lundi 10 février 2025

Vidéo : Un historique des Moudjahidine du Peuple d’Iran (première partie)

 Iran : 120 ans de lutte pour la liberté

L’Iran est l’une des plus anciennes civilisations du monde, avec un héritage et des traditions plurimillénaire, un peuple talentueux et moderne qui aspire à vivre dans la paix, la liberté et la prospérité. La patrie des philosophes et des poètes est une terre riche en potentiel humain et en d’immenses ressources naturelles qui pourraient lui permettre de se développer normalement et devenir un pays prospère et florissant. Pourtant la grande majorité de son peuple vit dans l’indigence et la misère, ses institutions démocratiques sont bafouées et ses immenses potentiels dilapidés et gaspillés par des régimes dictatoriaux et corrompus qui se sont imposés par la force et la violence. Les uns réclamant le pouvoir absolue du monarque, les autres le pouvoir absolue du guide suprême religieux. Sans la démocratie et la souveraineté du peuple, l’évolution naturel de la société est entravée et son progrès compromis.

C’est ce qui explique que dans l’histoire contemporaine de l’Iran, des générations successives d’Iraniens se sont engagées dans une lutte courageuse et couteuse pour prendre leur destin en main et ouvrir la voie pour la liberté, la justice et l’égalité.

La première grande révolution démocratique au Moyen-Orient a eu lieu en 1906 en Iran, quand les révolutionnaires constitutionalistes, qu’on surnommait Moudjahidine, eurent raison du roi Qadjar pour créer la maison du peuple. Un parlement pour exprimer la volonté de la majorité et une constitution pour affirmer les principes de représentation nationale, de liberté d’opinion et de justice sociale. Événement fondateur de l’Iran moderne, marquant un nouvel ordre politique et historique, la révolution constitutionnelle de 1906 c’est la victoire de l’idéal démocratique et des idéaux des Lumières contre l’absolutisme monarchique. Inspiré des valeurs émancipatrices des grandes révolutions d’Europe et le Printemps des peuples, ainsi que des traditions de justice et d’égalité de l’islam des Lumières, les premiers révolutionnaires iraniens marquèrent durablement les consciences par leurs sacrifices dans cette voie. Les efforts courageux des moudjahidine, emmenés par des héros nationaux tels que Satar Khan, Bagher Khan et Koutchak Khan ont abouti à des avancés politiques et à un héritage de lutte qui ont inspiré les futures générations épris de liberté et d’indépendance.

Or, les ingérences colonialistes et violentes de puissances étrangères mirent à mal les réformes démocratiques recherchées. De coups d’Etat et machinations politiques en intervention militaires étrangères, les écueils sur le chemin de l’émancipation sociale furent nombreux. Mais face à l’adversité, les efforts pour la défense des droits du peuple iranien n’ont jamais cessé. Le mouvement national a relevé la tête à plusieurs occasions historiques, notamment à l’occasion du mouvement pour la nationalisation du pétrole au début des années 1950, dirigé par le premier ministre apprécié des Iraniens, Mohammad Mossadegh. L’ouverture politique intervenue après la deuxième guerre mondiale ne fut que de courte durée. La dictature reprit la main avec un coup d’Etat fomenté par la CIA et des services britanniques, avec la collusion de la Cour et des mollahs réactionnaires, pour écarter Mossadegh et réinstaller la dictature du Chah. Hossein Fatémi, le populaire et irréductible ministre des Affaires étrangère du gouvernement Mossadegh a été exécuté et Mossadegh lui-même a été exilé jusqu’à la fin de sa vie.

La fin du mouvement réformiste ; la naissance de l’OMPI

Devant la violence extrême du régime du Chah, le réformisme a vite montré ses limites. Face à l’impasse historique, de jeunes intellectuels iraniens ont fait le point sur la nouvelle donne politique du pays et ont décidé de suivre l’exemple d’autres nations en lutte, à une époque où plusieurs pays du monde s’engageaient dans des mouvements de libération nationale. L’Organisation des Fédayins du Peuple et l’Organisation des Moudjahidine du Peuple, fondés par de jeunes intellectuels et universitaires iraniens, décidèrent de passer à l’acte pour briser l’impasse politique crée par la dictature du Chah.

Ici nous développerons l’historique du second mouvement. Celui qui jouera plus tard un rôle de premier plan dans l’histoire contemporaine de l’Iran et représente aujourd’hui la principale force de résistance face à la théocratie iranienne.

Le terme « Moudjahidine » signifie combattants de la liberté. Son utilisation en Iran remonte à la révolution constitutionnelle de 1906, lorsque les militants de la liberté, qu’ils soient musulmans, chrétiens ou zoroastriens étaient appelés Moudjahidine.

L’Organisation des Moudjahidines du peuple d’Iran (OMPI) s’en est inspiré lorsqu’elle fut fondée en 1965 par de jeunes diplômés iraniens. L’initiative se voulait d’abord une réponse du peuple iranien à la terreur instaurée par la monarchie du Chah après sa prise de pouvoir en 1953 par un coup d’Etat. La répression sanglante de toute opposition persuada Hanifnejad, Mohsen et Badizadegan et leurs compagnons que les méthodes d’opposition légales étaient révolues sous le régime du Chah. La porte pour faire valoir pacifiquement les droits démocratiques de la nation étaient définitivement closes. Se voulant une organisation de résistance, ses membres ont fondé la légitimité de leur combat sur notamment la déclaration universelle des Droit de l’Homme qui reconnaît le droit, « en ultime recours », à la résistance contre l’oppression. Partisans du grand Mossadegh, qui favorisait un régime démocratique et indépendant de la mainmise étrangère, les premiers moudjahidine ont cherché à fonder leur démarche sur la base d’une idéologie qui résonne avec notre époque et en même temps puisse répondre aux problèmes complexes que pose la lutte de libération nationale. Ils se sont alors inspirés d’une interprétation démocratique et éclairée de l’Islam. Une idéologie en accord à la fois avec la culture et les convictions de la population et en phase avec les idées de modernité et de justice sociale.

François Colcombet, magistrat et ancien député, cofondateur du Comité français pour un Iran démocratique : « L’OMPI a joué un rôle historique irremplaçable. Dans la filiation des réformistes de 1906, et dans celle plus récente de Mossadegh, l’OMPI a été créée par des membres de la ‘’jeunesse mossadeghiste’’. Elle a constamment cherché une voie originale entre la tradition et la modernité en intégrant la philosophie des droits de l’homme et de la démocratie dans une culture très marquée par la tradition musulmane – qui plus est, chiite.»

Du fait de leur engagement sincère et dévoué pour la cause de la liberté et leur adhérence à un islam tolérant et démocratique, les jeunes Moudjahidine voient leur popularité grandir de jour en jour. Effrayé par cet accueil social, le régime du Chah a cherché à les décrédibiliser aux yeux de l’opinion en les taxant de « marxistes islamique ». Cette étiquette est toujours utilisée par les mollahs au pouvoir en Iran, et relayé par le lobby du régime dans les médias et cercles politiques occidentaux complaisants.

Cette interprétation progressiste va rapidement opposer l’Ompi à Khomeiny, le guide suprême des mollahs qui se réclame d’une légitimité divine. Il a désavoué les Moudjahidines du Peuple bien avant son arrivée au pouvoir en 1979. Il a rejeté leur interprétation démocratique de l’islam comme « éclectique et hérétique ».

Contrairement aux intégristes qui considèrent la croyance ou la non-croyance en Dieu comme critère de vérité et de légitimité politique, les fondateurs des Moudjahidine affirmèrent que la véritable ligne de démarcation c’est entre l’oppresseur et l’oppressé. Ce n’est pas le fait d’être musulman ou non-musulman, ou d’être croyant ou athée qui est le principal critère de légitimité, mais le fait de se trouver dans le camp de l’oppresseur ou de l’oppressé.

Ils rejettent la discrimination et l’exploitation de l’homme par l’homme et appuient leur démonstration sur les enseignements et l’exégèse dynamique du Coran et d’autres sources islamiques. Les Moudjahidine du Peuple qui sont le premier mouvement de masse musulman à avancer des arguments théoriques érudits démontrant que, contrairement aux conceptions des intégristes, il n’y a pas de contradiction entre l’islam et la civilisation moderne. Le jeune mouvement des Moudjahidine du Peuple gagne rapidement la sympathie de la jeunesse iranienne et des milieux intellectuelles. Cet élan impose l’Ompi comme le principal mouvement de résistance sous la dictature du Chah.

Mais la férocité de la dictature que fit régner la SAVAK, la sinistre police politique du chah, fut implacable. En éliminant l’espace démocratique du pays et en enfermant les intellectuels et démocrates iraniens dans les prisons, le chah favorisa par ricochet le développement des forces extrémistes dirigés par Rouhollah Khomeiny et le clergé réactionnaire. Ces mêmes forces confisqueront plus tard le pouvoir en Iran.
En 1979, rongé de l’intérieur par la corruption et en décalage avec les aspirations profondes de la population, le régime monarchique a été emporté par une grande révolution populaire.

Source : CNRI

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