mardi 27 mai 2025

Arrestations arbitraires en Iran : une guerre pour la justice, une humiliation de l’humanité

 Les arrestations arbitraires désignent la détention et la privation de liberté d’une personne sans autorisation légale ou au-delà des procédures judiciaires reconnues. Les instruments internationaux relatifs aux droits de l’homme interdisent strictement de tels actes. Même les codes juridiques du régime au pouvoir en Iran interdisent formellement les arrestations arbitraires. Néanmoins, dans la pratique, ces arrestations se produisent fréquemment, violant à la fois le droit interne et international. Les organisations internationales de défense des droits de la personne, y compris Amnistie internationale, ont condamné ces pratiques à maintes reprises et fermement. Les victimes sont des militants politiques, des défenseurs des droits humains, des journalistes et des citoyens ordinaires.

Cas récents d’arrestation arbitraire

Bijan Kazemi : victime d’un scénario de sécurité et confession forcée

Bijan Kazemi (également connu sous le nom de Bijan Khajehpour Khoei) a été arrêté le 20 janvier 2025, sans sommation ni mise en demeure préalable, par des agents du ministère du Renseignement à Kuhdasht, Lorestan. Il a d’abord été placé en cellule d’isolement dans le centre de détention du renseignement à Khorramabad, puis transféré au notoire quartier 209 de la prison d’Evin à Téhéran.

Les autorités n’ont fourni aucune explication à sa famille quant au motif de son arrestation ou à son lieu de détention. Cette arrestation opaque et anarchique est emblématique des détentions arbitraires en Iran. Kazemi avait déjà enduré l’emprisonnement, mais le silence prolongé et le refus de contact dans ce cas suggèrent un scénario de sécurité beaucoup plus complexe et calculé.

Le 15 mai 2025, sa mère, Shahnaz Khosravi, a publié une déclaration publique dans laquelle elle décrivait ce qu’elle appelait un « projet de cas fabriqué et de confession forcée » ciblant son fils : « Aujourd’hui marque le 116e jour de silence complet à propos de Bijan. Après une poursuite acharnée, je ne doute plus — Bijan est victime d’une opération de coercition préprévue et d’accusations fabriquées. »

« Il n’a aucun contact téléphonique, aucune visite, aucun conseiller juridique. Je n’ai même pas entendu sa voix… Son seul « crime » est son passé… Pour une mère, même dire cela est insupportable : je ne sais pas s’il est vivant. » Elle a ajouté que l’accès de son fils aux droits humains fondamentaux était conditionné à sa « coopération », terme codé dans la culture sécuritaire du régime qui équivaut à des aveux forcés sous la torture.

Mohammad et Amirhossein Akbari Monfared

Deux membres de la famille de Maryam Akbari Monfared — une prisonnière politique qui a passé 16 ans en prison sans un seul jour de congé — ont également été arrêtés sans inculpation, sans mandat officiel et sans accès à une représentation juridique.

  • Le dimanche 19 janvier 2025, un groupe d’agents du renseignement portant des gilets pare-balles et des fusils d’assaut a pris d’assaut la maison familiale de Téhéran de Amirhossein Akbari Monfared, 22 ans, juste un jour après les morts des ecclésiastiques du régime Razini et Moghiseh. Les agents ont violemment emmené Amirhossein, le battant devant des témoins. Depuis ce jour-là, il n’y a eu aucune information sur son lieu de détention ou son état.
  • Le mardi 21 janvier 2025, des agents du renseignement ont de nouveau fait une descente dans la maison, cette fois en enlevant son père, Mohammad Akbari Monfared. Mohammad est un ancien prisonnier politique des années 1980 et a également été brièvement détenu pendant le soulèvement de 2022. Il a également disparu depuis, sans nouvelles de lui.

Les arrestations répétées de cette famille ne sont qu’un rappel flagrant de la cruauté du régime.

Autres formes d’arrestation arbitraire en Iran

Militants civils et politiques (avec des accusations vagues et sans procédure régulière)

  • Amirhossein Moradi et Ali Younesi : Deux étudiants primés et médaillés des olympiades d’astronomie et d’astrophysique arrêtés en 2020. Accusés de « corruption sur Terre » et de « collaboration avec l’Organisation des Moudjahidines du peuple de l’Iran », ils ont été soumis à une longue période d’isolement et à des aveux forcés sous la pression.
  • Mohammad Ali Dadkhah : Éminent avocat des droits de l’homme et co-fondateur du Centre des défenseurs des droits de l’homme, a été arbitrairement arrêté en juillet 2009 par des agents non identifiés à son bureau.

Ce ne sont que quelques exemples du refus flagrant de justice auquel font face les étudiants et les militants civils.

Minorités ethniques et religieuses

  • Les Bahaïs : La communauté bahaïe d’Iran est systématiquement persécutée. Des dizaines de personnes ont été détenues uniquement pour leurs croyances religieuses, souvent accusées d’« appartenance à une secte déviante » ou de « propagande contre le régime ». En 2022, au moins 90 Baha’is ont été arrêtés dans des villes comme Shiraz, Téhéran, Hamedan, Ispahan et Mashhad.
  • Les Derviches de Gonabadi : Lors des manifestations du Golestan Haftom en 2018, des centaines de derviches ont été arrêtés. Kasra Nouri, journaliste et activiste derviche, a été condamné à 12 ans de prison.
    Kurdes : Des militants kurdes culturels et politiques tels que Raouf Sheikhveysi et Sirwan Hashemi ont été arrêtés en 2023 sans aucune ordonnance du tribunal. Leur localisation est restée inconnue pendant des semaines.
  • Les Balouches : À la suite du massacre du « Bloody Friday » à Zahedan en octobre 2022, des centaines de citoyens baloutches ont été arrêtés. Les rapports indiquent que plus de 2 000 Baloutches, y compris des mineurs, ont été détenus en 2023 sans représentation juridique ni ordonnance du tribunal. Le religieux sunnite Molavi Abdolghaffar Naqshbandi a également été arrêté dans ce contexte.

Les mères et les familles des victimes en quête de justice

Les familles des victimes du vol PS752 en Ukraine, celles qui ont été tuées lors de récentes manifestations (notamment en novembre 2019) et les familles des prisonniers exécutés ont souvent été arrêtées et harcelées simplement pour avoir demandé justice ou organisé des mémoriaux pour leurs proches. Ce schéma reflète non seulement un profond mépris pour les droits de l’homme, mais il se heurte à la vengeance autoritaire. Même la poursuite pacifique et légale de la justice en Iran peut conduire à une détention arbitraire.

Violations des droits de l’homme dans les détentions arbitraires

La détention arbitraire — surtout lorsqu’elle est effectuée sans ordonnance judiciaire valide, sans fondement juridique clair ou sans respect de l’application régulière de la loi — est en contradiction flagrante avec les principes fondamentaux du droit international. Il s’agit notamment :

Déclaration universelle des droits de l’homme (DUDH) : Article 9 : « Nul ne peut être soumis à une arrestation, une détention ou un exil arbitraires ».

Pacte international relatif aux droits civils et politiques (PIDCP) : Article 9 : « Toute personne a droit à la liberté et à la sécurité de sa personne. Nul ne peut faire l’objet d’une arrestation ou d’une détention arbitraire ».

Convention contre la torture (CAT) : La détention arbitraire — particulièrement lorsqu’elle est associée à des actes de torture ou à des traitements inhumains — constitue une violation directe de cette convention.

Réponse internationale : un schéma systématique d’abus

Les Organisations internationales, dont Amnesty International, les rapporteurs spéciaux de l’ONU, la Fédération internationale des droits de l’homme, Reporters sans frontières, le Centre pour les droits de l’homme en Iran, et de nombreux autres ont sonné l’alarme à plusieurs reprises au sujet de ce schéma croissant de répression.

Le Rapporteur spécial des Nations Unies, Javaid Rehman, a mis en évidence la nature systématique des arrestations arbitraires en Iran, ciblant notamment les militants de la société civile, les étudiants, les minorités, les journalistes et les artistes.

Ses rapports dénoncent le refus d’accès à une représentation juridique choisie, le manque de transparence des procédures judiciaires, les accusations motivées par des considérations politiques et les aveux forcés sous la torture. Il a également exprimé de sérieuses préoccupations au sujet des décès suspects en détention et du refus du régime d’enquêter sur ces cas.

En 2020, quarante-sept États membres du Conseil des droits de l’homme des Nations unies ont publié une déclaration commune condamnant les arrestations arbitraires, la torture et les procès inéquitables en Iran.

Recommandations

  1. Libération immédiate et inconditionnelle de tous les prisonniers d’opinion et des membres de leur famille qui demandent justice.
  2. Les détenus ont un accès complet et sans entrave à une représentation juridique indépendante, aux services médicaux et à des contacts réguliers avec leur famille.
  3. Accès indépendant et rapide pour le rapporteur spécial des Nations unies aux prisons de sécurité et aux centres de détention.
  4. Création d’un comité international d’enquête chargé d’enquêter et de documenter les cas de détention arbitraire et de torture.
  5. Des sanctions ciblées contre les personnes responsables au sein de l’appareil sécuritaire et judiciaire iranien.

Le silence face à cette injustice institutionnalisée est une complicité

La conscience mondiale doit se relever pour défendre ceux qui, par le simple fait de penser, de résister ou de chercher justice, ont été victimes d’un système construit sur la répression.

Aucun commentaire:

Enregistrer un commentaire