mardi 23 septembre 2025

Mort silencieuse des détenus dans les prisons iraniennes

 Les prisons iraniennes : des salles d’attente pour la mort silencieuse des prisonniers malades

Résumé exécutif

« Chaque jour de retard dans les soins est une peine de mort déguisée. »

Des témoignages fiables provenant de l’intérieur des prisons montrent que les décès des prisonniers en Iran ne sont pas dus aux maladies elles-mêmes, mais à une politique délibérée de privation de soins. La mort récente de Maryam Shahraki dans la prison de Fardis et l’état critique de Somayeh Rashidi à Qarchak illustrent ce schéma meurtrier. Les détenus souffrant de maladies graves telles que le cancer, des troubles cardiaques ou de la colonne vertébrale se voient systématiquement refuser l’accès aux traitements et sont laissés à une agonie lente et douloureuse. La prison pour femmes de Qarchak et celle de Sheiban (Ahwaz) sont des exemples emblématiques où les autorités bloquent volontairement les transferts hospitaliers, condamnant ainsi les détenus à une mort silencieuse.

Introduction et cadre

La privation de soins médicaux dans les prisons iraniennes n’est ni un accident ni le résultat d’un manque de ressources. Il s’agit d’un outil calculé pour exercer une pression, infliger de la torture et, en fin de compte, éliminer des prisonniers, en particulier les détenus politiques. Ce ne sont pas les médecins, mais les autorités sécuritaires et judiciaires qui décident des transferts hospitaliers, transformant des maladies curables en sentences mortelles.

Amnesty International, dans son rapport d’enquête « Dans la salle d’attente de la mort », a averti que les autorités bloquent délibérément l’accès des prisonniers malades aux soins essentiels, transformant les prisons en « salles d’attente de la mort ». Les Rapporteurs spéciaux de l’ONU ont, à plusieurs reprises, souligné que de telles pratiques pourraient constituer des actes de torture et des traitements cruels, inhumains ou dégradants.

Cas notables de morts silencieuses

– Maryam Shahraki (~40 ans), prison de Fardis : symptômes cardiaques graves écartés comme de simples « douleurs d’estomac » ; décédée le 12 septembre 2025.
– Jamileh Azizi, prison de Qarchak : privée de soins d’urgence lors d’une crise cardiaque ; décédée le 20 septembre 2025.
– Somayeh Rashidi, prison de Qarchak : épileptique, ses crises entre le 16 et le 20 septembre 2025 ont été qualifiées de « simulation » ; transférée seulement après un effondrement ; les médecins ont décrit son état comme « irréversible ».
– Seyed Abolhassan Montazer-Moqaddam (65 ans), prison de Qezel Hesar : souffrant de pathologies cardiaques, hépatiques, diabète et problèmes de colonne, privé d’une chirurgie urgente.
– Mohammad Ali Mahmoudi (56 ans), prison de Fashafouyeh : leucémie et insuffisance cardiaque, privé de traitement.
– Mir Yousef Younesi (72 ans), Fashafouyeh : ses interventions chirurgicales annulées à plusieurs reprises à la dernière minute.
– Mohammad Ali Akbari Monfared (âgé), Fashafouyeh / hôpital de Tajrish : paralysé et diabétique, hospitalisé menotté, avec un risque d’amputation d’un membre.
– Eyoub Porkar (69 ans) et Jaber Albo-Shokeh, prison de Sheiban : tous deux dans un état critique, privés de transfert hospitalier.

📌 La liste complète des prisonniers malades ou décédés, avec détails des pathologies et des issues, figure dans le tableau annexé.

 

Mécanismes de la privation de soins

– Retards délibérés de transfert : les décès de Maryam Shahraki et de Jamileh Azizi montrent comment ces retards se traduisent en peines de mort.
– Contrôle sécuritaire des décisions médicales : le transfert de Mir Yousef Younesi a été annulé trois fois à la dernière minute. Des responsables comme Seyed Abdollah Mortezavi affirment publiquement qu’« il n’y a pas de limite aux transferts hospitaliers » – en contradiction avec les faits.
– Stigmatisation des malades : les crises de Somayeh Rashidi ont été qualifiées de « simulation », entraînant des retards mettant sa vie en danger.
– Conditions de transfert humiliantes : Rahaleh Rahimi-Pour n’a été envoyée en soins intensifs qu’entravée de menottes et de chaînes, retardant sa prise en charge.
– Obligation de payer les traitements : à Fashafouyeh, les prisonniers doivent acheter eux-mêmes des médicaments essentiels comme l’insuline ou les traitements cardiaques.
– Absence de séparation des détenus : les prisonniers politiques sont détenus avec des criminels violents — par exemple, Alireza Shir-Mohammadi, poignardé à mort à Fashafouyeh.

Analyse juridique (synthèse)

– Droit à la vie (PIDCP, article 6) : les décès évitables, comme celui de Maryam Shahraki, violent ce droit fondamental.
– Interdiction de la torture (PIDCP article 7 / DUDH article 5) : qualifier des détenus malades de simulateurs et les enchaîner en soins intensifs constitue un traitement cruel et inhumain.
– Règles Mandela (24–27) : les prisonniers doivent bénéficier de soins de santé équivalents à ceux offerts à la population générale.
– Droit à la santé (PIDESC, article 12) : bloquer les transferts constitue une violation de ce droit fondamental.
– Caractère systématique : l’ampleur de ces violations pourrait relever de crimes contre l’humanité (Statut de Rome, article 7).

Conclusion et appel à l’action

Les prisons iraniennes sont devenues des salles d’attente de la mort pour les détenus malades. Les décès récents à Fardis et Qarchak, ainsi que les conditions de détention mettant en danger la vie des prisonniers à Fashafouyeh, Sheiban et Qezel Hesar, révèlent une politique délibérée et systématique de privation de soins.

Nous appelons :

– le Conseil des droits de l’homme de l’ONU,
– les Rapporteurs spéciaux de l’ONU sur la torture et le droit à la santé,
– et toutes les instances internationales de défense des droits humains à :
– Mettre en place une mission d’enquête indépendante sur les décès suspects ;
– Exiger des soins médicaux immédiats et sans entrave pour tous les prisonniers malades en Iran ;
– Tenir les responsables iraniens pour comptables de ces violations systématiques.

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