Les deux femmes journalistes iraniennes, Niloofar Hamedi et Elaheh Mohammadi, risquaient déjà d’être réincarcérées car elles ont été libérés moyennant une caution équivalente à 185 000 euros, ainsi qu’une interdiction de quitter l’Iran, dans l’attente de l’issue de leurs appels contre les longues peines de prison auxquelles elles ont été condamnées pour avoir couvert la mort de l’étudiante kurde Mahsa Amini lors de sa garde à vue en septembre 2022.
La joie qui a accueilli leur libération provisoire n’a pas duré longtemps. Le lendemain, 15 janvier, les autorités judiciaires ont annoncé leur intention de poursuivre les femmes journalistes iraniennes, Mmes Hamedi et Mohammadi pour s’être montrées en public sans hijab, a rapporté l’Agence France-Presse. Des photos des deux femmes journalistes iraniennes se tenant ensemble à l’extérieur de la prison, sans les hijabs obligatoires, avaient circulé sur les médias sociaux dans la soirée du 14 janvier.
« Après des mois de campagne pour leur libération, nous avons été soulagés de voir Niloofar Hamedi et Elaheh Mohammadi sourire à l’extérieur des murs de la prison d’Evine. Mais nous avons à peine eu le temps d’exprimer notre soulagement que les autorités ont brandi une nouvelle menace d’emprisonnement. Nous demandons la libération définitive et inconditionnelle de ces deux journalistes et la fin du harcèlement judiciaire dont ils font l’objet.
Jonathan Dagher
Responsable du bureau Moyen-Orient de RSF
Menace de réincarcération
Après avoir déjà passé 13 mois en prison, les deux femmes journalistes iraniennes ont été condamnées par la 15e chambre du tribunal révolutionnaire de Téhéran le 22 octobre 2023, à l’issue d’un procès qualifié de « simulacre » par RSF. Le tribunal a condamné Mme Mohammadi à six ans de prison pour « collaboration avec le gouvernement hostile des États-Unis » et Mme Hamedi à sept ans de prison pour le même chef d’accusation.
Le tribunal les a également condamnées à cinq ans de prison pour « conspiration et collusion en vue de commettre un crime contre la sécurité nationale » et à un an de prison pour « propagande contre la République islamique ». Toutefois, en vertu du code pénal islamique iranien, elles ne doivent purger que la plus longue des trois peines, à savoir six ans pour Mme Mohammadi et sept ans pour Mme Hamedi. Leurs avocats ont fait appel, mais aucune date d’audience n’a encore été fixée.
L’agence de presse Tasnim a déclaré qu’elles « resteront hors de prison jusqu’à ce que la cour d’appel prenne une décision ». Mais les libérations provisoires de journalistes sont souvent fragiles. Nombre d’entre eux ont été réincarcérés à maintes reprises sous le moindre prétexte.
Vague d’arrestations
Au moins 85 journalistes ont été arrêtés pour avoir couvert l’énorme vague de protestations déclenchée par la mort de Mahsa Amini en garde à vue le 16 septembre 2022, après son arrestation pour ne pas avoir respecté les règles relatives au port du hijab.
Journaliste pour le journal Shargh Daily, Mme Hamedi a contribué à faire éclater l’affaire en publiant une photo de la famille d’Amini à l’hôpital où Amini avait été emmenée peu avant sa mort. Mme Mohammadi, journaliste à Ham Mihan, a été la seule journaliste à couvrir les funérailles de Melle Amini à Saqqez, dans le Kurdistan iranien. Les deux femmes journalistes iraniennes, Mmes Hamedi et Mohammadi ont été arrêtées respectivement les 22 et 29 septembre. RSF a cité le harcèlement judiciaire de ces deux femmes journalistes iraniennes dans sa présentation du 18 décembre à la mission d’enquête de l’ONU en Iran.
Quatre femmes journalistes iraniennes au franc-parler sont toujours emprisonnées en Iran. Il s’agit de Vida Rabbani, Saeedeh Shafiei, Nasim Sultan Beigi et Narges Mohammadi, qui a reçu le prix Nobel de la paix en 2023 et qui continue d’être persécutée en prison pour avoir pris la défense de ses codétenues.
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