasht, Khomeini a confié une mission spéciale à Raïssi et Nayeri au sujet de trois prisons. Khomeini pensait que le massacre n’était pas complètement terminé. L’une de ces prisons était la prison de Semnan, une autre la prison de Dorood, et je ne me souviens plus du nom de la troisième prison maintenant. Khomeiny leur avait dit d’exécuter quiconque y était détenu.
En d’autres termes, Raïssi qui avait massacré tous les prisonniers dans les prisons d’Evine et de Gohardasht, cherchait maintenant à achever le massacre dans les autres prisons du pays.
C’est scandaleux que Raïssi soit devenu aujourd’hui le président du régime. Khamenei l’a sorti des urnes pour contrer la crise existentielle de son régime.
Je voudrais souligner que la communauté internationale ne devrait pas accepter une telle personne qui a été impliquée dans le meurtre de milliers de prisonniers politiques. C’est une honte pour l’humanité qu’un meurtrier invétéré, quelqu’un qui a commis un crime contre l’humanité avec le massacre de prisonniers politiques et soit autorisé à s’adresser à l’Assemblée générale de l’ONU.
En tant que témoin du massacre de 1988, je demande à toutes les organisations de défense des droits de l’homme et aux institutions internationales de ne pas permettre à cette personne de parler en tant que représentant du peuple iranien. »
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