vendredi 8 octobre 2021

Les femmes et la peine de mort en Iran

 CSDHI – La Journée mondiale contre la peine de mort de 2021 est dédiée aux femmes. A celles qui risquent d’être condamnées à mort, qui ont été condamnées à mort, qui ont été exécutées. Et à celles qui ont vu leur peine de mort commuée, exonérée ou graciée. En observation de la journée et du thème de cette année, Iran Human Rights fournit un document sur les femmes exécutées en Iran au cours des 12 dernières années (2010-2021). Les exécutions de cette période ne sont en aucun cas représentatives de l’histoire complète de la République islamique d’Iran en matière d’exécution de femmes. Le nombre de prisonnières politiques exécutées dans les années 1980 doit être reconnu en raison de leur volume et de leur nature odieuse. Mais aujourd’hui encore, il existe de nombreuses preuves du traitement cruel et inhumain des femmes détenues, mises en évidence dans ce document.

L’un des principaux bourreaux de femmes dans le monde

Aujourd’hui, l’Iran compte le plus grand nombre d’exécutions après la Chine. Il est l’un des principaux bourreaux de femmes au monde. Sur les 16 femmes qui auraient été exécutées dans le monde en 2020, neuf l’ont été en Iran. Comme pour toutes les exécutions, la majorité des exécutions de femmes sont réalisées secrètement. Lorsqu’elles sont signalées, les femmes sont souvent dépeintes comme des mères diaboliques, des femmes fatales et des sorcières. La réalité est cependant émaillée de discriminations législatives et sociales, d’inégalités et de tabous, que ce document vise à examiner.

À l’occasion de la Journée mondiale contre la peine de mort 2021, IHRNGO réitère son appel pour que l’Iran établisse un moratoire sur l’application de la peine de mort comme première étape vers l’abolition de la peine de mort. Et pour que les femmes puissent bénéficier des mêmes droits civils et de l’égalité devant la loi. Mahmood Amiry-Moghaddam, directeur de l’IHRNGO, a déclaré : « En 2021, le monde ne devrait pas tolérer les lois qui légitiment la peine de mort. C’est le châtiment le plus cruel, inhumain et discriminatoire de notre époque. En cette Journée mondiale contre la peine de mort, soyons la voix des femmes dans le couloir de la mort qui sont pour la plupart inconnues et issues de milieux marginalisés.

Faits et chiffres

Les statistiques suivantes concernent les exécutions de femmes enregistrées par Iran Human Rights entre le 1er janvier 2010 et le 10 octobre 2021.

  • Au moins 164 femmes exécutées.
  • Les exécutions de femmes représentent 2,57 % de toutes les exécutions au cours de la même période.
  • 31% (51) des exécutions furent annoncées par des sources officielles et 69% (113), réalisées secrètement ou non annoncées.
  • Au moins 86 femmes exécutées sur des accusations liées à la drogue.
  • Au moins 60 femmes exécutées pour meurtre.
  • Sur les trois femmes exécutées pour des raisons de sécurité, deux l’ont été pour espionnage.
  • La troisième femme (Shirin Alamhooli) a été exécutée sous l’accusation de moharebeh (inimitié envers Dieu) pour son appartenance à un groupe d’opposition kurde.
  • Les charges retenues contre 15 de ces femmes sont inconnues.
  • Le nombre moyen de femmes exécutées chaque année pour meurtre a doublé après la modification de la loi antidrogue en 2017.
  • Une femme (Zahra Bahrami) a été exécutée pour des motifs liés à la drogue après avoir été arrêtée en relation avec les manifestations de 2009 et avoir été condamnée à l’origine à une peine de moharebeh (inimitié envers Dieu).
Exécution des femmes entre 2010 et 2021

Contexte

Le contexte et l’historique des exécutions de femmes en Iran doivent être examinés à travers le cadre législatif de la peine de mort en général, et des violations des droits et des problèmes sociaux auxquels les femmes sont spécifiquement confrontées. Un rapport complet sur la peine de mort en Iran est publié chaque année par Iran Human Rights et ECMP (Together Against the Death Penalty),. Il fournit une ventilation détaillée du cadre législatif et des procédures. Une version plus condensée relative à l’exécution de femmes au cours de cette période est fournie aux fins du présent rapport.

Charges retenues : infractions liées à la drogue ou meurtre

La peine de mort est sanctionnée pour un certain nombre de crimes qui ne peuvent être considérés comme les « crimes les plus graves ». Ils ne répondent pas aux dispositions du Pacte international relatif aux droits civils et politiques (PIDCP), ratifié par l’Iran en 1975. Parmi les cas enregistrés entre 2010 et 2021, toutes les charges connues contre les 164 femmes, sauf deux (espionnage), concernaient des infractions liées à la drogue et des meurtres. Une fois arrêtés, les aveux sont le moyen le plus courant de prouver la culpabilité dans les cas de peine de mort. En outre, dans les cas d’une qisas, le témoignage d’une femme est considéré comme sans valeur et elle n’a pas le droit de témoigner. Tous les prisonniers du couloir de la mort avec lesquels l’IHRNGO a été en contact ont témoigné avoir subi des tortures pour avouer le crime dont ils étaient accusés. Cela ne se limite pas seulement à ceux qui sont accusés de crimes politiques ou liés à la sécurité. Presque tous les prisonniers, arrêtés pour des délits liés à la drogue étaient maintenus en isolement et soumis à des tortures physiques pendant la phase d’enquête qui a suivi leur détention, tout en se voyant refuser l’accès à un avocat.

Leurs aveux extorqués sont les seules preuves retenues par les juges

Dans de nombreux cas, les aveux extorqués en détention sont les seules preuves sur lesquelles le juge fonde son verdict. La torture est également utilisée dans d’autres affaires pénales impliquant un viol ou un meurtre, lorsqu’il n’y a pas suffisamment de preuves contre le suspect.

Le point important à noter est le déni systématique des procédures légales, les procès inéquitables, le recours à la torture et à la contrainte, les aveux forcés et l’absence d’un système judiciaire transparent et indépendant en Iran. Les charges retenues dans chaque cas sont donc le récit et les accusations officielles des autorités iraniennes. Aucune source indépendante ne les a confirmées.

Inégales devant la loi et discriminées socialement

Les femmes sont également confrontées à l’inégalité devant la loi et à la discrimination sociétale avant même d’avoir commis un quelconque crime. Comme dans les statistiques mondiales, la pauvreté est un facteur sous-jacent dans les cas de peine de mort. Cela est particulièrement évident dans les exécutions liées à la drogue. Mais il s’étend également aux cas de meurtre. Traditionnellement, les hommes sont considérés comme les soutiens de famille et lorsque les femmes de la classe ouvrière, qui n’ont pas reçu d’éducation ou de compétences professionnelles, doivent élever seules leurs enfants, sans aucun soutien de l’État, elles sont contraintes de faire ce qu’elles peuvent pour survivre. Lorsqu’une mère célibataire de cinq enfants, dont un enfant handicapé, a été exécutée pour des raisons liées à la drogue, sa famille n’avait même pas les moyens de l’enterrer. Et son cas est loin d’être isolé ou unique.

Des femmes-enfants mariées exécutées entre 2010 et 2021

Sur le plan social, les femmes sont également confrontées aux mariages forcés. Six enfants mariés figuraient parmi les femmes exécutées entre 2010 et 2021 et une femme (Safieh Ghafouri, accusée de meurtre) était une aroose-khoon-bas, une épouse offerte par une tribu à la tribu adverse pour mettre fin à l’effusion de sang. Au sein du mariage lui-même, une femme n’a pas le droit de divorcer, même dans les cas de violence domestique. Celle-ci est dissimulé dans les codes culturels et le langage. Dans 66% des cas de meurtres connus, les femmes ont été condamnées pour avoir tué leur mari ou partenaire. Les maladies mentales restent également un sujet tabou, avec des soins et des traitements inadéquats au sein de la société iranienne en général.

Source : IHR

Aucun commentaire:

Enregistrer un commentaire