lundi 29 juin 2020

Iran : Détention arbitraire de la militante des droits du travail, Mme Sepideh Gholian


militante droit travail iranFIDH - L'Observatoire pour la protection des défenseurs des droits humains, résultat d’un partenariat de la FIDH et de l'Organisation mondiale contre la torture (OMCT), a reçu de nouvelles informations et demande votre intervention urgente dans la situation suivante en Iran : la détention arbitraire de la militante des droits du travail, Mme Sepideh Gholian.

L'Observatoire a été informé par la Ligue pour la défense des droits humains en Iran (LDDHI) de l'évolution de la situation de trois défenseurs des droits du travail condamnés dans l'affaire de la société de canne à sucre Haft Tappeh, notamment de la détention arbitraire de la militante des droits du travail Mme Sepideh Gholian, et de la grâce de MM. Esmail Bakhshi et Mohammad Khanifar, respectivement porte-parole et membre du syndicat indépendant des travailleurs de la société de canne à sucre Haft Tappeh.
Selon les informations reçues, le 21 juin 2020, Mme Sepideh Gholian s'est présentée au bureau d'application des verdicts de la prison d'Evine à Téhéran et a été emprisonnée pour purger sa peine de cinq ans de prison (voir informations générales). Au moment de la publication de cet appel urgent, le lieu de détention de Mme Gholian n'était pas connu. Le 16 juin 2020, elle a été informée par le juge en charge du Bureau de l'exécution des verdicts qu'elle serait envoyée à la prison de Qarchak, à l'est de Téhéran, pour purger la peine prononcée contre elle en décembre 2019, à moins qu'elle n'ait écrit une lettre demandant la grâce du Guide suprême Ali Khamenei, ce qu'elle a refusé. [1]
Le 23 mai 2020, l'avocat de MM. Esmail Bakhshi et Mohammad Khanifar a rapporté qu'à l'occasion de l'Aïd El-Fitr, ses clients ont été graciés par le Guide suprême. Messieurs Esmail Bakhshi et Mohammad Khanifar avaient été condamnés avec Mme Sepideh Gholian à cinq ans de prison par la Cour d'appel de Téhéran le 14 décembre 2019, pour des activités syndicales dans le cadre de la grève des travailleurs de la compagnie de canne à sucre Haft Tappeh[2] à Chouch, dans la province du Khouzistan, dans le sud-ouest de l'Iran.
L'Observatoire se félicite de la grâce accordée à MM. Esmail Bakhshi et Mohammad Khanifar mais rappelle qu'ils n'auraient jamais dû être poursuivis et détenus en premier lieu. L'Observatoire exprime également sa vive préoccupation face à la détention arbitraire de Mme Sepideh Gholian, qui ne semble viser qu'à la punir de ses activités en faveur des droits humains et à l'exercice légitime de son droit à la liberté d'association.
L'Observatoire appelle les autorités iraniennes à libérer immédiatement et sans condition Mme Sepideh Gholian et à mettre fin à tous les actes de harcèlement, y compris au niveau judiciaire, contre tous les défenseurs des droits humains mentionnés dans le présent appel urgent, ainsi que tous les autres défenseurs des droits humains en Iran.
Informations générales :
En novembre 2018, les travailleurs de la société Haft Tappeh Sugar Cane, située à Chouch (Shush), dans la province du Khouzistan, ont entamé une grève d'un mois. Ils réclamaient le paiement de mois de salaires impayés et la restitution de la propriété du complexe agro-industriel au secteur public. Haft Tappeh est la plus grande usine de canne à sucre en Iran et emploie des milliers de travailleurs.
Le 18 novembre 2018, M. Esmail Bakhshi, Mme Sepideh Gholian et M. Mohammad Khanifar ont été arrêtés pour « rassemblement et collusion contre la sécurité nationale » (article 610 du code pénal islamique). M. Bakhshi et Mme Gholian ont été libérés sous caution, respectivement le 12 et le 18 décembre 2018. Après avoir été libérés, ils ont révélé qu'ils avaient été torturés et forcés à avouer et leurs « aveux » ont été retransmis à la télévision. Ils ont été de nouveau arrêtés à Ahwaz, dans la province du Khouzistan, le 20 janvier 2019. Mme Gholian a été détenue à la prison de Sepidar jusqu'au 28 avril 2019, avant d'être transférée à la prison d'Evine où elle est restée jusqu'au 3 juin 2019, puis elle a été transférée à la prison de Qarchak. M. Bakhshi a été détenu à la prison de Shayban à Ahwaz, jusqu'au 28 avril 2019, avant d'être transféré à la prison d'Evine. M. Mohammad Khanifar a été libéré sous caution le 22 novembre 2018.
Le 7 septembre 2019, la branche 28 du tribunal de la révolution islamique à Téhéran a condamné les trois défenseurs à de longues peines de prison allant de six à 18 ans de prison, à l'issue de procès inéquitables en août. Ils ont tous fait appel de ces sentences.
Le 26 octobre 2019, Mme Sepideh Gholian a été libérée de la prison de Qarchak à Varamin, au sud de Téhéran, moyennant une caution de cinq milliards de rials (105 000 € environ).
Mme Gholian a été libérée un jour après avoir mis fin à une grève de la faim de cinq jours pour protester contre ses conditions de détention et le harcèlement de sa famille par le ministère du renseignement. Le 30 octobre 2019, M. Esmail Bakhshi a été libéré moyennant une caution de 7,5 milliards de rials (157 500 € environ).
De plus, lors d'un autre incident, M. Mohammad Khanifar a été de nouveau arrêté par des autorités judiciaires locales alors qu'il se rendait à Téhéran pour des réunions avec des membres du Parlement le 7 octobre 2019. Il a été libéré sous caution le 9 octobre 2019 mais il reste poursuivi pour trouble à l'ordre public (article 618). Il a finalement été acquitté dans cette affaire le 23 décembre 2019.
Le 14 décembre 2019, la cour d'appel de Téhéran a confirmé la condamnation de Mme Sepideh Gholian, M. Esmail Bakhshi et M. Mohammad Khanifar pour « rassemblement et collusion contre la sécurité nationale » et les a condamnés à cinq ans de prison chacun.
Le tribunal a également confirmé la condamnation et la peine de deux ans de prison de M. Esmail Bakhshi pour « insulte du Guide suprême » (article 514).
Actions demandées :
Veuillez écrire aux autorités iraniennes pour leur demander de :
i. Garantir en toutes circonstances l'intégrité physique et le bien-être psychologique de Mme Sepideh Gholian, M. Esmail Bakhshi, M. Mohammad Khanifar et de tous les autres défenseurs des droits de l'homme en Iran ;
ii. Libérer immédiatement et sans condition Mme Sepideh Gholian et tous les autres défenseurs des droits humains détenus arbitrairement en Iran car leur détention est arbitraire puisqu'elle semble ne viser qu'à les punir pour leurs activités en faveur des droits humains ;
iii. Mettre fin à tous les actes de harcèlement, y compris au niveau judiciaire, contre Mme Sepideh Gholian, M. Esmail Bakhshi, M. Mohammad Khanifar et tous les autres défenseurs des droits humains en Iran, et veiller à ce qu'ils puissent mener leurs activités sans entrave ;
iv. Se conformer à toutes les dispositions de la Déclaration des Nations Unies sur les défenseurs des droits humains adoptée par l'Assemblée générale des Nations Unies le 9 décembre 1998, en particulier à ses articles 1, 6, 9, 11 et 12 ;
v. Garantir en toutes circonstances le respect des droits humains et des libertés fondamentales conformément aux normes internationales en matière de droits de l'homme et aux instruments internationaux ratifiés par l'Iran.
Adresses :
- Guide suprême de la République islamique, S.E. l'Ayatollah Sayed Ali Khamenei, Fax : + 98 21 441 2030, Email : info_leader@leader.ir ; Twitter : @khamenei_ir
- Président Hassan Rouhani, République islamique d'Iran, Fax : + 98 21 644 54811 ; Courriel : media@rouhani.ir ; Twitter : @HassanRouhani (anglais) et @Rouhani_ir (persan).
- Chef du pouvoir judiciaire, S.E. Hojattolislam Ebrahim Ra'eesi, République islamique d'Iran, Fax : +98 21 879 6671 / +98 21 3 311 6567, Email : info@dadiran.ir / info@dadgostary-tehran.ir / info@bia-judiciary.ir
- Ministre des affaires étrangères, Mohammad Javad Zarif, République islamique d'Iran, Fax : +98-21-66743149 ; matbuat@mfa.gov.ir
- Secrétaire général du Haut Conseil pour les droits de l'homme, M. Ali Bagheri Kani, République islamique d'Iran. Courriel : info@humanrights-iran.ir
- S.E. M. Esmaeil Baghaei Hamaneh, Ambassadeur, Mission permanente de la République islamique d'Iran auprès des Nations unies à Genève, Suisse, Fax : +41 22 7330203, Courriel : mission.iran@ties.itu.int
- S.E. M. Peiman Seadat, Ambassadeur, Ambassade d'Iran à Bruxelles, Belgique, Fax : + 32 2 762 39 15. Courriel : secreteriat@iranembassy.be
Veuillez également écrire aux représentations diplomatiques de l'Iran dans vos pays respectifs.
***
Paris-Genève, le 26 juin 2020
Veuillez nous informer de toute action entreprise en citant le code de cet appel dans votre réponse.
L'Observatoire pour la protection des défenseurs des droits de l'homme (l'Observatoire) a été créé en 1997 par la FIDH et l'Organisation mondiale contre la torture (OMCT). Son objectif est de prévenir ou de remédier aux situations de répression à l'encontre des défenseurs des droits humains. La FIDH et l'OMCT sont toutes deux membres de ProtectDefenders.eu, le mécanisme de l'Union européenne pour les défenseurs des droits humains mis en œuvre par la société civile internationale.

Pour contacter l'Observatoire, appelez la ligne d'urgence :
- E-mail : Appeals@fidh-omct.org
- Tél et fax FIDH +33 (0) 1 43 55 25 18 / +33 1 43 55 18 80
- Tél et fax OMCT +41 (0) 22 809 49 39 / +41 22 809 49 29
[1] Mme Gholian est confrontée à deux autres affaires dans lesquelles elle est accusée de « propagande contre le système » et « diffusion de mensonges ». L'une d'entre elles est liée à son reportage sur la torture et les mauvais traitements infligés aux femmes arabes iraniennes détenues à Ahwaz. Son rapport de 59 pages a été publié en ligne. L'autre concerne sa révélation qu'un journaliste de la chaîne de télévision de la République islamique d'Iran avait aidé ses interrogateurs à la contraindre à faire des aveux télévisés auto-incriminants. La justice n'a pas examiné la plainte qu'elle a déposée contre ledit journaliste. La journaliste a déposé une plainte contre elle. Les aveux ont été diffusés le 19 janvier 2019.
[2] La société de canne à sucre Haft Tappeh a été vendue à une société privée par les autorités en 2015. Cette dernière a rapidement accumulé d'importantes dettes, principalement envers les services publics et les autorités fiscales. Pour résoudre le problème, les propriétaires ont décidé de retenir les salaires, les traitements et les pensions. Cette décision a déclenché des grèves.

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