La pauvreté qui ravage aujourd’hui le pays n’est pas seulement une condition économique, mais la manifestation d’une violation systémique des droits humains, où les droits à la vie, à l’alimentation, au logement, à l’éducation et à la santé sont niés à des millions de personnes, et où la dignité humaine est méthodiquement détruite.
L’ampleur de la crise : l’écart entre les chiffres officiels et la réalité
Des institutions officielles comme le Centre de recherche du Parlement (Majlis) et le ministère de la Coopération, du Travail et de la Protection sociale estiment qu’environ 30 % de la population – soit 25 à 26 millions de personnes – vivent sous le seuil de pauvreté.
Mais les données issues de sources internes, ainsi que les aveux des économistes du régime, dressent un tableau bien plus sombre.
Selon ces analyses, plus de 40 millions d’Iraniens vivent dans la pauvreté absolue, et près de 70 % de la population se situent sous le seuil de pauvreté relative.
Un économiste universitaire lié au régime a reconnu que « la grande majorité des Iraniens ne peuvent même plus subvenir à leurs besoins les plus élémentaires, tels que se nourrir et se loger ».
Cette réalité montre que, pour des millions de citoyens, la pauvreté est devenue une question de survie physique, et non plus un simple problème de revenu.
L’effondrement de la classe moyenne et la fracture sociale
D’après le Centre statistique d’Iran, le coefficient de Gini – indicateur clé des inégalités – a atteint 0,397 en 2023, marquant le niveau le plus élevé de disparité des revenus de ces dernières années.
Les études du Centre de recherche du Parlement montrent qu’entre 2012 et 2019, la classe moyenne iranienne s’est réduite de 11 % par an, et plus de 20 % de ses membres ont basculé dans la pauvreté.
Aujourd’hui, la société iranienne est divisée en deux pôles :
d’un côté, une petite élite riche composée de responsables et d’institutions liés au régime – commandants des Gardiens de la Révolution, dirigeants de fondations, et bénéficiaires des monopoles pétroliers, fonciers et d’importation ;
de l’autre, une immense majorité de travailleurs, retraités, enseignants et employés précaires vivant sous le seuil de pauvreté.
Le député Mohammad Bagheri Benabi a reconnu que le seuil de pauvreté à Téhéran dépassait désormais 30 millions de tomans par mois, tandis que le salaire minimum officiel, avantages compris, n’atteint que 17 millions de tomans.
Cette fracture illustre un système économique rentier et corrompu, où la richesse issue du travail et de la production est accaparée par le cercle restreint du pouvoir.
Inflation, insécurité alimentaire et effritement des moyens de subsistance
Une inflation galopante a poussé des millions de familles au bord de l’effondrement.
Selon les médias officiels Eghtesad News et ILNA (octobre 2025) :
le prix de la viande rouge a dépassé un million de tomans le kilo,
les produits laitiers ont augmenté de plus de 80 %,
et le pain de près de 95 %.
Les données de la FAO (Organisation des Nations unies pour l’alimentation et l’agriculture) indiquent que 41 % des Iraniens souffrent d’une insécurité alimentaire modérée ou sévère, et que 36 millions de personnes ne peuvent se permettre un régime équilibré.
La consommation de protéines parmi les ménages à faible revenu est tombée à moins d’une fois par semaine.
Dans ce contexte, la survie a remplacé la vie, et la pauvreté est devenue le symbole d’une injustice institutionnalisée.
Les causes structurelles : corruption et mauvaise gouvernance
Des économistes proches du régime, tels que Hossein Raghfar et Farshad Momeni, ont publiquement admis que l’effondrement économique de l’Iran découle avant tout de la corruption interne et de la mauvaise gestion systémique, bien plus que des sanctions.
Raghfar a déclaré :
« Les hausses de prix en Iran n’ont jamais favorisé le développement ; elles ne servent qu’à dépouiller le peuple et à enrichir l’oligarchie au pouvoir. »
Momeni a ajouté :
« Le prix des denrées alimentaires a grimpé de 82 % ; les tables des familles sont vides tandis que les dirigeants jouent avec les zéros de la monnaie. »
Ces aveux confirment que la pauvreté en Iran est le produit direct d’une économie rentière et monopolistique, où les priorités budgétaires servent la machine militaire et idéologique du régime, au détriment des besoins essentiels de la population.
Conséquences sociales : corruption, criminalité et génération sacrifiée
La pauvreté généralisée a non seulement détruit les moyens de subsistance, mais aussi désagrégé le tissu social iranien.
Corruption : la misère et la défiance ont nourri la corruption à tous les niveaux – de la petite fraude à la contrebande, jusqu’à l’évasion fiscale et l’enrichissement illicite des élites.
Criminalité et violence : selon les rapports du pouvoir judiciaire et de la police nationale, les crimes violents, la violence domestique et les vols ont atteint des niveaux record en 2023, directement liés au chômage et au désespoir économique.
Analphabétisme et travail des enfants : le ministère de l’Éducation reconnaît que 3,2 millions d’enfants ne sont pas scolarisés, et qu’au moins 2 millions d’enfants travailleurs sont exploités à travers le pays, souvent dans des conditions dangereuses.
Mariages précoces et inégalités de genre : dans les provinces appauvries comme le Sistan-et-Baloutchistan, les mariages forcés de filles de moins de 15 ans se sont multipliés.
Ces données montrent que la pauvreté en Iran n’est pas uniquement économique : elle est culturelle, éducative et morale.
Elle entretient un cycle intergénérationnel de privation qui met en péril l’avenir même de la nation.
Contexte international et réactions mondiales
Dans son rapport de 2022, Alena Douhan, rapporteuse spéciale de l’ONU sur les effets négatifs des sanctions unilatérales, a reconnu que celles-ci avaient aggravé la situation humanitaire en Iran.
Mais elle a aussi souligné que la corruption interne et la mauvaise gouvernance restaient les principales causes de la pauvreté et des inégalités.
Alors que le régime attribue toutes les crises aux sanctions, les données officielles montrent que la pauvreté et les inégalités augmentaient déjà avant leur intensification.
Les rapports du Programme des Nations unies pour le développement (PNUD) classent l’Iran en dessous de la moyenne régionale dans l’indice de développement humain, reflétant une inégalité structurelle et un manque de croissance inclusive.
Conclusion et appel à l’action internationale
La pauvreté endémique en Iran constitue aujourd’hui une crise humanitaire et une violation massive des droits humains.
Plus de la moitié de la population vit sous le seuil de pauvreté, des millions d’enfants sont privés d’éducation et d’alimentation, et la classe moyenne – pilier de la stabilité sociale – a été anéantie.
Dans ces conditions, les appels à la réforme interne n’ont plus de sens :
le régime au pouvoir est lui-même l’architecte et le bénéficiaire de cette pauvreté.
La communauté internationale doit donc agir sans délai :
Mettre en place une mission indépendante d’enquête sous l’égide du Conseil des droits de l’homme de l’ONU pour examiner les causes structurelles de la pauvreté et de la corruption en Iran.
Imposer des sanctions ciblées contre les institutions et individus responsables du pillage des ressources publiques.
Soutenir la société civile iranienne et les médias indépendants qui exposent la corruption et les injustices sociales.
Acheminer l’aide humanitaire par des canaux non gouvernementaux, afin d’atteindre directement les familles, les femmes et les enfants vulnérables, sans interférence du régime.
En cette Journée internationale pour l’élimination de la pauvreté, le cri du peuple iranien exige une réponse mondiale :
Tant que la pauvreté systémique, la corruption et la répression perdureront en Iran, la dignité humaine restera une illusion.


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