Dernier retard : les pasdarans s'opposent à la punition des parents négligents. La Commission judiciaire du Parlement doit trouver un compromis sur la négligence parentale afin de garantir l'adoption du projet de loi
« Chaque jour de retard dans la ratification signifie que les enfants continueront à ne pas être protégés contre la violence et les abus », a déclaré Hossein Raeesi, avocat des droits de l’enfant.
Alors que les cas d'abus physique et sexuel sur des enfants continuent de se multiplier, le Parlement et les organes de contrôle de la législation iranienne, tels que le Conseil des gardiens, continuent de procrastiner la ratification du projet de loi sur la protection des enfants.
Le 2 décembre 2018, des informations sur le viol de plusieurs élèves dans une école d'Ispahan ont été largement publiées sur les réseaux sociaux. Par la suite, Alireza Mahdi, directeur des relations publiques du ministère de l'éducation dans la province, a confirmé la nouvelle dans une interview accordée à l'agence de presse officielle iranienne, ISNA et a annoncé qu'un suspect, membre de l’association anonyme des parents-professeurs de cette école, avait été arrêté.
Cette nouvelle est arrivée un peu moins de deux semaines après le viol d’enfants à Shushtar et la publication de clips vidéo.
Ces rapports mettent en évidence le besoin urgent de ratifier immédiatement le projet de loi sur la protection des droits des enfants et des jeunes. Pourtant, le projet de loi, rédigé il y a une dizaine d'années, continue à être envoyé entre le Parlement et le Conseil des gardiens, l'organe officiel iranien chargé de vérifier que toutes les lois sont conformes à la loi islamique.
L’avocat et militant pour les droits de l’enfant, Hossein Raeesi, a déclaré au Centre pour les droits de l’homme en Iran (CDHI) : « C’est l’une des mesures législatives les plus urgentes dont dispose le législateur. Si elle n'est pas ratifiée, les enfants ne seront pas vraiment protégés de la violence et des abus ».
Raeesi a poursuivi : « Bien sûr, le niveau de maltraitance et d'exploitation des enfants ne baissera pas le lendemain de son application, mais cela clarifiera les responsabilités des organes gouvernementaux concernés tels que les ministères de la santé et de l'éducation ainsi que le pouvoir judiciaire, entre autres, qui leur permettront d’agir plus efficacement dans la prévention de tels incidents. En outre, cela réduira considérablement le sentiment de propriété autocratique des parents sur leurs enfants, qui est souvent à l’origine de la maltraitance ».
Point de friction actuel : le Conseil des gardiens objecte à l'article 9 qui oblige les parents à répondre de leurs actes de négligence et d'abus.
Bien que le Parlement et le Conseil des gardiens soient parvenus à un accord sur la plupart des articles du projet de loi qui font l'objet de discussions depuis des années, un article reste controversé : l'article 9, qui concerne les abus et la négligence envers les enfants. Le Conseil des gardiens s’est expressément opposé à la note relative à l’article 9, selon laquelle les parents sont responsables de la maltraitance ou de la négligence à l’encontre d’un enfant.
La clause impose une peine « chaque fois que l'inattention ou la négligence parentale entraîne la mort, la perte de membres, des blessures ou l'abus sexuel d'un enfant…». Les législateurs se sont opposés à la suppression de cette clause et l'ont renvoyée à la commission parlementaire des affaires judiciaires pour réexamen.
« L'une des principales causes de préjudice pour les enfants est la négligence parentale. J'ai déjà représenté un cas, en Iran, dans lequel des parents avaient laissé leur enfant de deux ans sous la garde d'un oncle, alors même qu'il était toxicomane. L'oncle a emmené l'enfant en dehors de la ville et l'a abandonné pour chercher de la drogue. Tragiquement, l’enfant est mort… Des cas, comme celui-ci, nous montrent que les parents doivent être obligés d’agir de manière responsable envers leurs enfants et de ne pas les négliger », a déclaré au CDHI, Raeesi, l’avocat des droits de l’enfant.
L'avocat a ajouté : « Dans de nombreux pays, les parents ne sont pas autorisés à laisser leurs enfants sans la surveillance d’un adulte jusqu’à un certain âge et s’ils veulent que quelqu’un d’autre s’occupe d’eux, ils doivent respecter certaines règles ». S'il s'avère que l'aidant est un toxicomane ou a un casier judiciaire, les parents commettront un délit ».
Raeesi a expliqué au CDHI que, vu l’importance de l’article 9 pour la protection de la vie et de la santé des enfants, il était nécessaire que les membres de la commission des affaires judiciaires réécrivent le texte pour y inclure des descriptions précises qui obtiendrait l’approbation du Conseil des gardiens.
« Je suis opposé à la criminalisation, mais protéger les enfants est si important que cela justifie la criminalisation de la négligence parentale. L'existence de cette disposition aura un effet dissuasif important et forcera les parents à accorder une plus grande attention à leurs enfants », a-t-il déclaré.
Projet de loi sur la protection de l'enfance rédigé il y a 10 ans mais il n’est toujours pas adopté
En réponse aux protestations de la société face au nombre croissant de cas de maltraitance d’enfants, le pouvoir judiciaire iranien a rédigé le 12 mai 2009 un projet de loi sur la protection des enfants et des jeunes, composé de 54 articles, et l’a soumis au gouvernement du président Mahmoud Ahmadinejad. Deux ans plus tard, le gouvernement a envoyé le projet de loi contenant 49 articles au Parlement pour ratification.
Puis, en 2013, le projet de loi a été renvoyé au gouvernement, cette fois sous le président Hassan Rohani. Enfin, en février 2017, un certain nombre de femmes parlementaires ont adressé une lettre au président du Parlement, Ali Larijani, exigeant la reprise urgente des délibérations sur le projet de loi.
Dans sa forme actuelle, le projet de loi comprend 40 articles répartis en quatre sections, y compris des définitions, des organisations, des infractions pénales, des sanctions et des mesures de soutien visant à protéger les enfants et les jeunes contre la violence, les mauvais traitements et les abus. Des sanctions spécifiques sont également prévues pour les délits commis par des membres de la famille et d'autres personnes et, conformément aux conventions internationales, le projet de loi prévoit des protections spéciales pour les enfants et les jeunes de moins de 18 ans. Toutefois, le projet de loi présente encore d'importantes lacunes, telles que la protection contre les délits à l’encontre des enfants qui travaillent et des travailleurs de rue.
Après 10 ans de conflits entre divers organes de l'État, au cours desquels de nombreux enfants ont été victimes de négligence, de sévices, de viols et même de morts, il est actuellement impératif que le projet de loi soit adopté et que la commission judiciaire du Parlement arrive rapidement à un compromis sur la question de la responsabilité parentale pour négligence et abus défini dans la note relative à l'article 9, afin que le projet de loi puisse être ratifié.
Le 21 septembre 2018, Masoumeh Ebtekar, vice-présidente pour les affaires féminines et familiales, a déclaré que le gouvernement était prêt à mettre en œuvre la législation une fois qu'elle aura été approuvée par le Conseil des gardiens (les pasdarans).
Source : Le Centre pour les droits de l’homme en Iran
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