Les statistiques concernant le massacre de 1988 sont assez choquantes. Mais la gravité de ce crime contre l’humanité est rendue encore plus évidente par les témoignages qui décrivent la manière dont Raïssi et d’autres responsables examinaient mécaniquement une liste de victimes potentielles, prononçant des condamnations à mort après des procès sommaires qui ne duraient pas plus d’une minute, puis envoyant les prisonniers condamnés à la mort par pelotons de six ou plus.
Seize témoignages de ce type ont récemment été publiés sur le site web du Conseil national de la Résistance iranienne.
Les déclarations vidéo et les transcriptions qui les accompagnent ont été produites dans le cadre d’une nouvelle phase de cette campagne qui a vu le jour à la suite du simulacre d’élection présidentielle qui a porté Raïssi au pouvoir le 18 juin.
De nombreux appels ont été lancés pour qu’une enquête soit menée sur le massacre et que des poursuites soient engagées contre les principaux responsables devant la Cour pénale internationale. Diverses commissions législatives d’Europe et d’Amérique ont ainsi adopté des résolutions condamnant le pire crime contre l’humanité commis par Téhéran et affirmant leur soutien au mouvement d’opposition qui s’emploie à le dénoncer. Mais malheureusement, ces développements se sont traduits par très peu d’actions officielles de la part de gouvernements occidentaux entiers.
Loin de tenir Raïssi pour responsable des meurtres de masse et de la répression violente de la dissidence, certains gouvernements occidentaux sont même allés jusqu’à envoyer des délégations pour accueillir son administration et lui conférer une légitimité sur la scène mondiale, alors que cette même considération leur est refusée chez eux.
Moins de dix pourcent des électeurs éligibles en Iran ont participé à l’élection fictive du 18 juin, après des semaines d’appels au boycott. Bien que les autorités du régime nient l’ampleur du boycott, elles reconnaissent que la majorité des Iraniens n’ont pas participé à l’élection.
Le Guide Suprême du régime, Ali Khamenei, a désigné Raïssi comme prochain président après l’avoir nommé à la tête du système judiciaire à partir de début 2019. Cette nomination a finalement permis de dissiper tout doute qui aurait pu exister quant à la raison de la décision de Khamenei de promouvoir Raïssi au deuxième poste le plus élevé de la nation. En tant que chef du pouvoir judiciaire, Raïssi a aggravé son héritage de violations des Droits de l’Homme en supervisant des aspects clés de la pire répression de la dissidence dans le pays depuis de nombreuses années.
En novembre 2019, des Iraniens de tous horizons ont organisé un soulèvement antigouvernemental qui a touché près de 200 villes et villages. C’était le deuxième de ce type, après avoir repris les slogans tels que « A bas le dictateur » qui ont défini les protestations à l’échelle nationale en décembre 2017 et janvier 2018. Ce premier soulèvement s’est soldé par des milliers d’arrestations et une soixantaine de morts, dont plusieurs morts par torture. Mais cela a pâli en comparaison de la réponse du régime au deuxième soulèvement, qui a inclus des fusillades de masse qui ont tué environ 1 500 personnes en quelques jours. Pendant les mois qui ont suivi, le système judiciaire de Raïssi a mené une campagne de torture systématique à l’encontre d’un grand nombre des 12 000 militants connus ou présumés qui avaient été arrêtés à la suite du soulèvement.
Ces violations des Droits de l’Homme ont été rapidement mises en lumière, de même que le massacre de 1988, lorsqu’il est apparu clairement que Raïssi était sur le point d’accéder à la présidence. Mais le peuple iranien a certainement compris que Khamenei a annoncé son soutien à Raïssi non pas en dépit de ses attaques contre la population civile, mais spécifiquement parce que celles-ci signifiaient qu’il était prêt à affronter un mouvement d’opposition dirigé par l’OMPI à une échelle encore plus grande à l’avenir.
Si cela se produit, les gouvernements occidentaux porteront la responsabilité d’avoir fourni à l’administration Raïssi et au régime dans son ensemble des raisons de croire que leur impunité reste intacte.
Les défenseurs des Droits de l’Homme du monde entier doivent s’efforcer de faire en sorte que les chefs de gouvernement et les délégués des Nations unies soient pleinement conscients à la fois de l’ampleur du massacre de 1988 et de la gravité du traumatisme dont souffrent encore ceux qui ont survécu longtemps. Aucun gouvernement ou organisme international ne devrait être capable d’entendre des récits de prisonniers politiques regardant leurs amis et collègues être emmenés en masse et fermer les yeux sur le fait que l’un des principaux auteurs de cette souffrance représente aujourd’hui l’Iran auprès du monde extérieur.
Aucune personne qui ferme les yeux sur ce fait ne devrait continuer à être prise au sérieux par la suite en tant que défenseur des principes démocratiques ou des Droits universels de l’Homme. Alors que l’ère Raïssi commence pour de bon, la communauté internationale doit enfin être contrainte de faire un choix entre un engagement amical face à ces violations des Droits de l’Homme ou un soutien politique à leurs victimes. Au fur et à mesure que les tensions entre le Téhéran et son peuple s’accentueront au cours de cette ère, chaque grande puissance mondiale devra choisir un camp ou l’autre.
Aucun commentaire:
Enregistrer un commentaire