mercredi 31 mars 2021

Narges Mohammadi : La violence de la peine de mort est pire que la guerre

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CSDHI – Narges Mohammadi, éminente défenseure des droits humains et militante contre la peine de mort, raconte son expérience de la peine de mort dans la préface du 13e rapport annuel sur la peine de mort en Iran.

Voici présentée ci-dessous la préface de Narges Mohammadi.

Pour lire le rapport complet : cliquez ici

La peine de mort est inacceptable

L’une des causes les plus sérieuses pour lesquelles je me suis battue dans ma vie est l’abolition de la peine de mort en Iran. Il est inacceptable de mettre fin à une vie, quelle qu’en soit la justification.

Je ne suis pas opposée au fait de punir les criminels. Les criminels continueront à être punis jusqu’à ce que la cause profonde de leurs crimes soit éradiquée, mais les crimes persistent et ce n’est ni un résultat souhaitable, ni un résultat acceptable pour la société.

Il m’est difficile de voir les enfants laissés derrière après l’exécution de leur mère et/ou de leur père. Non seulement ces enfants perdent leurs parents, mais ils ne peuvent même pas en parler à cause de la honte sociale. Ils perdent tout, et il reste à voir quel sort horrible les attend ?

La peine de mort est une violence

La peine de mort est une violence. Aussi violente que la guerre, mais à plus petite échelle. Dans la guerre, des gens sont tués, des gens sont également tués par la peine de mort. Dans les batailles humaines, la violence de la peine de mort est pire que les tueries sur les lignes de front. Je suis désolée de dire que l’Iran est l’un des rares pays où des hommes et des femmes sont exécutés sur la base d’accusations multiples et parfois fausses, et à mon avis inacceptables. Lorsque j’étais emprisonnée à la prison de Zanjan, j’étais avec une femme qui attend sa condamnation à la lapidation depuis huit ans. Mais parce que l’Iran n’exécute pas les peines de lapidation en raison de la pression internationale, ils ont changé sa sentence en exécution par pendaison. Une femme doit perdre sa vie à cause d’une relation avec un homme.

Savez-vous quelle était la cause profonde de ce crime ?

Cette femme, comme toutes les femmes iraniennes, a été privée du droit au divorce. Cette femme est-elle coupable ? À mon avis, le système qui l’a amenée ici en la privant du droit au divorce est le coupable. Cette femme a donc été victime une première fois en n’ayant pas le droit de divorcer et une deuxième fois dans la pratique, lorsqu’elle ne peut pas divorcer. Elle a perdu sa jeunesse en attendant la potence.

Alors que j’étais à la prison de Zanjan, une femme avec laquelle j’avais vécu, a été exécutée par pendaison. Pourtant, je le voyais, elle était si pleine de vie et de désir de vivre. Je ne comprends pas comment les personnes qui l’entouraient ont pu ignorer l’intensité de son désir de vivre et ses appels à ne pas mourir, et pourquoi elles ont mis fin à sa vie ?

La porte ouverte aux exécutions politiques

Malheureusement, les lois en Iran ont laissé la porte ouverte à la mise en œuvre d’exécutions injustes, y compris les exécutions politiques. Les exécutions politiques ont commencé peu de temps après la révolution de 1979. Elles se sont poursuivies au fil des ans. Mais elles se sont malheureusement intensifiées lors des manifestations nationales de 2009, 2017, 2018 et 2019.

Je veux également parler de la récente augmentation du nombre d’exécutions au Sistan-Baloutchistan et, avant cela, des militants kurdes au Kurdistan.

Les exécutions de personnes comme Navid Afkari et Ruhollah Zam au cours de l’année écoulée ont été les exécutions les plus ambiguës en Iran. La condamnation à mort d’Ahmadreza Djalali est l’une des sentences les plus erronées. On doit soigneusement examiner les raisons de ces condamnations à mort. Les autorités ont condamnées à mort ces personnes après leur transfert en isolement et soumises à d’horribles tortures psychologiques et mentales, c’est pourquoi je ne considère pas que le processus judiciaire soit équitable ou juste. Je vois le fait de maintenir les accusés en isolement, de les forcer à faire de faux aveux mensongers qui sont utilisés comme preuves essentielles pour prononcer ces condamnations. C’est pourquoi je suis particulièrement inquiète des récentes arrestations au Sistan et Baloutchistan et au Kurdistan, et j’espère que les organisations anti-peine de mort accorderont une attention particulière aux détenus. Car je crains que nous soyons confrontés à une nouvelle vague d’exécutions au cours de l’année à venir.

Source : IHR

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