L’emprisonnement de Cecile Kohler et d’autres ressortissants étrangers révèle l’utilisation systématique de la prise d’otages par Téhéran, à la fois comme instrument de diplomatie et de répression.
La prise d’otages, désormais politique d’État
Autrefois tactique criminelle de groupes hors-la-loi, la prise d’otages est devenue une politique institutionnalisée en Iran. Le bref appel à l’aide de Cecile Kohler — « Je n’en peux plus » — lors d’un appel téléphonique à sa famille résume la gravité de cette tragédie.
Kohler et son partenaire, Jacques Parry, sont détenus depuis mai 2022, non pour un crime reconnu par le droit international, mais parce que Téhéran a élevé la prise d’otages en outil de chantage politique.
Un schéma de détention arbitraire
Les cas de Kohler et Parry ne sont pas isolés. Ils s’inscrivent dans un long schéma de détentions arbitraires menées par le régime clérical pour obtenir des concessions dans les négociations internationales.
En été 2023, un jeune Franco-Allemand a été arrêté sur des prétextes similaires. La Britannique d’origine iranienne Nazanin Zaghari-Ratcliffe a été détenue six ans avant d’être libérée contre le paiement d’une dette de 400 millions de livres par le Royaume-Uni. Des ressortissants américains, suédois et australiens ont également été visés.
Amnesty International a condamné à plusieurs reprises ces pratiques, les qualifiant en 2022 de « détentions arbitraires à des fins de levier diplomatique » et de « forme de torture psychologique violant le droit international ».
Les familles confirment ces constats : les détenus subissent l’isolement, le refus d’accès à un avocat et des restrictions de contact familial, conditions qui nuisent gravement à leur santé mentale et à leur dignité.
Le chantage comme politique d’État
Le régime iranien présente souvent ces arrestations comme relevant de la « sécurité nationale », alors qu’il s’agit en réalité de cartes de négociation. Téhéran propose régulièrement des échanges de prisonniers, offrant de libérer des Européens ou Américains en échange de ses propres agents détenus à l’étranger.
Le gouvernement français a fermement rejeté cette tactique, insistant publiquement sur l’innocence de ses citoyens et leur libération sans condition. Pourtant, les offres répétées de « négociation » de Téhéran ne sont pas des initiatives diplomatiques, mais une admission flagrante de sa stratégie criminelle de prise d’otages.
Ce comportement révèle le caractère mafieux de l’État iranien, qui se perpétue par la répression interne et le chantage international.
Condamnation internationale et isolement croissant
La diplomatie par la prise d’otages pratiquée par Téhéran a été largement condamnée :
Le Groupe de travail des Nations Unies sur la détention arbitraire a émis plusieurs avis contre l’Iran.
L’Union européenne a dénoncé l’emprisonnement de ses citoyens sur des accusations fabriquées, le qualifiant de « grave violation du droit international ».
Les diplomates occidentaux considèrent désormais l’Iran comme acteur étatique peu fiable. Pour de nombreux gouvernements, tout engagement avec Téhéran comporte le risque que leurs ressortissants soient arrêtés arbitrairement et utilisés comme pions. Cette stratégie a empoisonné les relations avec l’Europe et les États-Unis, accentuant l’isolement global de l’Iran.
Le coût humain
Derrière les enjeux géopolitiques se trouvent les vies des détenus et de leurs familles. Les mots de Cecile Kohler témoignent du fardeau psychologique écrasant. Les familles décrivent un cycle permanent de désespoir et d’incertitude, ne sachant jamais quand ou si leurs proches seront libérés.
Les anciens otages libérés après des années de détention rapportent des traumatismes à long terme, notamment un stress post-traumatique, suite aux interrogatoires et à l’isolement dans la tristement célèbre prison d’Evin. Les séquelles de l’isolement, des interrogatoires et de la menace constante d’exécution persistent bien après la libération.
Une histoire de diplomatie par otages
Cette politique n’est pas nouvelle. La crise des otages à l’ambassade américaine en 1979, avec 52 Américains détenus pendant 444 jours, a fixé le précédent. Depuis, le régime utilise systématiquement les otages pour obtenir des concessions.
Des enlèvements du Hezbollah au Liban dans les années 1980, dirigés par Téhéran, jusqu’aux arrestations actuelles de ressortissants bi-nationaux, la prise d’otages est intégrée à la stratégie de survie du régime.
Amnesty International avertit que sans sanctions plus sévères, l’Iran continuera de considérer la prise d’otages comme un outil diplomatique légitime.
Un régime de terrorisme d’État
La prise d’otages n’est pas seulement une violation des droits humains : c’est une forme de terrorisme d’État. En instrumentalisant des civils innocents, l’Iran sape le droit international et la diplomatie, transformant aéroports, écoles et visites touristiques en zones de danger pour les étrangers.
À court terme, cette approche peut rapporter des gains ponctuels (allégement des sanctions ou libération d’agents iraniens à l’étranger), mais elle renforce durablement la réputation de l’Iran comme État paria. Chaque nouvelle détention aggrave l’isolement de Téhéran et confirme son image de régime qui fait commerce de vies humaines.
Conclusion
Les noms de Cecile Kohler, Jacques Parry et d’autres ressortissants détenus s’ajoutent à l’histoire sombre de répression, torture et chantage du régime clérical.
Un gouvernement qui remplace la diplomatie par la prise d’otages ne peut être considéré comme un acteur étatique normal.
Tôt ou tard, le régime paiera un lourd tribut. Pour la communauté internationale, le défi est double :
Obtenir la libération des otages actuels,
Faire reconnaître la prise d’otages iranienne pour ce qu’elle est réellement : un crime contre l’humanité et une arme de terreur d’État.

Aucun commentaire:
Enregistrer un commentaire