Son témoignage met une nouvelle fois en lumière les graves violations de la procédure régulière et l’usage systématique de charges politisées par les autorités iraniennes pour infliger des peines lourdes aux militantes politiques et civiles.
Au début de son récit, Zahra Tabari déclare : « Les seules choses qu’ils m’ont attribuées étaient un morceau de tissu et une note vocale ; rien d’autre. Il n’y a rien de plus dans mon dossier. Et selon l’article 2 du Code pénal islamique, un crime doit être défini par la loi pour qu’une peine puisse être prononcée. »
Elle explique que les charges portées contre elle ont changé de manière répétée et arbitraire : « Avant tout cela, mon accusation était la soi-disant “appartenance à la bande des Monafeqin”. Puis soudain, c’est devenu “appartenance au groupe terroriste des Monafeqin”. Ajouter le mot “terroriste”, c’était simplement pour leur permettre d’émettre la condamnation à mort contre moi, et c’est exactement pour cela que je m’y oppose. »
Monafeqin est un terme péjoratif utilisé par le régime clérical pour désigner sa principale force d’opposition, l’Organisation des Moudjahidine du peuple d’Iran (OMPI/MEK).
Requalification soudaine des charges et absence totale de procédure équitable
Zahra Tabari souligne que, depuis son arrestation jusqu’au prononcé de la peine, aucun élément d’un procès équitable n’a été respecté : « Ma deuxième objection, et la raison pour laquelle ce verdict n’a aucune validité juridique, est que je n’ai bénéficié d’aucune procédure équitable à aucun stade. Dès le début, lorsque j’ai été arrêtée, ils m’ont accusée de bagh-ye (rébellion armée). Bien que l’accusation ait ensuite changé, le 25 mai, elle a été rétablie. Donc, je suis restée en prison sous la même accusation de bagh-ye. »
Elle décrit également le comportement de l’instructeur : « M. Bakhshipour, l’instructeur de la Branche 4… honnêtement, à mes yeux, c’est quelqu’un assis là, une corde au coude, à mesurer la taille des cous des gens ! »
Un procès de quelques minutes, avec un avocat commis d’office sur un écran
Zahra Tabari raconte qu’on lui a refusé toute possibilité réelle de se défendre : « Mon avocat commis d’office est apparu sur un écran pendant l’audience. Je l’ai vu pour la première fois à ce moment-là. J’ai protesté, mais personne n’a répondu, et je n’ai même pas entendu la voix de l’avocat. »
Elle poursuit : « J’ai aussi protesté contre la modification soudaine des charges, dont je n’avais pas été informée. J’étais reliée à la salle d’audience par téléphone. Ils m’ont posé une seule question : “Présentez votre dernière défense.” J’ai dit que je n’avais commis aucun crime défini par la loi qui justifierait une peine, et qu’ils me punissaient uniquement à cause de mes convictions. »
En invoquant l’article 23 de la Constitution, elle précise : « Selon l’article 23, nul ne peut être puni pour ses convictions. Pourtant, ils ont transformé ce qui aurait dû être une simple peine disciplinaire de 5 ou 6 mois en une accusation pénale. »
Une protestation sociale : la véritable raison de son arrestation ?
Zahra Tabari explique que ses critiques portaient sur l’injustice sociale, et non sur un acte justifiant une accusation de sécurité nationale : « Si le problème, ce sont mes convictions, alors oui, je suis une protestataire. Je proteste contre le fait qu’une femme doive plonger dans une poubelle juste pour en sortir du pain pour survivre. »
Elle dénonce également la situation des enfants travailleurs : « Comment un gouvernement peut-il tolérer qu’un enfant se tienne à un carrefour pour mendier au lieu d’aller à l’école ? Voilà ce que je protestais. »
Un procès-verbal rempli “d’erreurs”, sans trace de ses véritables déclarations
Zahra Tabari explique que le compte rendu officiel de son audience ne reflétait en rien ses propos : « Ils m’ont dit qu’ils allaient m’envoyer le procès-verbal de l’audience. Mon procès avait lieu mardi. Le samedi à 9 h 30, ils m’ont remis le document. Quand je l’ai lu, j’ai vu à quel point il était truffé d’erreurs ; mes déclarations n’y figuraient même pas. Je n’ai pas entendu la lecture de l’acte d’accusation, pas du tout. »
Elle ajoute : « J’ai écrit mes objections partout où il restait de la place, dans chaque marge de chaque page. »
“Ce verdict est invalidé à la racine”
En conclusion, Zahra Tabari affirme : « Le verdict prononcé contre moi n’a aucune base légale ni crédibilité judiciaire. Même selon leurs propres lois, il est invalide. »
Et elle termine par cet avertissement : « À mes yeux, c’est un meurtre judiciaire, pas une décision judiciaire. »
Préoccupation croissante concernant le sort de Zahra Tabari
Le témoignage de Zahra Tabari depuis la prison de Lakan à Rasht dresse un tableau précis de la pression sécuritaire, de l’absence des normes les plus élémentaires d’un procès équitable et de la réécriture arbitraire des accusations sans aucune preuve crédible. Elle souligne avoir été privée d’une défense effective et que son dossier est truffé de violations procédurales et légales.
Son affaire est devenue l’un des exemples les plus flagrants du mépris des autorités iraniennes pour la procédure régulière dans les poursuites contre les détenues politiques, une affaire fondée, comme elle le dit, sur « un morceau de tissu et une note vocale », et qui a pourtant conduit à l’une des peines les plus lourdes.

Aucun commentaire:
Enregistrer un commentaire