Ce vendredi 29 septembre, la place de la Bastille est devenue, l’espace d’un après-midi, le théâtre d’un amas de chaussures et de fleurs symbolisant les 30 000 prisonniers politiques exécutés en 1988 en Iran.
On pouvait voir des photos, des noms, parfois des bouts d’explications, sur la vie de ces dizaines de milliers de courageux décimés par une fatwa de Khomeiny, l’un des plus brutaux dictateurs que le 20 siècle ait connu. « Réprimez les mécréants avec la plus grande violence (…) Tous ceux emprisonnés qui persistent dans leur hypocrisie, sont condamnés à mort car ils sont en guerre contre le Dieu », avait-il écrit dans son décret religieux.
Les passants étaient saisis par le drame des « massacrés de 1988 en Iran », mis en spectacle par une troupe de militants sur la place de la Bastille
Cette tuerie a été qualifiée par la FIDH et Amnesty international de « crime contre l’humanité » resté impuni. Dans son dernier rapport à l’Assemblée générale des Nations-Unis, la Rapporteuse spéciale de l’ONU sur la situation des droits de l’homme en Iran, Asma Jahangir a insisté que « les familles des victimes ont le droit de connaître la vérité sur le sort de leurs proches et d’intenter une action en justice ».
Plusieurs personnes sont intervenues lors de cette évènement. Gilbert Mitterrand, président de la Fondation France-Liberté, a déclaré : « c'est un hommage à la mémoire d'un passé douloureux, mais en se rassemblant c'est aussi pour demander justice que les bourreaux soient identifiés et jugés. »
Pour Pierre Bercis, président des Nouveaux Droits de l’Homme (NDH), « il faut une enquête internationale sur le massacre », mais les états ne doivent pas se laisser duper par le régime iranien. « Veillons, a-t-il dit, que la nouvelle administration (en France) ne soit pas emportés par les turpitudes du régime iranien. »
Massoumeh Cheykhi, infirmière et ancienne prisonnier politique, a pour sa part apporté un témoignage émouvant sur ses compagnons de cellule aujourd’hui exécutées.
Helen Fatpour, membre de la commission des femmes du CNRI, a lu transmis les témoignages des rescapés de la répression ou des familles des personnes massacrées : « Je m’appelle Farzaneh Majidi et je téléphone de Londres. Cinq membres de ma famille ont été exécutés par les mollahs, dont deux tantes, Mehranguiz et Soheila Mohammad-Rahimi, en 1988. Soheila avait 18 ans lors de son arrestation et Mehranguiz 22 ans. Quand elles ont été exécutées, ma grand-mère était aussi en prison. »
Afchine Alavi, membre de la commission des affaires étrangères du CNRI a insisté sur la nécessité d’une enquête indépendante internationale par l’ONU. « Ce rapport récent de l’ONU doit aboutir, a-t-il dit, à une traduction en justice des autorités du régime impliqués dans ces crimes. »
Amnesty International vient d’alerter sur les destructions des fosses communes de victimes des massacres dans plusieurs villes iraniennes.
La Rapporteuse spéciale de l'ONU sur la situation des Droits de l'Homme en Iran, Asma Jahangir, a précisé dans son rapport récent : « En août 2016, un enregistrement audio d’une réunion entre de hauts fonctionnaires de l’État et des dignitaires religieux en 1988 a été rendu public. Il révèle les noms des responsables qui ont ordonné les exécutions et les ont justifiées; en font notamment partie l’actuel Ministre de la Justice, un juge de la Haute Cour de Justice toujours en fonction et le directeur de l’une des principales institutions religieuses du pays, qui était également candidat aux élections présidentielles tenues au mois de mai. »
La jeunesse iranienne est en train de faire remonter à la surface ces pages enfouies de son passé récent. Les auteurs et les commanditaires de ce massacre, aujourd’hui aux commandes d’une théocratie qui se maintient à coup de pendaisons publiques, n’échapperont pas à leur sort, celui d’être traduit devant une juridiction internationale compétente, à défaut par le tribunal du peuple en présence d’observateurs du monde entier, après la chute du régime.
Les martyrs de 1988 seront alors sur les bancs des jurés.
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