La commission spéciale du régime iranien, nommée par le président Masoud Pezeshkian pour enquêter sur les manifestations nationales de 2022, a soumis son deuxième rapport, dont une copie au Haut Commissaire des Nations Unies aux droits de l’homme. Le rapport exonère le gouvernement de toute responsabilité dans la répression brutale des manifestations et nie les allégations de torture. Il est frappant de constater que si les armes à feu avaient été utilisées plus largement, les manifestations auraient été réprimées plus tôt.
Exposé du gouvernement et soumission à l’ONU
Le rapport, rendu public le 26 mars, a été remis au président Pezeshkian par le président de la commission, Hossein Mozaffar, le 12 mars. La mission permanente de l’Iran auprès des Nations unies l’a remis au Haut Commissaire des Nations unies aux droits de l’homme le 21 mars.
Au lieu de reconnaître les causes sociales et politiques des manifestations nationales de 2022 – telles que l’ingérence du régime dans les libertés individuelles et les violations généralisées des droits de l’homme – le rapport attribue les troubles aux sanctions américaines et aux difficultés économiques.
Réclamations d’indemnisation et rapports contradictoires
La commission déclare avoir reçu 1 148 plaintes de victimes et affirme avoir pris des mesures « nombreuses et significatives » pour les indemniser. Cependant, plus de deux ans après le soulèvement, des rapports continuent de faire état de pressions exercées par l’État sur les familles des victimes. Au lieu d’être indemnisés et de recevoir des soins médicaux, de nombreux manifestants sont confrontés à un harcèlement continu de la part des forces de sécurité.
Bien qu’elle affirme coopérer avec la mission d’établissement des faits de l’ONU, la position de la commission est contredite par la Commission indépendante d’établissement des faits de l’ONU qui, en décembre 2024, a déclaré que les survivants avaient un besoin urgent de vérité, de justice et de responsabilité pour les violations des droits de l’homme et les crimes contre l’humanité.
Nombre de morts et répression des manifestants
Le rapport réitère la position du régime selon laquelle la mort de Mahsa Amini résulte d’une maladie sous-jacente, rejetant les allégations de coups mortels portés à la tête ou aux organes vitaux. Il accuse les « émeutiers et les éléments étrangers » d’être à l’origine des violences, ainsi que les « nouvelles fausses et provocatrices » diffusées par les médias en langue persane.
Selon la commission, 281 personnes ont été tuées lors des manifestations : 90 qualifiés d’« émeutiers », 54 membres du personnel de sécurité, 25 dans des « attaques terroristes » et 112 civils qui auraient été tués par des auteurs non identifiés, ce qui permet d’absoudre les forces de sécurité de toute responsabilité.
Cependant, cela contredit les déclarations des responsables du régime. Le 28 novembre 2022, Amir Ali Hajizadeh, commandant de la force aérospatiale des pasdarans, a admis que le régime avait tué plus de 300 personnes lors de la répression.
Le régime a également fait état de 6 308 blessés, dont 5 681 agents de sécurité et 627 civils. Pourtant, pendant les manifestations, les forces de sécurité ont systématiquement utilisé des fusils de chasse et des balles de peinture pour mutiler les manifestants, en ciblant particulièrement leurs yeux. De nombreux manifestants blessés agonisent toujours, privés de soins médicaux.
Torture, détentions et condamnations à mort
La commission affirme n’avoir trouvé aucun rapport faisant état de mauvais traitements infligés aux détenus, précisant que les plaintes concernaient principalement les condamnations. Toutefois, les organisations de défense des droits de l’homme ont fait état de nombreux cas de torture, de violences sexuelles et de disparitions forcées de détenus, y compris de mineurs.
La commission rapporte que 34 000 manifestants ont été arrêtés lors des manifestations nationales de 2022, dont 90 % ont été libérés par la suite dans le cadre d’une amnistie générale décrétée par le Guide suprême Ali Khamenei. Elle indique que 292 actions en justice ont été intentées et que 130 condamnations ont été prononcées.
Bien que des compensations financières aient été accordées aux victimes (73,9 milliards de tomans), la réalité des détenus est bien plus sombre. Les informations font état de conditions de détention difficiles, de l’absence de contacts familiaux, de tortures, d’exécutions, d’exils et d’interdictions d’emploi. En outre, les étudiants protestataires risquaient l’expulsion de leurs études, tandis que les professeurs d’université et les enseignants étaient renvoyés ou interdits d’enseignement.
Accusations d’influence étrangère et massacre de Zahedan
Le rapport accuse les États-Unis, l’Allemagne, la France, la Norvège, l’Australie, l’Italie, l’Espagne et la Corée du Sud d’avoir joué un « rôle important » dans le déclenchement des manifestations nationales de 2022. Il reprend également la version du régime concernant le massacre de Zahedan du 30 septembre 2022, affirmant que des hommes armés ont lancé l’attaque contre un poste de police. Cependant, des témoins oculaires et des rapports indépendants confirment que des tireurs d’élite et les forces de sécurité ont délibérément tiré sur les manifestants, tuant plus de 100 personnes, dont 17 enfants.
Un mois plus tard, un massacre similaire a eu lieu à Khash, où les forces du régime ont ouvert le feu sur les manifestants. Amnesty International a fait état de 18 morts.
Négation des violences sexuelles et des empoisonnements d’étudiants
Le rapport du régime rejette les allégations généralisées de violences sexuelles à l’encontre des détenus, affirmant que sur les 45 cas signalés, seules cinq personnes ont été identifiées et aucune n’a porté plainte. Il réfute également les allégations de viols contre des agents du régime, malgré des cas documentés impliquant des membres du CGRI.
Les organisations de défense des droits de l’homme ont toutefois confirmé l’existence de violences sexuelles systématiques. Amnesty International a rapporté en mars 2023 que des enfants détenus, dont certains n’avaient que 12 ans, avaient été soumis à la torture, au viol et à d’autres abus.
De même, la commission nie l’implication du régime dans l’empoisonnement massif d’étudiantes lors des manifestations, attribuant ces incidents à des « éléments partiaux et hostiles » utilisant des boules puantes, des gaz lacrymogènes et des sprays au poivre pour semer le chaos.
Pourtant, depuis le 30 novembre 2022, des informations faisant état d’attaques au gaz toxique sur des écolières ont alarmé l’opinion publique, les autorités refusant d’aborder la question. Les autorités refusent d’aborder la question. Après avoir d’abord rejeté les empoisonnements comme des méfaits commis par des élèves, elles ont ensuite blâmé des « actions ennemies » sans fournir d’explications crédibles.
Conclusion
Le rapport de la commission spéciale du régime iranien, soumis à l’ONU, constitue une tentative claire d’absoudre l’État de sa responsabilité dans la répression brutale des manifestations nationales de 2022.
En accusant des acteurs étrangers, en minimisant le nombre de victimes et en niant la répression systématique, le régime continue de se soustraire à ses responsabilités en matière de violations des droits de l’homme.
Des rapports indépendants émanant d’organisations de défense des droits de l’homme, de victimes et même de certains membres du régime brossent un tableau tout à fait différent, celui d’un État qui se livre à une répression généralisée, à la torture et à des violences ciblées à l’encontre de ses citoyens.
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