La crise économique iranienne ne se définit plus par un choc unique, mais par l'accumulation de défaillances non résolues qui se renforcent mutuellement.
Des articles récents parus dans des journaux proches du régime révèlent un système englué dans une inflation chronique, une mauvaise gestion budgétaire, un commerce extérieur faible et de profondes répercussions sociales, notamment pour les groupes vulnérables comme les retraités.
Un thème récurrent dans ces rapports est l'incapacité de l'État à résoudre les crises une fois qu'elles surviennent. Lors du 11e congrès de l'Association islamique des ingénieurs iraniens, l'homme politique Ebrahim Asgharzadeh s'est interrogé sur les raisons pour lesquelles, après 47 ans, les gouvernements successifs restent incapables de gérer les crises économiques et politiques récurrentes.
Il a soutenu que les crises ne se résolvent pas mais se superposent les unes aux autres, pointant du doigt des centres de pouvoir parallèles et un « gouvernement de l'ombre » qui sape la prise de décision officielle.
Selon lui, cette paralysie a empêché à plusieurs reprises l'Iran de saisir des opportunités historiques cruciales, tant sur le plan économique que politique.
Ce dysfonctionnement structurel se reflète clairement dans les indicateurs macroéconomiques iraniens. L'inflation en demeure le symptôme le plus visible et le plus destructeur.
S’appuyant sur les données du Fonds monétaire international, Ham-Mihan indique que l’Iran reste un cas à part dans la région, avec une inflation alimentée par la dépréciation de sa monnaie, des politiques monétaires et budgétaires laxistes, des sanctions et une augmentation des dépenses de sécurité et militaires.
Alors que des pays comme l'Égypte ont connu un pic d'inflation suivi d'un déclin, le taux d'inflation en Iran devrait dépasser les records précédents, atteignant potentiellement une moyenne de 50 % ou plus au cours de l'année à venir.
Le recours persistant à l'expansion des liquidités pour couvrir les déficits budgétaires a érodé le pouvoir d'achat et alimenté une profonde méfiance du public envers l'État.
Dans le même temps, les recettes publiques s'échappent massivement. Selon Setareh Sobh , entre 2018 et 2024, environ 56 milliards de dollars de recettes d'exportation n'ont pas été rapatriés.
Un député a confirmé que 200 à 300 entreprises — pour la plupart publiques — n'avaient pas vendu leurs recettes en devises étrangères à la Banque centrale comme l'exige la loi.
Au lieu de cela, ils auraient vendu des devises fortes sur le marché libre, contribuant directement à la volatilité des taux de change. Cette pratique met en lumière la contradiction fondamentale du discours officiel : tandis que le président du régime prône l’austérité et invoque un manque de fonds, des entités liées à l’État détournent des ressources vitales en dehors des circuits officiels.
Les performances du commerce extérieur iranien soulignent une fois de plus les limites de sa stratégie d'ouverture vers l'Est. Selon Farhikhtegan , malgré des années d'accent politique mis sur les partenariats non occidentaux, les exportations vers l'Union économique eurasienne ne représentent qu'environ 4 % des exportations totales de l'Iran.
Les importations en provenance des États membres eurasiens sont également marginales, ne représentant que 3 % en valeur. Ces chiffres indiquent que, malgré les messages diplomatiques, l'Iran est encore loin de se doter d'alternatives économiques stratégiques viables aux marchés occidentaux.
L’impact cumulatif de l’inflation, des sanctions, de la mauvaise gestion et des pertes de revenus se fait le plus fortement ressentir au niveau des ménages.
Tose'e Irani rapporte que de nombreux retraités survivent aujourd'hui avec des pensions mensuelles d'environ 15,4 millions de tomans après 30 ans de travail, un revenu largement insuffisant pour couvrir les besoins essentiels. De ce fait, un grand nombre de retraités sont contraints de continuer à travailler bien au-delà de l'âge de la retraite.
Cette situation met en lumière l'incapacité du système de sécurité sociale iranien à garantir la dignité économique de ceux qui ont consacré des décennies à contribuer au monde du travail.
Ensemble, ces rapports dressent un tableau cohérent d'une économie contrainte non seulement par des sanctions, mais aussi par des défaillances de gouvernance profondément enracinées.
L’inflation est monétisée, les recettes d’exportation sont détournées, la diversification des échanges reste superficielle et les mécanismes de protection sociale s’effondrent.
Plutôt que d'être des problèmes isolés, il s'agit des conséquences interdépendantes d'un système qui manque de transparence, de responsabilité et de capacité à mettre en œuvre des réformes durables, laissant ainsi l'économie iranienne prisonnière d'un cycle de crises sans issue.


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