mercredi 10 décembre 2025

Modèle systématique et généralisé de violations des droits humains en Iran ; À l’occasion de la Journée internationale des droits humains : Évaluation annuelle – 2025

 À l'occasion de la Journée des droits de l'homme, la situation des droits humains en Iran est redevenue une préoccupation majeure pour la communauté internationale. Quatre décennies de violations structurelles et systématiques des droits fondamentaux ont placé le régime en place parmi les rares gouvernements au monde condamnés par au moins 72 résolutions des Nations Unies relatives à la situation des droits humains dans le pays. Cette répression persistante ne s'est pas atténuée ; au contraire, elle s'est fortement intensifiée en 2025.

Lors de la dernière session de l' Assemblée générale des Nations Unies (novembre-décembre 2025), la Troisième Commission et l'Assemblée plénière ont adopté une nouvelle résolution sur la situation des droits de l'homme en Iran. Cette résolution, l'une des plus fermes jamais adoptées, condamne la forte augmentation des exécutions, l'institutionnalisation de la torture, la répression des manifestants, le déni des garanties d'un procès équitable et l'impunité généralisée des responsables. Elle exige également l'arrêt immédiat des exécutions et le plein accès des mécanismes des Nations Unies de protection des droits de l'homme. Aucune de ces exigences n'a été mise en œuvre.

Une analyse des douze derniers mois révèle que la répression en 2025 a atteint un niveau alarmant. Des données vérifiées indiquent que 1 791 exécutions ont eu lieu au cours des onze premiers mois de l’année, et que plus de 1 500 condamnés à mort sont en danger imminent. L’année a également été marquée par l’exécution d’au moins 57 femmes, un chiffre record depuis quarante ans, témoignant d’une persécution fondée sur le genre et de sanctions discriminatoires.

Si l’on considère l’ensemble de ces éléments – torture, détérioration des conditions de détention, décès évitables, ciblage des femmes et des minorités, répression des militants et des détenus –, l’année 2025 représente l’une des périodes les plus graves de détérioration des droits de l’homme de ces dernières années.

2. Méthodologie

Ce rapport s'appuie sur des informations crédibles recueillies sur le terrain, des cas documentés de prisonniers et les conclusions des mécanismes des Nations Unies relatifs aux droits de l'homme pour présenter une évaluation complète des violations des droits de l'homme les plus graves commises en Iran au cours de l'année écoulée.

Tous les noms cités désignent des détenus politiques, idéologiques ou appartenant à des minorités, et leur exactitude a été soigneusement vérifiée.

3. Principales conclusions

3.1. Le droit à la vie et la crise des exécutions en 2025

L'ampleur des exécutions en 2025 témoigne d'une intensification dramatique de la politique du régime visant à éliminer physiquement ses opposants politiques et les groupes vulnérables. Selon des données fiables, 1 791 exécutions ont eu lieu au cours des onze premiers mois de 2025, soit plus du double des 993 exécutions recensées en 2024. Au moins 57 femmes ont été exécutées, un chiffre record depuis quarante ans. Nombre de ces exécutions ont fait suite à des procès inéquitables, à l'impossibilité d'assister un avocat et à des aveux extorqués sous la torture. Les Kurdes et les Baloutches étaient surreprésentés parmi les personnes exécutées.

Cas documentés (exécutions / condamnations à mort / risque imminent) :

  • Behrouz Ehsani Eslamlou , Mehdi Hassani – exécutés après des procès inéquitables et sans représentation légale.
  • Des dizaines de prisonniers politiques et idéologiques condamnés à mort, dont :
    • Zahra Shahbaz Tabari , prison de Lakan (Rasht)
    • Manouchehr Fallah , commercial – Prison de Lakan
    • Amin (Peyman) Farah-Avar Gisavandani , poète – Prison de Lakan
    • Karim Khojasteh, prison de Lakan
    • Mohammad-Javad Vafaei-Sani , champion de boxe – Prison de Vakilabad (Mashhad)
    • Ehsan Faridi , étudiant en ingénierie – Prison de Tabriz
    • Vahid Bani-Amerian , diplômé en gestion – Prison de Qezel Hesar
    • Pouya Ghobadi , ingénieur électricien – Prison de Qezel Hesar
    • Mohammad Taghavi-Sangdehi , BA en design graphique – Prison de Qezel Hesar
    • Abolhassan Montazer – Prison de Qezel Hesar
    • Babak Alipour , BA en droit – Prison de Qezel Hesar
    • Akbar (Shahrokh) Daneshvarkar , ingénieur – Prison de Qezel Hesar
    • Varisheh Moradi , diplômé universitaire – Prison d'Evin
    • Farshad E'temadifar , prison de Sheiban (Ahvaz)
    • Masoud Jame'i , prison de Sheiban (Ahvaz)
    • Alireza Mardasi, prison de Sheiban (Ahvaz)
    • Reza Abdali, prison de Sheiban (Ahvaz)
    • Nima Shahi, prison centrale de Karaj
    • Hamed Validi , prison centrale de Karaj

3.2. Torture et aveux forcés

La torture demeure une pratique courante dans les centres de détention et les prisons. Parmi les méthodes documentées figurent les passages à tabac, la suspension, les chocs électriques, la privation de sommeil, les menaces sexuelles, les cellules de détention exiguës et les aveux extorqués. Les détenus baloutches, kurdes et sunnites ont rapporté avoir subi les formes de torture les plus cruelles.

Dans de nombreux cas, les interrogateurs ont eu recours à des techniques telles que l'enfoncement d'aiguilles sous les ongles, les brûlures corporelles à l'aide d'objets chauffés et les pressions psychologiques exercées sur des enfants et des adolescents afin d'obtenir des aveux. Les cas recensés parmi les manifestants de ces dernières années révèlent une combinaison de torture physique et psychologique, engendrant des traumatismes durables chez de nombreuses victimes.

Les aveux extorqués sont systématiquement diffusés par les médias d'État pour justifier la répression et ouvrir la voie à des peines sévères. Le cycle « arrestation → torture → aveux extorqués → diffusion télévisée → condamnation à une peine lourde » demeure une caractéristique déterminante du déni des garanties d'un procès équitable.

Cas documentés de torture :

  • Loghman Alizadeh – grave détérioration physique après la torture (Qezel Hesar)
  • Hassan Saeedi – mort sous la torture (Service de renseignement d'Ahvaz)
  • Hamzeh Darvish – neuf ans de torture et d'isolement cellulaire (prison de Lakan)
  • Javad Kiani-Ashtarjani – en danger de mort suite à des tortures (Evin)
  • Rouhollah Karki – torturé dans une maison sûre (Ahvaz)
  • Iliya Zarei – 17 ans ; torturé et hospitalisé
  • Abdolsalam Shahmiri – Zahedan ; torture et incertitude prolongée
  • Mohammad Banazadeh Amirkhizi – torture en cours dans un centre de détention des services de renseignement à Qom
  • Pezhman Toubere-Rizi – état critique après des actes de torture
  • Arghavan Fallahi – six mois de torture ; transféré vers un lieu inconnu
  • Saman Mirdoraghi – mort sous la torture (Andimeshk Intelligence)
  • Saeed Salimi et Parsa Salimi-Majd (17 ans) – torturés dans la salle 209 d'Evin

3.3. Privation médicale délibérée et « mort lente »

Le refus systématique de soins médicaux, l'une des formes les plus ancrées de « torture blanche », s'est intensifié en 2025. Les prisonniers souffrant de maladies mettant leur vie en danger se voient systématiquement refuser un transfert à l'hôpital, voire même des médicaments de base.

Au moins 23 femmes sont décédées à la prison de Qarchak depuis le début de l'année en raison de négligences médicales, d'erreurs de diagnostic ou de transferts tardifs.

Cas documentés :

  • Maryam Shahraki – décédée suite à un mauvais diagnostic et au refus de soins cardiaques urgents (Prison de Ferdows – 21 Shahrivar 1404)
  • Jamileh Azizi – est décédé à Qarchak après des symptômes cardiaques non traités (28 Shahrivar 1404)
  • Somayeh Rashidi – prisonnière épileptique ; état irréversible après un transfert tardif (25–29 Shahrivar 1404)

Autres cas critiques :

  • Abolhassan Montazer-Moghaddam – Qezel Hesar ; souffrant de graves problèmes cardiaques et rénaux, il a été refusé pour une intervention chirurgicale.
  • Mir Yusef Younesi (72 ans) – Fashafuyeh ; s'est vu refuser une intervention chirurgicale essentielle
  • Mohammad-Ali Akbari Monfared – paralysie, diabète, infection grave ; risque d’amputation
  • Reza Ehtehami (70 ans) – maladie cardiaque ; refus de traitement
  • Ayyub Parkar (69 ans) – Sheiban ; souffrant de plusieurs maladies, s’est vu refuser une admission à l’hôpital.
  • Jaber Albushohkeh – risque de cécité ; refus de traitement

Parmi les autres prisonniers qui se sont vu refuser des soins figurent :
Manouchehr Fallah, Peyman Farah-Avar, Yaghoub Derakhshan, Maryam Akbari-Monfared, Shiva Esmaeili, Fatemeh Ziaei, Marzieh Farsi, Forough Taghipour, Ma'soumeh Askari, Hoda Mehreganfar, Ahmad Naseri, Yusef Savari, Mohammad-Ali Akbari-Monfared.

3.4. Décès et suicides évitables

La combinaison de la torture, des pressions psychologiques et de la négligence médicale a entraîné une vague de décès et de suicides évitables dans les prisons iraniennes.

Cas documentés :

  • Omid Jahani – décédé suite à une négligence médicale (Babol – 9 Azar 1404)
  • Ali Darabi – suicide à Fashafuyeh (3 Azar)
  • Payam Sattari – suicide après torture et agression sexuelle (19 Khordad)
  • Mohammad Koushki – suicide à Qezel Hesar après une longue période de privation
  • 23 femmes – Prison de Qarchak ; décès dus à une négligence médicale

3.5. La disparition forcée comme outil de répression

La disparition forcée est devenue un instrument central de répression en 2025. Les transferts soudains, les coupures totales de communication et le déni d’information aux familles constituent un schéma qui viole les articles 9 et 14 du PIDCP et peut constituer des crimes contre l’humanité.

Cas documentés (2021-2025) :

Siamak Barati, Nader Teymouri, Ahmadreza Djalali, Fariborz Babakhani, Emad Mazraeh, Mehdi Mahmoudi (17 ans), trois prisonniers politiques kurdes, Saleh Bahramzehi (16 ans), Rassam Sohrabi, Hamidallah Arbabi, Saeed Masoudi, Iman Khodri, Hafizollah Shahbakhsh, Danial Moshki, Parisa Darvish, Ali Younesi, Bijan Kazemi, Arghavan Fallahi, Vahid Bani-Amrian, Pouya Ghobadi, Babak Alipour, Akbar Daneshvarkar, Seyed Mohammad Taghavi, Osman Mameh.

3.6. Femmes : persécution fondée sur le genre et violence structurelle

2025 sera la pire année en quarante ans pour les femmes détenues et les condamnées à mort.

Les principales conclusions sont les suivantes :

  • Exécution d'au moins 57 femmes
  • Décès de 23 femmes à Qarchak suite à une négligence médicale
  • Transfert de prisonnières politiques vers un centre souterrain de 40 marches à Evin
  • Des privations médicales graves affectent des femmes telles que Maryam Akbari-Monfared, Shiva Esmaeili, Fatemeh Ziaei, Marzieh Farsi, Forough Taghipour, entre autres.

Cela constitue une persécution systématique fondée sur le sexe au regard du droit international des droits de l'homme.

3.7. Minorités ethniques et religieuses

Les communautés kurdes, baloutches, arabes, sunnites et bahaïes sont confrontées à une discrimination profondément enracinée et à une répression accrue. Les minorités représentent environ 20 % des exécutions, alors qu'elles constituent une part plus faible de la population. Les opérations menées dans les régions à forte population minoritaire ont eu recours à la force létale, aux arrestations massives et à la torture.

4. Schémas de violations

L’ensemble des preuves – torture, exécutions disproportionnées, disparitions forcées, privation de soins médicaux et ciblage des femmes et des minorités – démontre que ces violations sont structurelles, coordonnées et intentionnelles.
L’impunité institutionnelle dont jouissent les responsables de la sécurité et du système judiciaire permet la perpétuation et l’aggravation de ces violations.

5. Évaluation juridique

Ces violations constituent des manquements graves aux obligations de l'Iran en vertu du Pacte international relatif aux droits civils et politiques, notamment aux articles 6, 7, 9, 10, 14 et 26.
L'ampleur, la gravité et le caractère systématique de la torture, des exécutions, des disparitions forcées et de la persécution des femmes et des minorités atteignent le seuil juridique des crimes contre l'humanité.

6. Conclusion et appel à une action immédiate

Les conclusions de ce rapport dressent un tableau alarmant de la situation des droits humains en Iran. Des milliers de prisonniers, notamment des détenus politiques, des prisonniers idéologiques, des femmes et des membres de minorités, risquent d'être torturés, de subir une mort lente ou d'être exécutés.
Cette situation exige une action internationale urgente et coordonnée afin de prévenir de nouvelles violations et de protéger les détenus vulnérables.

Source : Iran HumanRights Momitor

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