mercredi 17 mars 2021

Iran : Une intervention européenne est nécessaire pour mettre fin aux exactions du régime contre les prisonniers politiques


 Mardi, la justice du régime iranien a ordonné le transfert forcé de Maryam Akbari Monfared d’Evine à la prison de Semnan. Monfared a purgé environ 12 ans d’une peine de 15 ans résultant uniquement de son activisme politique et de ses relations familiales avec des membres du principal groupe d’opposition iranien, l’Organisation des Moudjahidine du peuple d’Iran (OMPI-MEK). Son transfert représente le dernier cas de pression arbitraire visant cette militante qui a été la première prisonnière politique à déposer une plainte officielle contre les crimes passés du régime iranien, principalement le massacre de prisonniers politiques en 1988.

Ce massacre a eu lieu à l’été 1988 et découle d’une fatwa émise cette année-là par le fondateur et guide suprême du régime, Rouhollah Khomenei. L’édit religieux déclarait que les membres de l’OMPI étaient des ennemis de Dieu et donc soumis à une exécution sommaire. En réponse, des «commissions de mort» ont été mis sur pied dans les prisons de tout l’Iran pour interroger les prisonniers politiques sur leurs affiliation politique et ordonner des peines de mort à ceux qui n’ont pas fait preuve de loyauté envers le régime. On estime qu’en quelques mois, plus de 30 000 de ces prisonniers politiques ont été tués.

Video : Pour arrêter définitivement les exécutions en Iran, le monde devrait demander aux mollahs de rendre compte du massacre de 1988

Parmi les victimes du massacre se trouvaient un frère et une sœur de Monfared. Deux autres frères ont été tués par les autorités du régime au début des années 80, l’un par exécution et l’autre sous la torture avant même d’être condamnés pour un quelconque crime. Monfared a déposé sa plainte pour ces meurtres en octobre 2016. Elle affirmait :

«Mon frère Abdolreza et ma sœur Roqieh ont été exécutés à une date inconnue au cours de l’été 1988… Ils ont été privés de leur droit à avoir un avocat pour les représenter. Abdolreza a été arrêté alors qu’il n’avait que 17 ans pour avoir vendu une publication des Moudjahiddines du peuple. Il a été condamné à trois ans d’emprisonnement en 1980, mais les autorités ont refusé de le libérer après avoir purgé sa peine de prison jusqu’à ce qu’il soit finalement exécuté en 1988. »

Monfared a immédiatement donné suite à cette plainte en publiant une lettre ouverte visant à informer la communauté internationale sur le massacre et les problèmes de droits humains associés. En réponse, les autorités du régime l’ont accusée de «diffamer l’islam» en évoquant les infractions passées du régime clérical. Ils ont également exacerbé les problèmes de leur propre bilan en matière de droits humains en exerçant de nouvelles pressions sur Monfared, notamment l’annulation des visites familiales et la révocation de l’accès aux services médicaux vitaux.

Ces actions ont fait de Monfared l’objet d’une campagne d’action urgente d’Amnesty International dans le mois qui a suivi le dépôt de la plainte. Mais en l’absence de suivi significatif de la part des Nations Unies, de l’Union européenne ou de leurs États membres, cette campagne a fini par faire très peu pour dissuader le régime de maintenir la pression sur elle, encore moins sur les autres détenues et prisonniers politiques.

Maryam Akbari Monfared (à droite) – Photos des membres de sa famille exécutés par le régime iranien (à gauche)

En septembre 2018, Monfared et deux autres prisonnières d’opinion, Golrokh Ebrahimi Eraei et Atena Daemi, ont organisé une manifestation contre les efforts des autorités pour les soumettre à de nouveaux interrogatoires dans le but de les contraindre à fournir de faux aveux ou à porter des accusations contre d’autres comme moyen de justifier de nouvelles poursuites.

Téhéran a une longue histoire de violation de ses propres lois pour garder les prisonniers politiques derrière les barreaux ou les renvoyer en détention peu de temps après. En fait, cette pratique va souvent de pair avec la pression exercée par le refus de traitement médical et les visites familiales, ainsi que d’autres tactiques mises en avant ces dernières années contre Monfared et d’autres détenus qui ont eu le courage de protester malgré les menaces de représailles.

La communauté internationale devrait accorder plus d’attention à son cas et aux innombrables autres cas similaires dans les prisons iraniennes, dont la population a grossi à la suite des récents soulèvements. L’Union européenne et les autres puissances mondiales devraient reconnaître ces cas non seulement pour saluer le défi des militantes iraniennes, mais aussi pour leur apporter un soutien réel. Les États membres devraient dégrader leurs relations diplomatiques et commerciales avec le régime iranien, en attendant une amélioration vérifiable des actions du régime en matière de droits de l’homme.

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