Depuis plusieurs mois, certaines femmes d’Ispahan reçoivent des messages anonymes d’avertissement concernant leur hijab, a rapporté le quotidien Shargh Daily le 25 octobre 2024.
Envoyés sous le nom du « siège provincial de la promotion de la vertu et de la prévention du vice », ces messages mettent en garde les femmes contre le port du hijab dans les espaces publics. Bien qu’elles portent déjà le hijab, certaines destinataires rapportent avoir été approchées par des « contrôleurs de hijab » qui leur ont conseillé de se couvrir entièrement les cheveux dans les transports publics, en particulier dans le métro. Ignorant ce conseil, elles ont ensuite reçu des messages textuels leur indiquant qu’elles risquaient des poursuites judiciaires en cas de « non-conformité » répétée.
Menaces juridiques et élargissement du champ d’application
Si les destinataires ne tiennent pas compte de ces messages, un deuxième avertissement suit, sur un ton plus sévère : « Étant donné les apparitions répétées sans couverture légale appropriée à Ispahan, et sans tenir compte des avertissements précédents, tout nouvel incident fera l’objet de poursuites judiciaires », indique le message, attribué à la direction des affaires sociales et de la prévention de la criminalité du pouvoir judiciaire d’Ispahan.
Dans un cas rapporté, une femme affirme qu’un avertissement a été envoyé sur le téléphone de son père après qu’elle a négligé un avertissement des patrouilles de moralité, alors qu’elle portait un foulard. Ispahan semble être la seule ville à émettre actuellement de tels avertissements, ce qui a incité certains sur les médias sociaux à surnommer avec humour la région « l’État autonome d’Ispahan ».
Mise en œuvre non officielle d’une loi non ratifiée
Ces mesures ont suscité de nombreuses interrogations parmi les habitants d’Ispahan. Certains se demandent s’ils font l’objet d’une surveillance constante et s’interrogent sur le fondement juridique de ces pratiques. « Le siège de la promotion de la vertu dispose-t-il de caméras de reconnaissance faciale ? « Qui a autorisé cette agence à disposer d’un tel pouvoir et d’où proviennent les fonds nécessaires à l’acquisition de cette technologie ? Bien qu’aucune réponse ne soit encore disponible, les réactions en ligne reflètent une inquiétude sous-jacente concernant la vie privée et l’application arbitraire de la loi.
En particulier, le projet de loi iranien sur le hijab et la chasteté n’a été ratifié par le Conseil des gardiens que ces derniers jours et n’a pas encore été officiellement mis en œuvre. Les protocoles exacts de la loi concernant l’identification des femmes qui ne respectent pas le hijab n’ont pas été rendus publics. Bien que la loi attende toujours sa publication finale, des rapports indiquent que des mesures d’application telles que des notifications par SMS sont déjà en vigueur à Ispahan, ce qui laisse penser que les partisans de la loi l’ont lancée dans cette ville à titre d’« essai ».
Ambiguïtés juridiques et réactions du public
Amir Hossein Bankipour, partisan de la loi sur le hijab et député d’Ispahan au Parlement des mollahs, a récemment indiqué que les femmes ne portant pas le hijab seraient identifiées par des caméras de surveillance et que les amendes leur seraient envoyées directement sur leur téléphone.
Cette application préventive soulève des questions juridiques : comment les autorités d’Ispahan ont-elles pu prendre de telles mesures avant même que le Parlement n’ait approuvé la loi ? Et quelle est la base juridique qui permet au siège de la province de surveiller les femmes et de leur envoyer des messages ?
La loi sur le hijab n’a été approuvée qu’il y a quelques jours et son projet final n’a toujours pas été publié. Le dernier projet connu, datant de l’année dernière, ne contenait aucune disposition relative à l’application de la loi par le biais d’un message texte.
Cadre juridique antérieur sur le hijab
Avant le récent projet de loi, la seule base juridique concernant le hijab était l’article 638 du code pénal du régime iranien. Cet article stipulait que les femmes apparaissant en public sans le vêtement religieux approprié étaient passibles d’une peine d’emprisonnement ou d’une amende.
Toutefois, le code pénal ne prévoit aucun mécanisme de surveillance de masse ou d’avertissement par texte, ce qui souligne le caractère inédit et controversé des nouvelles pratiques d’Ispahan.
Alors que le projet de loi sur le hijab attend sa publication finale, les mesures d’application de la loi d’Ispahan ont mis en lumière le débat intense qui entoure la vie privée, les limites juridiques et la surveillance gouvernementale, tout en suscitant des inquiétudes quant aux pouvoirs incontrôlés des autorités locales.
Source: CNRI Femmes
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