samedi 1 mars 2025

Visioconférence : Nouvelle vague d’exécutions en Iran – Jeudi 27 février - En collaboration avec des associations et des organisations de défense des droits humains en France

 Madame Azadeh Alemi, représentante de la CSDHI et modératrice de la vidéoconférence, a ouvert la session en mettant en lumière la hausse inquiétante des exécutions en Iran. Elle a souligné qu’en 2024, près de 1 000 exécutions ont eu lieu, un chiffre bien plus élevé que les années précédentes, dont 34 femmes exécutées, établissant ainsi un triste record mondial. De plus, plus de 100 exécutions ont déjà été recensées en 2025, poursuivant cette tendance alarmante. Elle a expliqué que ces exécutions reflètent la répression brutale du régime face au soulèvement national du peuple iranien, qui reste toujours vif.

En tant que modératrice, Mme Alemi a également mis en avant les actions entreprises par la CSDHI pour lutter contre cette situation. À la fin de 2024, l’association a lancé la campagne « Non à la peine de mort », qui a déjà recueilli plus de 800 signatures de maires à travers la France, dont ceux de grandes villes comme Paris, Lyon et Montpellier. Elle a mentionné qu’en février 2025, la CSDHI a coordonné une grande manifestation à Paris pour l’abolition de la peine de mort, attirant une foule immense, témoignant ainsi de l’engagement fort de l’association pour cette cause.

De plus, Mme Alemi a souligné les actions collectives des organisations de défense des droits humains telles que l’ACAT et Amnesty International. Ces efforts ont conduit le ministère des Affaires étrangères français à prendre position officiellement contre l’augmentation des exécutions en Iran. La discussion s’est particulièrement concentrée sur quatre prisonniers politiques—Behrouz Ehsani, Mehdi Hassani, Sharifeh Mohammadi et Pakhshan Azizi—dont la condamnation à mort a été récemment confirmée et qui risquent une exécution imminente. Des appels urgents ont été lancés pour demander l’arrêt immédiat de leurs exécutions. La conférence a également mis en lumière les 56 prisonnières politiques actuellement sous le coup d’une condamnation à mort en Iran, soulignant les graves préoccupations en matière de droits humains.

Richard Sédiillot, avocat et membre du conseil d’administration d’Ensemble contre la peine de mort (ECPM), a exprimé sa profonde préoccupation concernant la situation en Iran, soulignant l’engagement actif de l’association « Instrument contre la peine de mort » sur cette question. Il a invité les participants à consulter un rapport détaillé disponible en ligne, aussi bien en français qu’en anglais, afin de mieux comprendre l’ampleur du problème.

Il a ensuite partagé des chiffres alarmants sur les exécutions en Iran, mentionnant que 975 personnes avaient récemment été exécutées, dont 4 en public. Parmi elles, entre 31 et 34 étaient des femmes. Il a également mis en lumière la répression spécifique visant les minorités, avec 192 exécutions concernant des Baloutches et des Kurdes, ainsi que l’exécution de 80 ressortissants étrangers, principalement afghans. Les condamnations étaient souvent prononcées pour des délits liés à la drogue (43 %), des crimes de mœurs, des insultes aux autorités ou encore des accusations de corruption, souvent définies de manière vague.

L’augmentation continue du nombre d’exécutions est particulièrement préoccupante, avec plus de 9 557 cas recensés depuis 2008. L’année 2024 semble suivre une trajectoire similaire aux records atteints en 2005, ce qui renforce l’urgence d’une action internationale. Il a souligné que, malgré une apparente indifférence des juridictions iraniennes, la pression internationale et la médiatisation de certains cas avaient parfois permis d’atténuer les répressions. Il a cité l’exemple d’une avocate iranienne dont l’exposition médiatique avait pu, au moins en partie, lui offrir une certaine protection.

Pour conclure, M. Sédiillot a insisté sur l’importance de ne pas se décourager et de poursuivre les efforts de mobilisation sur les plans médiatique et judiciaire. Il a rappelé que les campagnes de sensibilisation, notamment via des vidéos impliquant des personnalités influentes, avaient déjà eu un impact significatif en attirant l’attention du monde sur ces injustices. Il a encouragé chacun à réfléchir à de nouvelles actions concrètes pour continuer à défendre les victimes et lutter contre ces condamnations arbitraires.

Me Patrick Baudouin, Président d’honneur de la Fédération internationale pour les droits humains (FIDH) et de la Ligue des droits de l’Homme (LDH), a exprimé sa vive préoccupation face à l’augmentation spectaculaire des exécutions en Iran en 2024, plaçant le pays au deuxième rang mondial après la Chine. Il a souligné que les chiffres officiels pourraient être sous-estimés et que de nombreuses exécutions, présentées sous couvert de droit commun, sont en réalité motivées politiquement.

M. Baudouin a dénoncé la persécution des minorités, notamment les Kurdes et les Moudjahidines, ainsi que l’accroissement des exécutions de femmes. Il a également mentionné le retour des exécutions publiques, témoignant d’une répression accrue par un régime en difficulté, affaibli sur les plans interne et international.

Face à cette situation, il a insisté sur la nécessité d’une mobilisation massive des organisations de défense des droits humains, qu’elles soient iraniennes, nationales ou internationales. Il a appelé à une pression renforcée sur les gouvernements, notamment en France et au sein de l’Union européenne, pour faire de la situation en Iran une priorité. Enfin, il a évoqué les actions juridiques possibles, telles que la compétence universelle, permettant d’interpeller des responsables iraniens impliqués dans ces crimes, et la saisie d’organisations internationales traitant des exécutions arbitraires. Il a conclu en appelant à ne pas cesser les manifestations et les actions, car le silence ne ferait qu’encourager la répression.

Mme Solange Moumé Etia, Directrice du Pôle Programmes et Plaidoyer de l’ACAT-France, a exprimé son inquiétude profonde face à la situation des droits humains en Iran, notamment l’augmentation alarmante des exécutions. En tant qu’ONG chrétienne engagée contre la peine de mort et la torture, l’ACAT suit de près les événements en Iran et a lancé plusieurs appels urgents concernant des prisonniers politiques, tels que Varisha Moradi, Pakhshan et Sharifeh Mohammadi.

Elle a souligné que le nombre d’exécutions de femmes a considérablement augmenté, atteignant 34 en 2024, un chiffre accablant qui témoigne d’une répression croissante. Elle a également dénoncé les discriminations ethniques contre les Kurdes, dont de nombreux militants sont exécutés. Malgré la mobilisation de la société civile, elle regrette l’inaction des gouvernements face aux violations des droits humains en Iran. Elle a insisté sur l’importance d’une mobilisation générale et coordonnée, affirmant que la pression internationale peut avoir un impact, comme cela a été observé dans certains cas.

L’ACAT continue d’exhorter les autorités internationales à agir et renforce son réseau de militants pour organiser des actions collectives visant à lutter contre la peine de mort et les persécutions en Iran.

Mme Mitra Bigham, avocate au barreau de Bruxelles, membre de la famille des victimes du massacre de 1988, a partagé son expérience personnelle de la perte de son frère, Mehran Bigham, exécuté en 1988 lors du massacre de 30 000 prisonniers politiques. Elle a expliqué que son frère, arrêté à l’âge de 17 ans pour avoir participé à une manifestation, a été incarcéré pendant 8 ans avant d’être exécuté avec de nombreux autres prisonniers. Elle a raconté l’horreur de ne jamais avoir su où il avait été enterré, et le régime lui ayant même remis un morceau de corde utilisé pour son exécution.

Mme Bigham a déclaré : « Nous n’avons jamais su où il avait été enterré. Ce qu’ils nous ont donné, c’était un morceau de la corde avec laquelle ils l’ont pendu. » Elle a souligné que la douleur et les souffrances dues à l’exécution d’un être cher ne se limitent pas à la personne exécutée, mais affectent profondément toute la famille, et cette douleur se transmet à travers les générations. Elle a aussi évoqué le traumatisme causé par la perte, en rappelant les cris de sa mère qui résonnent encore dans sa mémoire.

Mme Bigham a également insisté sur le fait que les exécutions actuelles en Iran sont des exécutions politiques visant à étouffer les aspirations légitimes à la liberté et à la démocratie. Elle a mis en lumière les nombreux prisonniers politiques, y compris des femmes et des mineurs, qui continuent de subir des exécutions arbitraires. Elle a fait référence au procès de Hamid Nouri en Suède, condamné en 2022 pour sa participation aux exécutions de 1988, soulignant que cela représentait un espoir de justice, malgré l’impunité qui a longtemps entouré ces crimes. Elle a aussi exprimé sa conviction que la justice internationale doit jouer un rôle clé dans la défense des droits humains, et a appelé à ne pas oublier les victimes de 1988 et à agir avant qu’il ne soit trop tard.

En conclusion, Mme Bigham a rappelé l’importance de continuer la lutte pour la justice et de ne jamais oublier les victimes de ces atrocités.

Monsieur Taher Boumedra, juriste, expert en droits humains, Président de Justice pour les Victimes du Massacre de 1988 en Iran (JVMI), ancien haut fonctionnaire des Nations Unies pour l’Irak (MANUI), a exprimé sa solidarité avec les familles des victimes du massacre de 1988 en Iran, soulignant que ce crime ne doit jamais être oublié. Il a déclaré : « Un crime comme celui de 1988 n’est pas oublié… c’est un crime contre l’humanité. » Selon lui, malgré le passage du temps, ces atrocités ne doivent pas être reléguées dans l’oubli, et il a rappelé que les responsables de ces exécutions doivent être traduits en justice.

Il a également souligné l’importance de la justice internationale pour garantir que de tels actes ne restent pas impunis. Il a ensuite évoqué le nombre alarmant d’exécutions en Iran depuis 2008, en particulier sous les présidences de Mahmoud Ahmadinejad, Hassan Rohani et Ebrahim Raisi, avec plus de 10 000 exécutions durant cette période. Monsieur Boumedra a critiqué le fait que, malgré la surveillance de l’ONU et des rapports des rapporteurs spéciaux des droits de l’Homme, le régime iranien persiste dans ses violations des droits fondamentaux, notamment l’exécution de prisonniers politiques.

M. Boumedra a insisté sur le fait que la peine de mort, en vertu du droit international, ne devrait être appliquée que dans des circonstances très spécifiques et graves, ce qui n’est manifestement pas le cas en Iran, où les opposants politiques sont exécutés sous des accusations sans fondement. Enfin, Monsieur Boumedra a appelé à la responsabilité des juges iraniens et des responsables judiciaires, soulignant que leur rôle est de respecter les droits fondamentaux et de suivre les normes internationales. Il a ajouté que les violations des droits humains en Iran, notamment en ce qui concerne les exécutions politiques, doivent être prises en compte par la communauté internationale.

Selon lui, il est essentiel que la société civile continue de faire pression sur le régime iranien pour que la peine capitale soit réduite et que tous les procès respectent les engagements internationaux de l’Iran. Il a également encouragé l’utilisation de la compétence universelle pour poursuivre ceux responsables de ces crimes, afin de garantir qu’ils répondent de leurs actes devant la justice.

À la fin de la vidéoconférence, Mme Azadeh Alemi a remercié tous les intervenants et a souligné l’importance de la lutte contre les exécutions en Iran. Elle a précisé que chacun peut avoir un impact en écrivant des lettres, en participant à des campagnes en ligne, ou en manifestant contre la peine de mort. Ensuite, la session de questions-réponses avec le public a commencé. Pour clôturer, Mme Alemi a remercié tous les participants et a partagé les liens de contact de l’association dans le chat.

Source : CSDHI 

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