Un débat controversé
Dans un rapport intitulé « Installer des caméras de surveillance dans les salles de classe : oui ou non ? », publié le lundi 24 mars, Tasnim a souligné que si la plupart des écoles en Iran sont déjà équipées de caméras de sécurité dans les couloirs et les cours, les salles de classe sont restées largement exemptes d’une telle surveillance.
Le rapport indique que la question est débattue depuis plus de dix ans, mais que les responsables de l’éducation se sont toujours abstenus de la mettre en œuvre en raison de diverses préoccupations, notamment la résistance des syndicats d’enseignants. Certains responsables affirment que les salles de classe constituent un « espace privé » pour les enseignants et qu’une surveillance constante pourrait les empêcher d’enseigner librement.
Justifications et préoccupations du gouvernement
Malgré une opposition de longue date, les institutions de sécurité affiliées au régime font pression en faveur de la surveillance des salles de classe, d’autant plus que les inquiétudes concernant la baisse de la qualité de l’enseignement se font de plus en plus vives. Dans une récente interview accordée à l’agence de presse gouvernementale IRNA, Ali Farhadi, porte-parole du ministère de l’éducation, a justifié le renforcement de la surveillance par l’impact négatif des fréquentes fermetures d’écoles sur l’apprentissage des élèves.
Mohammad Salimi, directeur général de l’évaluation des performances et de la réponse aux plaintes au ministère de l’éducation, a également pris part au débat. S’adressant à Tasnim, il a reconnu que si la salle de classe est « sous le contrôle de l’enseignant », la présence de caméras de surveillance pourrait imposer des restrictions aux éducateurs. Il a également suggéré que rendre les salles de classe plus transparentes, par exemple en remplaçant les murs par des vitres, pourrait améliorer la surveillance, mais il a admis que de telles mesures auraient un impact négatif sur la qualité de l’enseignement.
Comparaisons avec d’autres pays
Le rapport de Tasnim a tenté de justifier la surveillance proposée en citant l’utilisation intensive par la Chine de caméras de surveillance dans les salles de classe pour « améliorer les normes éducatives et contrôler les performances des enseignants ». Toutefois, le média a également reconnu la résistance de pays occidentaux tels que l’Allemagne et la France, où les critiques affirment qu’une telle surveillance viole la vie privée des enseignants et crée un environnement oppressif dans les salles de classe.
Implications plus larges d’une surveillance accrue
L’installation de caméras dans les salles de classe est considérée par beaucoup comme faisant partie des efforts plus larges du régime iranien pour renforcer le contrôle sur les écoles, en particulier à la suite des protestations généralisées. Depuis le soulèvement de 2022, dans lequel les enseignants et les étudiants ont joué un rôle crucial, les autorités ont intensifié leurs efforts pour réprimer la dissidence au sein des établissements d’enseignement.
Au cours des deux dernières décennies, le régime a eu recours à diverses mesures répressives à l’encontre des étudiants, des enseignants et des militants syndicaux, en particulier à la suite de manifestations contre le régime. Parmi ces mesures, on peut citer :
- Des attaques chimiques contre des écoles de filles
- Des menaces d’expulsion et de suspension d’élèves
- Le renvoi et l’emprisonnement d’enseignants et de militants syndicaux
Un incident notable s’est produit en octobre 2024, lorsque l’administration du lycée de filles Farzanegan-1 à Téhéran a été brusquement changée. Des parents ont alors protesté devant le centre local d’éducation et de formation. Un parent a affirmé que « la nouvelle administration a cessé de travailler avec les enseignants masculins et a installé des caméras de surveillance dans toutes les parties de l’école, même dans les toilettes ».
Dans un autre cas, Zahra Lori, directrice de l’école Rezvaninejad à Kerman, a été démise de ses fonctions en 2022 après avoir refusé de remettre aux autorités les noms des élèves protestataires et les enregistrements des caméras. Elle est décédée peu de temps après son licenciement, ce qui a suscité des soupçons quant aux circonstances de sa mort.
Conclusion
La proposition d’installer des caméras de surveillance dans les salles de classe représente une nouvelle tentative du régime iranien d’étendre son contrôle sur le système éducatif. Alors que les autorités présentent cette mesure comme un moyen d’améliorer le contrôle de l’éducation, beaucoup y voient un moyen de réprimer davantage les étudiants et les enseignants qui osent remettre en question les politiques du régime.
Face à l’opposition persistante des éducateurs, des parents et des militants de la société civile, le débat sur la surveillance des salles de classe restera probablement un point d’ignition dans la lutte actuelle de l’Iran pour la liberté académique et les libertés civiles.
Aucun commentaire:
Enregistrer un commentaire