– Les données du Centre des statistiques d’Iran révèlent qu’en 2023, sur les 24 millions de travailleurs que compte le pays, seuls 4,6 millions étaient des femmes, soit à peine 16% de la main-d’œuvre totale. Cette statistique souligne les difficultés persistantes auxquelles sont confrontées les femmes pour entrer et rester sur le marché du travail en Iran.
Malgré des changements sociaux progressifs, la participation des femmes à la main-d’œuvre continue d’être entravée par divers obstacles enracinés dans des opinions traditionnelles et conservatrices. Ces obstacles se manifestent souvent par des formes de discrimination à la fois subtiles et manifestes, limitant l’accès des femmes aux opportunités professionnelles et à l’évolution de leur carrière.
Obstacles culturels et juridiques
L’un des principaux défis auxquels les femmes sont confrontées découle des normes culturelles profondément ancrées qui donnent la priorité au foyer et à la maternité sur les aspirations professionnelles. Les attitudes conservatrices confinent souvent les femmes à des rôles non professionnels, ce qui rend difficile la poursuite d’une carrière en dehors du foyer. Ces attentes sociétales restent l’un des principaux obstacles à la présence des femmes sur le marché du travail.
Bien qu’il existe des lois destinées à protéger les femmes sur le lieu de travail, nombre de ces réglementations n’existent que sur le papier. L’écart entre les protections juridiques et leur application est important, ce qui rend les femmes vulnérables à la discrimination et à l’exploitation. Par exemple, l’agence de presse gouvernementale ILNA a mis en évidence cette disparité dans un rapport publié le 1er août, en soulignant que si les hommes et les femmes cotisent de la même manière au fonds de sécurité sociale pendant leur emploi, les femmes ne reçoivent pas les mêmes prestations au moment de la retraite. L’ILNA note également que les bas salaires et les prestations limitées affectent les femmes de manière disproportionnée, à la fois pendant leurs années de travail et après leur retraite.
Simin Yagoubian, une militante du travail des femmes, a souligné que l’inégalité salariale s’étendait même à la retraite. Les femmes, qui gagnent déjà moins que les hommes dans de nombreux secteurs, continuent d’être confrontées à des disparités financières après avoir quitté le marché du travail. Dans les petits ateliers et les emplois informels, cet écart salarial est encore plus prononcé, car les femmes reçoivent souvent un salaire nettement inférieur pour le même travail.
Accès limité aux possibilités d’emploi
Au-delà de l’inégalité salariale, l’accès limité aux possibilités d’emploi constitue un autre obstacle majeur pour les femmes en Iran. De nombreuses femmes sont obligées de choisir entre le travail et la famille en raison de l’absence de systèmes de soutien facilitant l’équilibre entre la vie professionnelle et la vie privée. Cette situation est aggravée par les attentes de la société qui privilégient le rôle de mère et d’épouse des femmes.
Le guide suprême du régime iranien, Ali Khamenei, a renforcé ces points de vue traditionnels. Dans un discours prononcé le 1er mai 2013, il a déclaré : « Le rôle le plus important qu’une femme puisse jouer à tous les niveaux de la science, de l’alphabétisation, de l’information, de la recherche et de la spiritualité est le rôle de mère et d’épouse ; ce rôle est plus important que toutes ses autres activités. De telles déclarations émanant des plus hauts responsables ne font que renforcer l’idée que le devoir principal d’une femme se situe au sein du foyer, et non sur le lieu de travail.
Discrimination en matière d’emploi et de retraite
Même lorsque les femmes parviennent à entrer sur le marché du travail, elles se retrouvent souvent cantonnées dans des emplois mal rémunérés et à temps partiel, ce qui ne fait qu’aggraver l’écart salarial entre les hommes et les femmes. Cette tendance ne se limite pas aux femmes ayant un faible niveau d’éducation. Les femmes ayant fait des études supérieures sont également confrontées à des pratiques discriminatoires, étant souvent placées dans des emplois moins bien rémunérés et de moindre statut que les hommes ayant des qualifications similaires. Les femmes ont également moins de chances d’accéder à des postes de direction ou à des rangs organisationnels plus élevés, ce qui limite encore leurs perspectives de carrière.
En outre, les femmes qui occupent des emplois informels ne bénéficient pas des droits fondamentaux et des protections légales, telles que les garanties contre le harcèlement sur le lieu de travail. L’absence de systèmes de soutien suffisants rend ces femmes vulnérables, et la stigmatisation culturelle qui entoure les femmes occupant des postes de direction ou des rôles professionnels exigeants fait qu’il leur est encore plus difficile de chercher de l’aide ou de signaler des abus.
Pratiques d’embauche informelles et discrimination fondée sur la maternité
En Iran, de nombreux employeurs ont des politiques informelles qui découragent l’embauche de femmes, notamment en raison des lois sur le congé de maternité. Les employeurs utilisent souvent le congé de maternité comme excuse pour ne pas embaucher de femmes, ce qui contribue à la faible participation des femmes au marché du travail. Le 12 octobre, un rapport du site web gouvernemental Asr-e Iran a mis en lumière ce problème, citant une travailleuse qui n’a pas été retenue pour un poste de direction parce qu’elle prévoyait d’avoir un enfant.
Le rapport souligne également que les femmes qui travaillent bénéficient de peu de soutien, en particulier celles qui ne sont pas assurées ou qui travaillent dans l’économie informelle.
Lorsque l’on parle de l’emploi des femmes ou du soutien aux femmes qui travaillent, on se concentre généralement sur les femmes qui occupent des emplois publics, négligeant ainsi le grand nombre de femmes qui travaillent dans le secteur privé ou dans des environnements de travail informels. Qu’il s’agisse des lois sur la maternité ou des mesures de sécurité de l’emploi, ces femmes ne bénéficient pas de la protection dont elles ont besoin pour s’épanouir sur le lieu de travail.
La punition de la maternité
La situation est encore plus désastreuse pour les mères qui travaillent. Dès leur grossesse, les femmes sont confrontées à des réglementations plus strictes et à l’hostilité des employeurs, et nombre d’entre elles sont licenciées en raison de leur grossesse ou de leur accouchement. Le manque de structures d’accueil pour les enfants sur le lieu de travail ou à proximité complique encore les choses, poussant souvent les femmes à s’enfoncer davantage dans la pauvreté alors qu’elles s’efforcent de concilier travail et maternité. En conséquence, la maternité en Iran est devenue une punition pour de nombreuses femmes qui souhaitent poursuivre leur carrière tout en élevant une famille.
Environnements de travail patriarcaux
Enfin, les environnements de travail patriarcaux en Iran exercent des pressions invisibles sur les femmes, les décourageant souvent de poursuivre leur carrière. Les pratiques discriminatoires, subtiles ou manifestes, réduisent la motivation des femmes et leurs possibilités d’évolution professionnelle. En outre, les attentes de la société et de la famille continuent de faire peser sur les femmes le poids des rôles traditionnels, tels que la maternité et le travail au foyer, ce qui a un impact significatif sur leurs décisions de carrière.
Conclusion
Les femmes iraniennes sont confrontées à d’importants défis sur le marché du travail, qu’il s’agisse de l’inégalité salariale, de l’absence de protection juridique, des attentes culturelles ou des pratiques d’embauche discriminatoires. Le chemin vers l’égalité des sexes sur le marché du travail est semé d’embûches et, en l’absence de changements juridiques et sociétaux substantiels, ces obstacles persisteront. Pour relever ces défis, il faut changer à la fois de politique et de mentalité, afin que les femmes bénéficient des mêmes opportunités et protections que les hommes sur le lieu de travail.
Source: CSDHI
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