mercredi 20 mars 2019

Iran : Défiant les procédures judiciaires injustes, Nasrin Sotoudeh refuse de faire appel


condamnation nasrin sotoudeh iran Refusant de légitimer le processus judiciaire injuste en Iran, au cours duquel des accusés inculpés pour des motifs politiques sont condamnés à de longues peines de prison sans procès équitable, l'avocate de la défense Nasrin Sotoudeh a déclaré qu'elle ne ferait pas appel de sa peine d'emprisonnement.

Sotoudeh a également fourni des notes sur son verdict (on a refusé de lui remettre une copie de celui-ci) à son mari. Selon ces notes, Sotoudeh sera tenue de purger 12 ans sur les 33,8 ans et 148 coups de fouet auxquels elle a été condamnée en février 2019 (sous réserve d'appel). On ignore si la condamantion de cinq ans déjà prononcée sera ajoutée à cette peine.
« Lors de la visite, le 1e 17 mars 2019, Nasrin a déclaré qu'elle n'acceptait ni le verdict ni le système judiciaire iranien, elle ne va donc pas le contester et elle refuse d'être présente devant la Cour d'appel exactement comme elle a été absente du procès préliminaire », a déclaré son mari, Reza Khandan, le 18 mars, au Centre pour les droits de l'homme en Iran (CDHI).
Lors d'une conversation téléphonique le 11 mars au cours de laquelle elle n'a été autorisée à parler que brièvement, Sotoudeh a déclaré à son mari que la branche 28 du tribunal révolutionnaire de Téhéran l'avait condamnée à 33 ans de prison et à 148 coups de fouet.
Conjuguée à une condamnation antérieure de cinq ans de prison qui a également été prononcée par contumace, sa peine totale s’élevait à 38 ans de prison et 148 coups de fouet, a déclaré Sotoudeh à Khandan le 11 mars. (Khandan a également été condamné à six ans de prison en janvier 2019 en partie pour avoir posté des mises à jour de l’affaire de son épouse sur Facebook. Reste à savoir ce qui va arriver à leurs deux enfants si leurs deux parents sont emprisonnés au même moment).
Selon l’article 134 du Code pénal islamique iranien, dans les affaires impliquant plusieurs condamnations, telles que celle de Sotoudeh, il ne faut purger que la peine maximale pour l’inculpation la plus lourde. Après l’application de l’article 134 à son cas, la peine de Sotoudeh s’élèverait à 12 ans de prison, a-t-elle dit à Khandan. Encore une fois, on ne sait pas si la peine de cinq ans découlant d’une condamnation en 2015 serait ajoutée à ces douze ans.
Toutefois, le 5 mars, le juge président Mohammad Moghiseh a déclaré aux médias officiels que Sotoudeh devrait purger une peine de sept ans d'emprisonnement. À ce jour, aucun responsable judiciaire n'a précisé ses propos. Prises ensemble, ces divergences ont créé de la confusion et fait en sorte que des peines variables soient rapportées par les médias internationaux.
La condamnation et le jugement de Sotoudeh reposent sur sa défense pacifique des droits humains en Iran, notamment en participant à des manifestations pacifiques et en préconisant la modification des lois qui permettent de poursuivre l’activisme pacifique en tant qu’infraction à la sécurité nationale.
Un examen de ses peines réunies met en lumière la profondeur de la répression en Iran.
En la condamnant à un total de 38 ans de prison, sur lesquels elle purgera douze ans (sous réserve de recours), le pouvoir judiciaire iranien avertit la société civile que toute activité pacifique - y compris assister à des manifestations, donner des interviews à des médias ou critiquer l'État sur ses politiques telles que la peine de mort - pourraient conduire en prison.
Sotoudeh publie des notes de verdict, une copie physique lui a été refusée
Sotoudeh a pris des notes sur la base de son verdict écrit (une copie physique lui a été refusée). Une semaine plus tard, elle les a données à son mari, qui les a publiées sur Facebook.
Dans les affaires politiquement sensibles, les tribunaux iraniens refusent aux accusés des copies écrites de leurs verdicts. Au lieu de cela, ils sont uniquement autorisés à voir le verdict et à prendre des notes manuscrites en présence d'un représentant de la justice.
Selon les notes de Sotoudeh, son verdict indique qu'elle a été condamnée à 33,8 années de prison et 148 coups de fouet sur les sept chefs d'accusation suivants :
« Le tribunal a condamné le requérant à sept ans et six mois d'emprisonnement pour réunion et collusion avec l'intention de commettre une infraction contre la sécurité nationale fondé sur l'article 610 du Code pénal islamique »
« Et en ce qui concerne la propagande contre l'État, la condamne à un an et six mois de prison, y compris le temps passé en détention, sur le fondement de l'article 500 du Code pénal islamique »
« Et en ce qui concerne son appartenance à l'organisation légale Legam [groupe contre la peine capitale], elle est condamnée à sept ans et six mois de prison, y compris le temps passé en détention, en vertu de l'article 499 du Code pénal islamique.
« Et pour avoir encouragé la corruption et la prostitution, la condamne à 12 ans de prison, y compris le temps passé en détention, en vertu de l'article 639 du Code pénal islamique ».
« Et pour être comparue en public sans le hijab islamique, elle est condamnée à subir 74 coups de fouet, conformément à l'article 638 du code pénal islamique ».
« Et pour avoir publié des mensonges dans l'intention de troubler l'opinion publique, elle a été condamnée à trois ans de prison et à 74 coups de fouet, y compris le temps passé en détention, en vertu de l'article 698 de la loi islamique ».
« Et pour avoir perturbé l'ordre public, elle est condamnée à deux ans de prison, y compris le temps passé en détention, en vertu de l'article 618 du Code pénal islamique »
Le verdict incluait également cette déclaration, selon les notes de Sotoudeh : « Ce verdict, prononcé par contumace, peut faire l'objet d'un appel dans un délai de 20 jours… L'article 134 du Code pénal islamique sera appliqué ».
Après l'application de l'article 134, la peine de 33,8 ans d'emprisonnement prononcée contre Sotoudeh serait remplacée par 12 ans d'emprisonnement pour « incitation à la corruption et à la prostitution ». (On ne sait pas si elle serait forcée de purger une peine supplémentaire de cinq ans. Condamnation de 2015).
La peine de 12 ans a été prononcée pour la défense pacifique de Sotoudeh pour le droit d’une femme de comparaître en public sans hijab. Toutes les charges retenues contre Sotoudeh étaient fondées sur son plaidoyer pacifique en faveur des droits humains et des droits civils en Iran.
Le CDHI a documenté de nombreux cas dans lesquels de nombreux autres défenseurs des droits humains ont été condamnés à de longues peines de prison en Iran, notamment Narges Mohammadi, Atena Daemi, Maryam Akbari-Monfared, Arash Sadeghi et Saeed Shirzad.
Sotoudeh refuse de légitimer un processus judiciaire injuste
Khandan a déclaré au CDHI que son épouse avait « renoncé à son droit de choisir un avocat pour deux raisons ».
« Premièrement, en raison de la note relative à l'article 48 [du Règlement de procédure pénale], qui dit que les prisonniers accusés de délits contre la sécurité nationale ne peuvent choisir que des avocats agréés par le chef du pouvoir judiciaire », a-t-il déclaré.
« Deuxièmement parce qu'en 2010, quatre des six avocats qui l'avaient représentée ont été poursuivis et elle ne veut plus causer de problèmes à ses collègues », a-t-il ajouté.
La condamnation de Sotoudeh, une éminente avocate spécialisée dans les droits de la personne, a fait l’objet d’une condamnation internationale généralisée.
Parler de questions politiquement sensibles en Iran pourrait entraîner des arrestations et des emprisonnements, mais certains militants des droits humains basés à l’intérieur du pays ont également demandé sa libération.
« La peine de prison prononcée à l'encontre de Mme Sotoudeh, à l'instar des centaines de verdicts similaires prononcés ces deux dernières années par deux ou trois tribunaux [dans le système du tribunal révolutionnaire], est déplorable et manque de fondement juridique », a tweeté Emad Baghi, éminent journaliste et défenseur des droits humains, le 13 mars.
« Il est à espérer, du moins pour préserver sa dignité, que le pouvoir judiciaire annulera ce verdict dans la procédure d'appel », a-t-il ajouté.
Source : Le Centre pour les droits de l’homme en Iran

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