Une enquête menée en Iran au cours du mois de septembre 2020 révèle que 70 % des Iraniens sont soit totalement opposés à la peine de mort (44 %). Soit, ils ne l’approuvent que dans des cas exceptionnels (26 %).
A l’occasion de la 18ème Journée mondiale contre la peine de mort, la Coalition mondiale contre la peine de mort (WCADP) et Iran Human Rights (IHR) ont organisé une conférence de presse numérique pour présenter les résultats d’un sondage sur l’attitude du peuple iranien à l’égard de la peine de mort (détails ci-dessous).
Cette enquête, menée par l’Institut GAMAAN entre le 3 et le 11 septembre 2020, comprend des réponses d’environ vingt mille personnes vivant en Iran. Les résultats peuvent être généralisés à l’ensemble de la population de résidents iraniens alphabétisés de plus de 19 ans, qui représentent 85 % de la population adulte totale de l’Iran.
De plus, selon cette enquête :
- Seuls 14% des Iraniens sont en faveur de la peine de mort comme le prévoit la Charia (comme c’est le cas dans le Code pénal iranien actuel)
- Plus de 85 % des Iraniens s’opposent à la peine de mort pour les crimes commis par des personnes de moins de 18 ans
- 86% des Iraniens s’opposent à la pratique des exécutions publiques
- Seulement 21 % des Iraniens disent qu’ils préféreraient les qisas (la peine de mort comme châtiment) plutôt qu’une autre peine si un membre de leur famille immédiate était assassiné.
Après la Chine, l’Iran est le pays qui exécute le plus
L’Iran est le pays qui compte le plus grand nombre d’exécutions après la Chine. En vertu du code pénal iranien, un large éventail d’infractions sont passibles de la peine de mort.
La liste comprend :
- le meurtre,
- le viol,
- le vol à main armée,
- la possession et le trafic de stupéfiants,
- l’espionnage,
- la corruption économique,
- l’affiliation à des groupes d’opposition armés,
- l’insulte au prophète,
- le blasphème,
- les relations homosexuelles,
- l’adultère
- et la quatrième condamnation pour consommation d’alcool.
L’Iran exécute les mineurs
L’Iran est également l’un des seuls pays à maintenir les exécutions publiques et la peine de mort pour les délinquants mineurs.
Mahmood Amiry-Moghaddam, directeur d’IHR, a observé : ‘« Cette enquête indique que, contrairement aux affirmations officielles, la politique des autorités iraniennes en matière de peine de mort n’a pas le soutien de la population. La grande majorité des Iraniens veulent mettre un terme aux exécutions publiques. Ils veulent aussi que cesse la peine de mort pour les enfants délinquants. Ils préfèrent des peines alternatives même pour les crimes graves comme le meurtre. La communauté internationale doit se faire l’écho de la voix du peuple iranien. Elle doit appeler les autorités iraniennes à mettre en œuvre des réformes fondamentales afin de faire un pas important vers l’abolition de la peine de mort. »
Selon les informations d’IHR, le régime a reconnu coupable de meurtre la majorité des personnes exécutées en Iran depuis 2017. Le régime des mollahs les a condamnées à mort en vertu du principe juridique du qisas (rétribution en nature). Les autorités iraniennes affirment que le qisas est le droit du plaignant (la famille de la victime). Et donc, la plupart des exécutions de qisas ont lieu à la demande du plaignant.
Les iraniens choisissent l’emprisonnement plutôt que le qisas
Toutefois, on a interrogé les Iraniens sur la peine qu’ils préfèrent en cas de meurtre d’un membre de leur famille proche. Seuls 21,5 % des personnes interrogées choisissent le qisas (peine de mort en guise de châtiment). En revanche, plus de 50 % préfèrent des peines alternatives telles que l’emprisonnement.
« L’obligation d’un État de respecter les droits humains ne devrait jamais être soumise au vote populaire. Les résultats de cette enquête indiquent clairement que le peuple en Iran accepte moyennement la peine capitale. Une partie importante des personnes interrogées était opposée à la peine de mort quel que soit le crime », a affirmé le président de la CMADP, Kevin Rivera-Medina.
« Les autorités iraniennes, désireuses de maintenir la peine de mort, s’empressent de souligner qu’elles exécutent la volonté du peuple. Elles affirment que la peine de mort est juste et imposée par la charia. Cependant, seulement 14% des personnes interrogées sont d’accord avec une telle déclaration. Par conséquent, il est évident que les affirmations inexactes du gouvernement iranien sur l’opinion publique ne sont que le prétexte à des violations permanentes des droits humains. Aujourd’hui plus que jamais, le gouvernement iranien devrait tenir compte de l’appel du peuple iranien à abandonner les qisas. Il devrait prendre des mesures positives pour réduire l’étendue de la peine de mort sur son territoire. De telles mesures réaffirmeraient ces points de vue. Elles reconnaîtraient le principe mondial du respect de la vie humaine », a ajouté Mme Rivera-Medina.
Un moratoire sur la peine de mort est indispensable
Lors de la publication de cette étude, la CMADP et IHR appellent à un moratoire immédiat sur l’application de la peine de mort. Ils appellent à la mise en œuvre de réformes pénales sérieuses limitant le recours à la peine de mort afin de progresser vers son abolition totale en Iran. Les réformes mises en œuvre par les autorités iraniennes dans le cadre de la loi antidrogue de 2017 ont permis de réduire considérablement le nombre d’exécutions. Mais le nombre d’exécutions en Iran reste encore l’un des plus élevés au monde.
Source : IHR
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