mercredi 8 octobre 2025

De nouvelles restrictions interdisent la scolarisation des enfants apatrides iraniens dans les provinces frontalières

 La nouvelle politique du ministère de l’Éducation bloque l’inscription de milliers d’enfants iraniens apatrides (sans papiers), aggravant les risques sociaux et sécuritaires.

Le ministère iranien de l’Éducation a introduit de nouvelles restrictions qui, dans les faits, interdisent la scolarisation des enfants iraniens apatrides — ceux dépourvus d’actes de naissance officiels — dans plusieurs provinces frontalières, notamment au Sistan-et-Baloutchistan.

Cette décision a provoqué l’inquiétude des enseignants, des familles et des défenseurs des droits humains, qui alertent sur le risque d’aggraver encore la crise d’inégalité éducative et d’exclusion sociale du pays.

Selon un rapport publié le 4 octobre par le quotidien Etemad, les responsables d’établissements scolaires du Sistan-et-Baloutchistan ont commencé à refuser l’inscription d’enfants apatrides (sans acte de naissance), en dépit d’un décret gouvernemental de 2017 autorisant leur admission au moyen d’un formulaire temporaire de « déclaration d’identité » délivré par les autorités locales.

Le ministère justifie désormais ces nouvelles restrictions par des « conditions sécuritaires particulières après la guerre de douze jours ».

Ce revirement brutal de politique, mis en œuvre au début de l’année scolaire, a déjà contraint des centaines d’élèves — dont beaucoup étaient scolarisés l’année précédente — à quitter les bancs de l’école.

Une crise ancienne d’identité et de pauvreté

Le parlement du régime iranien estimait en 2017 qu’environ un million de personnes dans le pays vivent sans documents d’identité nationaux, dont près de 400 000 enfants. Une part importante de cette population réside dans la province du Sistan-et-Baloutchistan, où le manque d’identité officielle a des racines historiques, géographiques et culturelles profondes.

Dans les zones reculées, de nombreuses familles n’ont jamais enregistré les naissances en raison de l’analphabétisme, des accouchements à domicile, de l’éloignement des bureaux d’état civil et du manque d’information sur les procédures administratives.

La pauvreté généralisée rend cette démarche encore plus difficile : dans certains villages, le nombre de personnes sans papiers continue d’augmenter chaque année.

En 2024, un membre du conseil du district de Dashtiari déclarait que 98 % des résidents sans documents officiels provenaient des couches les plus pauvres de la société. Ces familles, privées de droits fondamentaux tels que l’accès aux comptes bancaires, aux aides sociales ou aux services en ligne, se voient désormais exclues de l’éducation — l’un de leurs derniers liens avec la vie publique.

Des dizaines de milliers d’enfants privés d’école

Les responsables locaux de l’éducation estiment que la majorité des enfants non scolarisés d’Iran vivent au Sistan-Baloutchistan.

L’année dernière, le directeur provincial de l’éducation, Hassan Broushki, avait annoncé la réintégration de 10 000 enfants dans le système scolaire. Pourtant, à la rentrée 2024–2025, environ 40 000 enfants d’âge primaire restaient exclus de l’école — sans compter ceux dépourvus d’acte de naissance.

Des estimations indépendantes suggèrent que le chiffre réel pourrait dépasser 100 000 enfants.

Les statistiques officielles indiquent que 148 769 enfants et adolescents âgés de 7 à 18 ans dans cette province n’ont pas accès à l’enseignement formel — dont 81 325 filles et 67 444 garçons — soit environ 14 % de la population jeune.

Les taux d’abandon au niveau du secondaire supérieur atteignent 24 %, ce qui signifie qu’un adolescent sur quatre âgé de 15 à 17 ans ne retourne jamais en classe.

Racines structurelles et risques sociaux

Les experts avertissent que refuser l’éducation aux enfants iraniens apatrides (sans papiers) n’est pas seulement un problème administratif, mais un danger croissant pour la cohésion sociale et la sécurité.

Les enfants privés d’école en raison de la pauvreté, de la discrimination ou de l’absence d’identité sont exposés à des risques accrus de traumatismes psychologiques, d’exclusion sociale et d’exploitation criminelle à l’âge adulte.

Dans les zones frontalières où l’apatridie est répandue, cette dynamique alimente l’instabilité et mine la cohésion communautaire.

Combinées à la pénurie chronique d’enseignants et d’écoles, aux mariages précoces et au manque de structures familiales de soutien, les nouvelles restrictions d’inscription ont poussé le système éducatif régional au bord de l’effondrement.

L’inaction du régime et les promesses brisées

Cette nouvelle politique contredit directement les promesses du président du régime, Masoud Pezeshkian, qui s’était engagé à promouvoir la « justice dans l’éducation et la santé ».

Ses récentes déclarations — « Imaginez qu’il n’y ait pas de gouvernement ; trouvez vous-mêmes un moyen d’éduquer vos enfants » — ont été largement interprétées comme un aveu d’échec de l’État.

Dans l’Iran d’aujourd’hui, où la paralysie gouvernementale se conjugue à des inégalités croissantes, les enfants iraniens apatrides et exclus sont devenus les victimes silencieuses d’un régime incapable d’assurer les droits les plus fondamentaux.

Leur perte n’est pas seulement personnelle — elle constitue une menace imminente pour la stabilité sociale et l’avenir national de l’Iran.

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