vendredi 7 septembre 2018

Iran : Le peuple libre emprisonné pour des manifestations pacifiques


human rights watch iranHuman Rights Watch, le 5 septembre 2018 (Beyrouth) - Les autorités iraniennes devraient abandonner toutes les charges retenues contre des manifestants à cause d’un rassemblement pacifique et libérer les personnes détenues pour cette raison, a déclaré Human Rights Watch le 5 septembre 2018.
Depuis le 2 août 2018, les autorités ont arrêté plus de 50 personnes lors de manifestations à Téhéran.
Depuis janvier 2018, au moins 30 personnes ont été tuées dans des manifestations, mais les autorités n’ont montré aucun signe de conduite d’enquêtes impartiales ni au sujet du recours excessif à la force par les forces de l’ordre pour réprimer les manifestations.

« Le gouvernement iranien utilise une stratégie autoritaire pour répondre aux protestations, criminaliser la dissidence pacifique et protéger les forces de sécurité de toute investigation », a déclaré Sarah Leah Whitson, directrice du Moyen-Orient à Human Rights Watch. « Plutôt que de blâmer les « éléments étrangers » pour les manifestations, les autorités iraniennes devraient permettre aux citoyens de critiquer le gouvernement par leur droit à la dissidence pacifique ».
Le 31 juillet, une nouvelle vague de manifestations contre la détérioration des conditions économiques et la perception de la corruption gouvernementale ont commencé dans la ville d'Ispahan et se sont rapidement étendues à d'autres villes, notamment à Karaj dans la province d'Alborz et à Téhéran. Le 3 août, un manifestant identifié par les médias sociaux comme Reza Otadi a été tué par balle lors des manifestations à Karaj. Les autorités ont annoncé la création d'un comité spécial chargé d'enquêter sur sa mort, composé de pasdarans, d'unités du renseignement de la police et d'un procureur.
Des sources bien informées ont déclaré à Human Rights Watch qu'environ 50 personnes arrêtées lors des manifestations du 3 août étaient détenues à la prison de Fashafuyeh. Ces détenus doivent payer un prix élevé pour des produits essentiels tels que de l’eau dans la prison, où l’hygiène est déplorable. Le 21 août, Nader Fotourehchi, un militant qui a passé une nuit en détention dans le service de quarantaine de la prison de Fashafuyeh, sans lien avec les manifestations, a tweeté sur les mauvaises conditions de cette section. Selon Fotourehchi, il n’y a pas d’eau courante dans la prison de 16 heures à 7 heures du matin.
Le 11 août, Mehdi Mahmoudian, journaliste, a tweeté que les autorités avaient placé en détention 15 femmes, arrêtées lors des manifestations du mois d'août, à la prison de Qarchak à Téhéran. Des sources qui préféraient rester anonymes ont déclaré que lorsque les prisonniers ont été conduits au bureau du procureur, leurs familles avaient remarqué des signes d’ecchymoses sur leur corps. Le 12 août, Mahmoudian a tweeté que les autorités avaient retrouvé le corps d'un détenu qui s'était apparemment suicidé à la prison de Fashafuyeh. Le 18 août, Mostafa Mohebbi, le responsable des prisons de la province de Téhéran, a confirmé le suicide d’un détenu, affirmant que l’homme n’était pas un manifestant et qu’il avait été accusé de vol qualifié et toxicomanie. Dans le cadre de deux cas de morts suspectes survenues en janvier dans les prisons de Téhéran et d’Arak, les autorités ont fait des déclarations similaires et ont déclaré que les causes de décès étaient des suicides. Les autorités ont également affirmé que Seved Kavous Emami, un éminent environnementaliste mort dans des circonstances suspectes à la prison d’Evine, le 9 février, s’est suicidé.
Une vidéo publiée sur les réseaux sociaux, le 28 août, montre des familles de détenus rassemblées devant le bureau du procureur d’Evine pour obtenir des informations au sujet de leurs proches.
La loi iranienne restreint les droits des détenus accusés de délits contre la sécurité nationale de voir un avocat pendant la période de l’enquête. En juin, le système judiciaire a publié une liste de 20 avocats autorisés à représenter des personnes détenues faisant face à des accusations de sécurité nationale dans la province de Téhéran au cours d’une enquête.
Depuis décembre 2017, plusieurs vagues de protestation se sont produites en Iran. Lors des manifestations de décembre 2017 et de janvier 2018, les autorités ont arrêté environ 4 000 manifestants. Pendant et après les manifestations, les autorités du ministère du renseignement ont également arrêté au moins 150 étudiants et les tribunaux ont condamné 17 personnes à des peines de prison.
En vertu du droit international, chacun a droit à la liberté d’expression et de réunion pacifique, garantie par le Pacte international relatif aux droits civils et politiques (PIDCP), auquel l’Iran est partie. Les Principes de base des Nations Unies sur l'utilisation de la force et des armes à feu par les responsables de l'application de la loi stipulent que les forces de sécurité doivent utiliser des moyens non violents avant de recourir à la force, utiliser des moyens de contention et minimiser les blessures.
La torture, ainsi que les traitements cruels, inhumains ou dégradants, sont interdits en tout temps et les preuves obtenues sous la torture ou d'autres formes de coercition ne peuvent être présentées comme des preuves lors d’un procès. Le pacte exige également le droit à un procès pénal équitable, y compris le droit d'être informé rapidement de la nature et de la cause des accusations ; avoir le temps et les facilités nécessaires à la préparation d'une défense ; communiquer avec le conseil de son choix ; être présent au procès ; et interroger les témoins de l’accusation.
« Les autorités iraniennes ont à plusieurs reprises échoué à enquêter sur de graves allégations d'abus contre des manifestants », a déclaré M. Whitson. « Alors que l’attention mondiale est centrée sur l’accord nucléaire et l’impact éventuel des sanctions américaines, l’Union Européenne et l’ONU en particulier devraient faire clairement savoir que les droits de l’homme sont essentiels à la réputation internationale de l’Iran.

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