mercredi 8 octobre 2025

La pauvreté croissante en Iran : les familles se rabattent sur les queues de poulet et le pain, tandis que la viande et les produits laitiers deviennent des luxes

 Un reportage de terrain à Téhéran révèle une pauvreté croissante, l’effondrement du pouvoir d’achat, des boucheries désertées et des régimes alimentaires privés de protéines.

Un récent reportage de terrain publié par le quotidien Ham-Mihan dresse un tableau saisissant de l’effondrement du pouvoir d’achat et de l’aggravation de l’insécurité alimentaire dans la capitale iranienne, par conséquent d’une pauvreté croissante. En enquêtant dans huit districts de Téhéran — notamment les régions 6, 10, 11, 12, 16, 17, 18 et 19 — le journal constate que les habitants réduisent drastiquement leur consommation d’aliments de base tels que la viande, les produits laitiers, les légumineuses et même les œufs, tandis que certaines boucheries ont fermé faute de clients.

Selon Ham-Mihan, la flambée des prix a bouleversé les habitudes de consommation d’une manière saisissante.
Alors que les prix de la viande s’envolent, beaucoup achètent désormais des queues de poulet, l’une des parties animales les moins chères, tandis que d’autres se contentent d’un demi-blanc ou d’une seule cuisse pour faire durer leur budget.
Le journal note qu’au début du mois d’octobre, le bœuf atteignait 900 000 tomans le kilo, entraînant une baisse des ventes de 30 à 40 %.

Un boucher du district 11 a déclaré au journal que les clients bénéficiant de coupons de rationnement préféraient les utiliser pour acheter du riz et de l’huile de cuisson plutôt que de la viande, car « même un petit achat épuise tout leur bon d’achat ». Certains consommateurs tentent de réduire les coûts en mélangeant du bœuf avec des morceaux moins chers, comme de la graisse rénale, tandis que d’autres ont tout simplement cessé d’acheter de la viande.

Des œufs aux légumineuses : tout devient inaccessible

Ham-Mihan rapporte également un changement dans les comportements d’achat, avec une tendance croissante aux achats au détail et à la pièce.

Avec une boîte d’œufs désormais vendue 200 000 tomans, de nombreux acheteurs les prennent un par un.
« Un client qui achetait trois cartons se contente aujourd’hui de cinq œufs », explique un commerçant.
« Sur vingt clients, peut-être un seul achète encore une boîte entière. »

La même tendance s’observe pour les légumineuses, dont les prix ont atteint des sommets historiques.
Les détaillants affirment que même les clients les plus aisés n’en achètent plus qu’un demi-kilo.
Ham-Mihan précise que les haricots pinto coûtent jusqu’à 700 000 tomans le kilo, tandis que les pois chiches sont désormais l’option la plus abordable.

Un épicier confie : « Les clients qui achetaient autrefois 100 kilos de riz n’en prennent plus qu’un seul sac. »

Les produits laitiers disparaissent, le pain remplace la protéine

Les produits laitiers sont devenus inaccessibles pour la majorité des familles, les poussant vers des substituts de piètre qualité.

« Un client qui achetait trois kilos de fromage Lighvan se contente aujourd’hui de 40 000 tomans d’un fromage bas de gamme, au goût de craie », raconte un vendeur de produits laitiers.
« Une seule brique de crème coûte 66 000 tomans et ne trouve pas preneur ; même le lait reste au réfrigérateur jusqu’à sa date de péremption. »
Un autre commerçant ajoute que le beurre se vend désormais au gramme.

Le quotidien avertit que la détérioration de la qualité et de la quantité du régime alimentaire des ménages iraniens dépasse désormais la seule perte de protéines animales : elle touche aussi les sources végétales.
À mesure que la population renonce à la viande, aux produits laitiers et aux légumineuses, la consommation de pain a explosé, devenant la principale source de calories — ou, comme le souligne le rapport, « un moyen de se remplir l’estomac, non de se nourrir. »

D’une société à revenu moyen à une crise alimentaire

Autrefois considérée comme une société à revenu intermédiaire, l’Iran fait aujourd’hui face à une pauvreté croissante, une crise alimentaire où la nutrition elle-même devient un privilège.
L’inflation galopante, la stagnation des salaires et la mauvaise gestion du régime ont laissé des millions de personnes incapables de se procurer les denrées les plus élémentaires — symbole de la profondeur avec laquelle l’effondrement économique du pays s’est immiscé dans la vie quotidienne.


Aucun commentaire:

Enregistrer un commentaire